La Chronique Agora

La fin de l'American Way of Life

** Le monde continue de tourner et les ressources naturelles continuent à être utilisées. En dépit de ce raisonnement élémentaire, les "experts" continuent leur débat sur la diminution ou non des ressources en question. Mais les preuves sont évidentes, du moins pour votre chroniqueur.

– L’année passée, nous avons vu les prix exploser sur les marchés du pétrole et de l’agriculture. Et il se pourrait que ce ne soit que le début de la montée des cours, et non pas la fin, comme certains essaient de vous le faire croire. Personnellement, je pense que nous sommes à mi-chemin d’un nouveau record pour beaucoup de matières premières. Ce qui signifie que le pétrole atteindrait 200 $ (au moins) et l’or 1 500 ou 2 000 $. Les marchés de l’agriculture pourraient aller encore plus loin.

– Les matières premières essentielles se font de plus en plus rares. Nous devons donc nous attendre à voir encore plus de souffrances dans les pays les plus pauvres, pour commencer. Puis l’impact économique va remonter la chaîne alimentaire (pardonnez le jeu de mot).

– Les faits sont assez déprimants si on les observe attentivement. Mais très peu d’Américains en comprennent les ramifications.

– Dans son célèbre livre Vivre avec les morts et les mourants, Elisabeth Kubler-Ross décrit les différents stages du deuil :

• Le déni : "ce n’est pas possible".
• La colère : "pourquoi moi ? Ce n’est pas juste".
• Le marchandage : "laissez-moi vivre juste assez longtemps pour voir mes enfants recevoir leur diplôme".
• La dépression : "je suis tellement triste, plus rien ne vaut la peine".
• L’acceptation : "tout va bien se passer"

– En ce moment, le public américain traverse ces étapes de deuil. L’augmentation des prix n’est rien d’autre qu’un signal du marché qui signifie que les Etats-Unis perdent leur abondance économique et leurs ressources. Le rêve américain qui s’effrite, c’est comme la mort d’un membre de la famille. A l’instant même, je pense que les Américains sont entre la phase de déni et celle de colère.

** Aucune matière première n’a autant blessé le portefeuille des Américains que l’énergie. Pendant les dernières années, les prix du pétrole et de l’essence ont plus que doublé. Mais malgré ces augmentations très importantes, les Américains continuent de conduire leurs voitures. Il n’y a eu qu’une très faible baisse dans l’utilisation de l’essence — seulement 1% environ.

– Ils continuent d’utiliser leurs gros véhicules utilitaires. Ils sont toujours seuls dans leurs voitures pour aller au travail. La plupart des gens n’utilisent quasiment pas les transports en commun (s’il y en a). Et ils adorent mettre la climatisation à fond pendant qu’ils regardent des documentaires sur le réchauffement de la planète et la disparition des ours polaires sur leur énorme écran plasma.

– Les Américains se plaignent. Mais ils sont toujours dans le déni. "Ce n’est pas possible", se disent-ils. "Le prix de l’essence va sûrement retomber sous la barre des 3 $ le gallon".

– Oui, ils aiment ronchonner quand ils font le plein de leurs gros 4×4, certainement parce qu’il est plus facile de se plaindre que d’appliquer des changements drastiques et pourtant nécessaires. Ils estiment qu’ils ont le droit de continuer à vivre de la sorte. Hé, après tout, ils l’ont mérité. Pas vrai ? Plutôt que de faire des choix difficiles, ils sont en plein déni et croient ce que le gouvernement et les média leur disent : tout va bien.

– Réalité et fiction sont souvent mêlées quand on parle du problème de la disparition de TOUTES les ressources naturelles. Prenez l’augmentation du prix du pétrole brut. Certaines personnes (dont beaucoup de politiciens) veulent rejeter la faute sur les traders et les spéculateurs. Beaucoup de gens accusent l’OPEP d’en être responsable. La liste des coupables n’en finit pas.

– Le fait est qu’il n’y a pas une seule raison pour que les Etats-Unis — et avec eux tous les pays développés — soient en pleine catastrophe énergétique ; c’est le fruit de toutes ces raisons et de biens d’autres encore. C’est l’apothéose de nombreuses années d’une mauvaise politique énergétique, de plans à courts termes (si l’on peut appeler ça des plans) et d’une overdose d’arrogance telle que seuls les superpouvoirs peuvent avoir.

– C’est comme une équipe de football qui dirait : "nous sommes n°1 et nous le serons toujours". L’équipe cesse donc de s’entraîner. Les joueurs ne font plus d’exercice et ne viennent plus à l’entraînement. Les entraîneurs se détendent et oublient de recruter et de chercher de nouveaux talents. Personne n’élabore de nouvelles stratégies ou ne prend la peine d’observer les adversaires pour voir où ils en sont. Et l’équipe s’attend pourtant à ramener un trophée chaque année. "Hé, on le mérite, pas vrai ?"

– Ou bien voyons à l’analogie du Titanic. Le bateau était une véritable oeuvre d’art. Il n’était pas "censé" pouvoir couler. Mais maintenant que l’eau envahit le bateau et que celui-ci s’enfonce de plus en plus dans la mer, ils se prennent de l’eau froide en pleine figure. Les législateurs tentent désespérément de boucher les trous dans la coque, mais ça ne fonctionne pas. Les gens intelligents (ou les plus chanceux) sont déjà dans les canots de sauvetage.

– Seul le temps nous dira si les Etats-Unis peuvent passer à la phase d’acceptation. Mais en attendant, les matières premières vont continuer de chuter.

– Pendant cette période, il va y avoir des opportunités incroyables pour les investisseurs. Et ces opportunités vont se faire de plus en plus nombreuses, comme à chaque fois que des décisions stupides sont prises.

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