La Chronique Agora

La Chine et l'or : une histoire d'amour qui ne fait que commencer

Par Isabelle Mouilleseaux (*)

Deux facteurs haussiers se sont conjugués ces derniers jours pour le métal jaune :

Les investisseurs sont toujours là
Tout d’abord, la demande d’or d’investissement sur le premier trimestre 2009 ne faiblit pas. Selon le Conseil mondial de l’or, l’encours d’or des ETF aurait encore grimpé de plus de 450 tonnes sur le dernier trimestre. La tendance fortement haussière constatée en 2008 se poursuit alors qu’on s’attendait à un tassement.

La Chine achète de l’or
Voilà qui met les marchés en effervescence. La semaine dernière, des rumeurs en provenance de Chine avaient fait grimper le cours, rumeurs confirmées hier par les autorités chinoises. La Chine, qui avait quelque 600 tonnes d’or en réserve, aurait acheté pour 454 tonnes d’or supplémentaires, puisqu’elle vient de déclarer en détenir aujourd’hui 1 054 tonnes. C’est une hausse de 76%.

Tout est relatif
1 054 tonnes, cela peu vous paraître beaucoup. C’est plus que la Banque nationale suisse qui en détient 1 040 tonnes. 1 054 tonnes d’or, c’est 31 milliards de dollars… Que sont 31 milliards en comparaison des 1 950 milliards de dollars de réserves de change de la Chine ? Une goutte d’eau…

Une hausse de 454 tonnes, c’est aussi l’équivalent de l’or que veut vendre le FMI dans les années à venir. Vous savez ? Ces ventes que les marchés craignent tant…

La marge de progression est impressionnante
La Chine passe ainsi du neuvième au cinquième rang mondial en termes de détention d’or. Belle progression. Mais restons objectifs.

La part de ses réserves de change détenue en or ne représente que 1,6% de ses réserves totales, contre presque 80% pour les Etats-Unis, 70% pour la France et l’Allemagne. La marge de progression, même infime, sera impressionnante.

Si la Chine ne voulait convertir que 5% de ses réserves — actuellement détenues en dollars — en or, il lui faudrait acheter 2 500 tonnes de métal jaune, soit l’équivalent d’un an de production minière ! Que sont les 400 tonnes du FMI en comparaison…

Et s’il n’y avait que la Chine… les pays du Moyen-Orient diversifient eux aussi leurs réserves. Ils ne sont probablement pas les seuls.

La Chine, premier producteur d’or mondial
Si la Chine doit accroître ses réserves d’or, elle évitera à mon avis autant que possible de passer par le marché international.

L’empire du Milieu est le plus gros producteur mondial d’or, devant l’Afrique du Sud. Il se procurera de l’or en achetant en priorité celui produit localement. Pour ne pas bouleverser le marché, la Chine peut aussi recourir à des transactions de gré à gré. L’or du FMI serait alors une bonne cible.

C’est peut-être pour cela que l’or s’est replié sous les 900 $, une fois passé l’impact des rumeurs.
[NDLR : Ce repli est sans doute une bonne opportunité d’achat alors que l’or se prépare à une envolée séculaire… Pour savoir pourquoi, mais aussi quand et surtout comment vous positionner, suivez les experts !]

Une question me tourmente tout de même
Et si les achats d’or de la Chine se faisaient au détriment des achats de T-Bonds américains ?

Les premières semaines de l’année, la Chine a acheté nettement moins d’obligations d’Etat qu’à l’accoutumée. Les Etats-Unis sont-ils confrontés à un changement de stratégie de leur principal bailleur de fonds ?

L’annonce surprise de la Fed de racheter pour 300 milliards d’obligations d’Etat à deux ans ne serait-elle finalement qu’une conséquence de ce mouvement ? Les Américains seraient ainsi obligés de racheter la propre dette qu’ils émettent, faute de motivation suffisante de l’habituel preneur ?

Il y a peut-être là une tendance nouvelle…

Je t’aime moi non plus
Il faut être un peu schizophrène pour comprendre la Chine. Elle aimerait tant se détacher du dollar ; et ne se prive d’ailleurs pas de le montrer, à grand renfort d’annonces et de coups d’éclats. J’y reviendrai — mais se détacher du dollar, c’est le précipiter à sa perte…

Or la Chine n’a clairement pas intérêt à précipiter le dollar dans les abîmes. Parce qu’elle en dépend, que la planète entière en dépend et que cela se traduirait pour elle par des pertes phénoménales.

Sa marge de manoeuvre, pour l’instant, reste donc très étroite.

Meilleures salutations,

Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora

(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières & Devises (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.

L’Edito Matières Premières & Devises est bien plus qu’une chronique quotidienne. C’est un pôle d’activités centré sur les matières premières qui vous donne les moyens de suivre et de maîtriser ces marchés ! Vous pouvez recevoir gratuitement l’Edito Matières Premières & Devises en cliquant ici.

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