La Chronique Agora

La fin du rebond des gogos ?

** La semaine dernière, le suspense était intenable : le rebond de marché baisser… le rebond des gogos… est-il terminé ? Après une chute majeure des cours, il n’y a rien de plus fiable qu’un rebond. Et on peut compter sur le rebond pour céder le pas à une nouvelle chute encore plus dure. Non que nous soyons pressé de voir les marchés baisser une fois encore. Nous aimons simplement quand les choses se passent comme elles sont censées le faire.

* Peut-être que nous avons effectivement assisté à un point de bascule. Peut-être que M. le Marché est d’avis qu’il a attiré assez de gogos. Avec des actions qui ont grimpé durant neuf semaines d’affilée… et des investisseurs ayant engrangé un gain de 37%… ce serait un piège baissier typique.

* Les actions ne sont pas bon marché. Il n’y a pas de raison de les acheter, sauf si l’on pense que l’économie va s’améliorer, augmentant les profits des entreprises. Est-ce probable ? Eh bien, tout dépend de ce que vous pensez de la situation actuelle. Si vous êtes d’avis que ce n’est qu’une pause dans une économie saine par ailleurs… vous pouvez penser que les choses vont aller mieux. C’est ce qui s’est produit après chaque récession depuis 1948. La récession moyenne durait 10 mois environ… avec un déclin du PIB de 2% environ. Selon ces critères, celle que nous vivons actuellement devrait être terminée.

* Mais si vous pensez que nous vivons actuellement quelque chose qui va plus loin qu’une récession post-Deuxième Guerre mondiale typique, alors… soyez vigilant. La Grande Dépression a duré près de quatre ans… éliminant 27% du PIB.

* Et regardez ce qui se passe au Japon. Là-bas, ils vivent une récession par intermittence depuis 1990. Les investisseurs qui se sont positionnés sur les rebonds de ces 19 dernières années ont fini par être déçus. Chaque fois que les actions japonaises ont rebondi, elles n’ont pas tardé à retomber. A présent, elles grimpent — comme le reste des actions mondiales. Mais elles sont quand même environ 70% inférieures à leur sommet de 1989.

** Pour autant que nous puissions en juger, tout se passe comme prévu : les consommateurs réduisent leurs dépenses. Les actions rebondissent. L’économie s’affaiblit. Et le gouvernement empire la situation.

* Après 25 ans d’imprudences — dépenses, emprunts et endettement de plus en plus profond — les Américains reprennent leurs esprits. Ils réduisent leurs dépensent. Ils sont décidés à ne plus être rackettés par l’économie mondialisée.

* "Depuis le début des années 80", commence un article de The Economist, "les dépenses des ménages en biens, services et maisons ont grimpé plus vite que le PIB, ce qui en a fait la locomotive de l’expansion américaine — et mondiale. En 2006, elles représentaient 76% du PIB nominal, le plus haut pourcentage depuis que les données trimestrielles ont commencé, en 1974".

* "Cela s’est accompagné d’un déclin constant du taux d’épargne personnel et d’une augmentation de la dette des ménages par rapport aux revenus. Cela n’était pas un problème en soi ; la dette des ménages grimpait par rapport au revenu depuis 1950, tandis qu’une part croissante de la population prenait des prêts hypothécaires. En dépit du fardeau de dette de plus en plus lourd, la baisse des taux d’intérêt a permis de maintenir le total des obligations financières des ménages — remboursement des intérêts, loyers et baux — dans un canal durant les années 80 et 90".

* "Un point d’inflexion s’est produit aux environs de 2000. La croissance des revenus a stagné tandis que les dettes continuaient d’augmenter rapidement, passant de 94% des revenus à 133% en 2007"…

* Mais ça, c’était quand les prix des maisons grimpaient et que le crédit était facile à obtenir. Cette année, c’est différent, nous dit The Economist. Par rapport à l’an dernier, le secteur des cartes de crédit n’a envoyé que le quart de sollicitations pour de nouveaux clients. Et maintenant que les prix des maisons chutent… et que le secteur financier est en plein sauve-qui-peut… les consommateurs n’ont plus les pelles nécessaires pour creuser leur trou de dette plus profond encore ; ils doivent cesser de dépenser plus d’argent.

** The Economist estime que les consommateurs doivent se débarrasser de 3 000 milliards de dollars d’excès de dette hypothécaire rien que pour revenir aux niveaux de 2000. Si toute l’épargne américaine était sollicitée, il faudrait quatre ou cinq ans au rythme actuel. "Ajouter de la dette est toujours bien plus rapide que de s’en débarrasser", explique notre collègue Simone Wapler.

* Mais l’année 2000 était une année où les taux d’intérêts réels étaient très bas… couronnant la fin d’une période de 20 ans d’expansion du crédit, non le début. Alors que les taux d’intérêt réels grimperont durant le prochain long cycle de contraction du crédit, les consommateurs voudront probablement faire revenir leur dette aux niveaux de 1990 — ou même 1980 — ce qui exigerait de rembourser des milliers de milliards en plus.

* S’attendre à les voir s’arrêter à l’an 2000, c’est prendre ses désirs pour des réalités. C’est comme si l’on s’attendait à voir ce marché baissier ramener les prix des actions à leur niveau de 2000, plutôt qu’à un niveau plus en rapport avec le plancher réel.

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