La Chronique Agora

Investissez au Japon !

** Les journaux sont pleins d’inflation. En France, Libération annonce que les prix de l’alimentation ont décollé en Europe — avec des hausses de près de 50% ces six derniers mois. C’est sans doute dû en partie au prix de l’énergie.

* Les prix de l’énergie se transmettent à tout — et en particulier à la nourriture, pour laquelle le terrain doit être labouré, planté et récolté avec des tracteurs consommateurs de carburant… Ensuite, les tomates cultivées dans le sud de l’Espagne doivent être transportées jusqu’en Europe du Nord… puis réfrigérées… et vendues dans des magasins consommateurs d’électricité, dont les clients arrivent dans des voitures consommatrices d’énergie pour les acheter.

* Mais des pays producteurs de pétrole on apprend que l’inflation frappe dur, là aussi. En Arabie Saoudite, par exemple, l’inflation des prix à la consommation a été proche de zéro durant dix ans… mais dépasse à présent les 6% et continue de grimper.

* "Le boom pétrolier montre son côté obscur", titre le International Herald Tribune. Le côté obscur en question, c’est que les exportateurs de pétrole ne font pas que vendre l’or noir… ils l’utilisent également. Et alors que les cheikhs et les sultans ont de quoi chauffer leurs palais, le citoyen lambda gèle dehors.

* "A présent, nous devons choisir : manger ou avoir chaud", déclare Abdul Rahman Abdul Raheem.

** Aux Etats-Unis, l’inflation a été prescrite par le médecin. Les charlatans qui gèrent la politique monétaire américaine ont ordonné de l’inflation comme antidote à la déflation. Mieux vaut laisser la température grimper que le patient mourir, disent-ils.

* La mort qui les effraie tant, c’est celle dont l’économie japonaise a souffert après 1989. C’était comme si on avait mis la tête de l’économie nipponne sous l’eau… et oublié de l’en retirer. L’économie s’est noyée. Même maintenant, 18 ans après que le Nikkei a chuté, le pauvre recrache de l’écume.

* Cela nous met d’humeur utile. Voici une suggestion : achetez le Japon. Est-ce que nous vous l’avons déjà conseillé ? Nous ne nous en souvenons plus.

* Voici l’histoire en deux mots : alors que le crédit et la spéculation croissaient et se multipliaient en Occident, entre le milieu des années 90 et 2007, les Japonais luttaient pour se relever. A chaque essai, ils retombaient. Le Nikkei Dow, qui avait atteint les 39 000, remonta jusqu’aux 12 000 – 15 000 points. Chaque fois que les choses semblaient s’arranger… paf, il rechutait.

* Les derniers coups durs sont arrivés en 2007. Après avoir été mis à mal durant 17 ans, enfin, on aurait dit que la Japan, Inc. avait rouvert boutique. Puis arrivèrent les subprime et la crise du crédit mondiale. Le Japon n’avait pas de dettes subprime. Ses banques, ses investisseurs, ses consommateurs et ses hommes d’affaires étaient devenus prudents et conservateurs, au fil des ans. Aux Etats-Unis, on pense que le ralentissement est temporaire. Quasiment tout le monde pense que ce sera terminé d’ici juillet. Certains pensent qu’il est déjà terminé — après un recul modeste de la croissance du PIB. Mais au Japon, les gens pensent qu’un ralentissement est permanent. "Ca ne s’arrangera jamais", se disent-ils. "Ca va empirer".

* "Au Japon règne une psychologie opposée [à celle des Etats-Unis]", écrit Martin Hutchinson. "Le Japon a connu une récession profonde durant 13 ans après que sa bulle a éclaté en 1990, si bien que les traders et les analystes se sont habitués à ignorer les annonces positives du gouvernement, les considérant comme de la pure propagande. Lorsque la crise des prêts subprime s’est produite en août 2007, tandis que les analystes américains ignoraient le problème, les analystes japonais décidèrent que cela devait être de très très mauvaises nouvelles pour le Japon, même si aucune banque nippone n’était exposée, sinon de manière très mineure, à ce marché".

* Aux Etats-Unis, les investisseurs ignorent les conditions moroses. Au Japon, on surveille des conditions moroses qui n’existent même pas. Si bien que lorsque le credit crunch a atteint les marchés boursiers de la planète, il s’est abattu sur les Japonais comme les kamikaze sur la flotte US. Les grandes sociétés japonaises ont été coulées… et le Nikkei Dow a subi des pertes se montant à plus du double de celles de son cousin américain. La bourse japonaise a enregistré les pires performances, parmi les principales places mondiales, à la suite de la crise des subprime — alors que les Japonais n’avaient pas de dette subprime.

* "Le marché à pris en compte des mauvaises nouvelles qui ne s’étaient pas produites", continue Hutchinson, "et a ignoré les preuves continues de la croissance relativement solide du Japon, et de son inflation négligeable. Même un problème de l’immobilier qui avait poussé les analystes à prévoir un poids considérable pour l’économie japonaise, comme aux Etats-Unis, s’est révélé être le résultat de nouvelles législations plus sévères sur les permis de construire — lequel a causé une baisse de tension qui se termine déjà. Il n’y a pas de problème de prêts subprime — comment serait-ce possible ? Le marché de l’immobilier japonais a enregistré une chute catastrophique au début des années 90 ; les prix des maisons à Tokyo avaient chuté de 70%, dans certains cas, si bien qu’il n’y avait aucune possibilité de pic des prix ou de bulle des prêts dans de telles circonstances".

* "Avec un marché en baisse sévère, une économie toujours solide (la croissance du PIB au quatrième trimestre était de 3,7%, soit le double des prévisions) et des analystes négatifs, le Japon semble être un refuge dans un monde peu confortable. Il y a de fortes probabilités pour qu’il soit à la tête de la hausse à la fin des hostilités actuelles".

* Le flanc droit bat en retraite. Le flanc gauche cède, et le centre ne tient plus. Les conditions sont parfaites, déclarait peu ou prou le général Foch durant la Première guerre mondiale, j’attaque !

* De même, les conditions sont parfaites pour nous au Japon. Les investisseurs étrangers ont abandonné. Les investisseurs nationaux ne sont pas intéressés. Et les actions s’échangent à des prix très bas, la moitié des entreprises cotées se vendant pour moins que le valeur comptable.

* Achetez le Japon. Encore…

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