La Chronique Agora

Latin, crédit et baisse de taux

** La Fed a baissé ses taux. Cette baisse était universellement attendue. Le mois dernier, les prix de l’immobilier ont chuté de 1,5% aux Etats-Unis. Le mois prochain, ils chuteront sans doute plus encore. Cela choque bon nombre de propriétaires immobiliers. Ils pensaient qu’acheter un foyer était une chose sûre ; ils pensaient qu’ils ne pouvaient pas se tromper… mais même ceux qui n’ont pas emprunté la voie risquée des prêts hypothécaires ont été réveillés sans ménagement. Leur maison vaut moins qu’ils ne le pensaient — et c’est de plus en plus fréquent.

* Hélas, le marché financier est bien moins magnanime qu’il l’était il y a quelques années de ça. A présent, les propriétaires marginaux subissent la pression de la hausse des prix et de la hausse de leurs mensualités. Les investisseurs marginaux, quant à eux — même ceux qui ont des milliards à jeter par la fenêtre –, subissent la pression de la chute des actifs.

* Le mot "crédit" vient du latin credere, qui signifie "croire". Les investisseurs — à la base ou au sommet — sont de Vrais Croyants. Ils croyaient au Nouveau Zoo-capitalisme — dans lequel tout est toujours sous contrôle… et où les fauves sont tous sous les barreaux. Ils pensaient que le boom du crédit ne prendrait jamais fin… que les prix des maisons grimperaient toujours… que l’ingénierie financière pourrait transformer des prêts douteux en crédits triple AAA… et que les gérants du zoo s’assureraient que les animaux ont toujours assez à manger.

* A présent, il semblerait que le vieux capitalisme — aux griffes aussi affûtées que ses crocs — soit de retour.

* Et voilà un commentaire intéressant… intéressant parce qu’on dirait quelque chose que nous aurions pu écrire :

* Ramachandra Bhagavatula, directeur exécutif d’un hedge fund new-yorkais, écrit :

* "Ce qui se passe, c’est que la valeur nette des ménages ne grimpe pas par bonds — en fait, elle baisse sans doute — [ce qui signifie que] les gens doivent en fait commencer à épargner à partir de leur revenu actuel. Cela a des effets négatifs sur la croissance des dépenses. Je pense que les cinq prochaines années, pour l’économie US, ressembleront de bien des manières à celle du Japon après 1990. La grosse [croissance] qu’on a eue dans des classes d’actifs variées — financées par l’emprunt grâce à des taux extraordinairement bas — va prendre fin. Lorsqu’on observe le paysage économique, les cours des actions sont trop hauts, les prix des maisons sont trop hauts, et lorsqu’on met toutes les pièces ensemble, la taille de l’ajustement nécessaire semble raisonnablement conséquente. Combien d’années faudra-t-il ? Qui sait ? Cela ne signifie pas nécessairement que nous vivrons cinq années de récession — cela pourrait durer trois ou quatre trimestres seulement".

** "La Fed a terminé l’année avec trois baisses de taux dont je parlais déjà en mai", déclare le spécialiste en devises Chuck Butler. "Je disais également que la Fed continuera à baisser les taux en 2008, jusqu’à ce qu’ils atteignent 3-3,25%. Cela fait encore 100 points de base, chers amis… est-ce que vous pensez vraiment que les étrangers se bousculeront aux portes des Etats-Unis pour des actifs à 3% de rendement ? Ooooh… ça me donne des frissons rien que d’y penser !"

* "Je disais également en début de semaine qu’on pourrait voir la Fed changer son utilisation du terme ‘croissance équilibrée’. Ils ne sont pas allés aussi loin, mais ils ont quand même dit que ‘la croissance économique ralentit, reflétant l’intensification de la correction immobilière ainsi qu’un ralentissement des dépenses des entreprises et des consommateurs. De plus, les tensions ont augmenté sur les marchés financiers ces dernières semaines’."

* "Hmmm… on ne dirait pas que la croissance soit à l’équilibre avec le risque/inflation, si ? Alors pourquoi n’ont-ils pas fait de déclaration plus objective ? Parce qu’ils savent que cela pourrait ‘effrayer’ les investisseurs étrangers. Lorsque les investisseurs étrangers sont effrayés, ils n’achètent pas les actifs américains, et lorsqu’ils n’achètent pas les actifs américains, la balance courante n’est pas financée, et lorsque la balance courante n’est pas financée… le dollar s’affaiblit !"

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