La Chronique Agora

Jubilé ou Big Reset, quelle sortie pour la crise de la dette ?

▪ Il devient chaque jour un peu plus clair pour de plus en plus de monde que la création monétaire n’a résolu aucun des problèmes qui existaient avant la crise. Les dettes gonflent aux Etats-Unis (où le déficit commercial est en moyenne de 500 milliards de dollars par an), en Europe, au Japon et même en Chine. Ce ne sont pas des dettes de même nature mais ce sont toujours des mauvaises dettes.

Une bonne dette est celle qui sera remboursée un jour, une mauvaise dette est celle qui ne sera pas remboursée.

Qu’est-ce qui distingue une bonne dette d’une mauvaise dette, me direz-vous ? Et bien pour cela, il faut vous glisser dans la peau du prêteur. Une bonne dette est celle qui sera remboursée un jour, une mauvaise dette est celle qui ne sera pas remboursée.

Tant que les intérêts tombent, les prêteurs ne se soucient pas trop de savoir si le principal leur sera vraiment remboursé un jour ; les démocraties étant réputées immortelles, le principal ne pourrait être remboursé qu’aux Calendes grecques ou bien lorsque les poules auront des dents. C’est ainsi que vous lisez dans Le Monde sous la plume de l’économiste Pierre Le Masne des phrases telles que "si on admet que les dettes doivent un jour être remboursées (ce qui peut dans certains cas se discuter)"…

Evidemment, la plupart des économistes ont une fâcheuse tendance à mépriser les individus. Ils voient d’abord l’économie comme une sorte de grosse machine et se considèrent comme des ingénieurs avec des cadrans, des leviers et des boutons de contrôle. Ils oublient qu’au bout de la dette, il y a des vrais gens, comme vous et moi. Ils ne voient pas le problème qui s’appelle le service de la dette. Le service de la dette, ce sont les versements des intérêts, ce qui doit être vraiment payé avec nos impôts. Tant que le service de la dette est assurée, elle est réputée bonne ; manquer au service de la dette est impensable car tous les prêteurs arrêteraient immédiatement de prêter.

Devenir trader sur le marché des devises ?
Difficile… long… coûteux…
… Sauf si vous pouvez répliquer à l’identique les trades d’un spécialiste qui vit du Forex depuis des années !

Comment ça ? Eh bien… tout est là. N’attendez plus !

Supposons que le taux d’intérêt soit de 1% et la dette de 100 : les contribuables doivent payer 1 pour servir la dette. Maintenant, si la dette double, pour que le service de la dette reste supportable, il faut diviser les taux par deux, qu’ils passent à 0,5%. Vous comprenez mieux pourquoi les banques centrales veulent des taux bas et complètent tant qu’elles le peuvent avec un peu de création monétaire. Si les taux revenaient dans une "norme historique" — 5% à 6% — le service de la dette serait insupportable pour les Etats surendettés. En effet, ces Etats sont peuplés d’un nombre limité d’individus qui eux-mêmes ont une durée de vie limitée. Il faudrait alors que les banques centrales déclarent que les taux d’intérêt sont nuls pour l’éternité et/ou qu’elles impriment des tombereaux de papier monnaie. En gros, l’hyperinflation…

▪ Le monde merveilleux qui naîtrait d’un grand jubilé
Les Hébreux — qui ne s’interdisaient pas le crédit — avaient un moyen efficace de combattre les bulles de surendettement : la pratique du jubilé. Tous les cinquante ans, les compteurs étaient remis à zéro et les dettes remises. Vous imaginez que dans ces conditions, un an avant la date du jubilé, le crédit se faisait rare et cher. La dette trouvait ainsi sa limite.

Certains esprits angéliques — pour lesquels changer les règles du jeu en fin de partie n’est pas un problème — caressent aujourd’hui l’idée d’un grand jubilé. Puisque tout le monde doit à tout le monde, il suffit de déchirer les dettes et "youpi-tralalala-dansons-autour-d’un-feu-de-joie, tous-citoyens-du-monde-unis-dans-la-même-foi-en-un-avenir-désormais-radieux".

Les dettes ne sont pas un jeu à somme nulle.

J’ai cependant le funeste sentiment que cela ne se passera pas exactement comme cela. Tout simplement parce que les dettes ne sont pas un jeu à somme nulle. Madame Smith ne doit pas 100 $ à madame Tchang qui doit 100 $ à madame Schultz qui doit 100 $ à madame Smith. Il va falloir déchanter, nous vivons dans un monde cruel. D’une façon générale, les riches doivent de l’argent aux pauvres, ce qui me paraît dangereux. C’est déjà dur d’être pauvre mais si en plus on se fait plumer…

La Chine détient 4 000 milliards de dollars de bons du Trésor, plus de 20% de la dette américaine. Même si les Etats-Unis impriment moins de dollars, tout dollar imprimé est un dollar de trop qui dévalorise ce stock.

▪ The Big Reset, la grande remise à zéro, ne se passera pas bien pour les riches
C’est pour cela que la crise monétaire couve et qu’elle débouchera sur une remise à plat du système monétaire actuel. En 2009, le gouverneur de la Banque centrale chinoise déclarait souhaiter un nouveau système mondial de réserve monétaire. Fin 2013, la Chine appelait à la "dédollarisation". Au forum économique de Davos, Christine Lagarde évoque un "reset monétaire" — le Big Reset décrit par l’entrepreneur et investisseur Willem Middelkoop dans son livre War on Gold and the Financial Endgame ["La Guerre contre l’or et la ‘fin de partie’ financière", ndlr.]

La Chine pense que l’or a un rôle à jouer, cela devient de plus en plus évident.

Dans cette remise à zéro, la Chine pense que l’or a un rôle à jouer, cela devient de plus en plus évident. L’année 2013 fut une année d’achat d’or physique record pour la Chine qui passe devant l’Inde. Récemment, The Wall Street Journal nous apprenait que la Banque chinoise ICBC — par l’intermédiaire de la banque sud-africaine Standard Bank qu’elle contrôle — souhaitait prendre la place de Deutsche Bank dans la procédure du fixing des cours de Londres, actuellement tenu par cinq banques et sous enquête des autorités pour cause de soupçon de manipulation.

Lorsqu’un banquier central décidera que le moment du Big Reset sera venu, il faudra qu’il puisse montrer que la nouvelle monnaie mondiale d’échange qu’il propose est adossée à quelque chose de sérieux, quelque chose d’autre que de la dette garantie par une population vieillissante dont la productivité baisse, quelque chose comme l’or ou l’argent. Oui, l’or est inutile et c’est justement sa principale qualité monétaire. Imaginez une monnaie adossée à des "réserves de change" en pétrole, en blé ou en bétail… Il vaut mieux que la spéculation se fasse sur l’or. Pour vous préparer au Big Reset, achetez de l’or surtout quand les cours sont bas, comme les Chinois !

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