▪ L’illusion monétaire, c’est comme lorsqu’un prestidigitateur tire des billets de cent dollars d’un chapeau encore vide quelques instants auparavant. En fait, l’illusion monétaire est un vieux concept économique qui a un énorme impact sur les épargnants, les investisseurs et les entrepreneurs.
L’illusion monétaire est un tour de passe-passe — mais pas de ceux qu’on montre au public |
L’illusion monétaire est un tour de passe-passe — mais pas de ceux qu’on montre au public.
C’est une ruse des banques centrales qui peut déformer l’économie et détruire votre richesse.
L’illusion monétaire, c’est la tendance qu’ont les individus à confondre les prix réels et les prix nominaux. Elle se résume au fait que les gens ignorent l’inflation quand ils jugent que c’est mieux pour eux. Les exemples abondent.
Supposons que vous êtes un ingénieur civil qui travaille pour une société de gestion immobilière et gagne 100 000 $ par an. On vous accorde une augmentation de salaire de 2%. Vous gagnez à présent 102 000 $ par an. La plupart des gens diraient que vous êtes plus riche après cette augmentation. Mais si l’inflation est de 3%, votre salaire de 102 000 $ ne vaut en réalité que 98 940 $ en pouvoir d’achat.
LA LISTE NOIRE DE L’INVESTISSEMENT |
Vous avez eu une augmentation de 2 000 $ en termes nominaux mais vous avez en fait subi une réduction de salaire de 1 060 $ en termes réels. La plupart des gens penseraient que vous êtes plus riche du fait de votre augmentation mais en réalité vous êtes plus pauvre parce que vous avez perdu du pouvoir d’achat. La différence entre ce que vous percevez et la réalité est ce qu’on appelle l’illusion monétaire.
L’illusion monétaire n’affecte pas seulement les salaires et les prix. Elle affecte tout flux d’argent, y compris les dividendes et les intérêts. Elle peut aussi affecter la valorisation des actions et des obligations. Si l’on ne veut pas être victime de l’illusion monétaire, il faut ajuster toute hausse nominale à l’inflation.
▪ Un concept qui « n’existe pas » ?
Le concept de l’illusion monétaire comme sujet d’étude et de politique économique n’est pas nouveau. Irving Fisher, l’un des plus célèbres économistes du 20ème siècle, a écrit en 1928 un livre intitulé L’illusion de la monnaie stable. Cette idée d’illusion monétaire remonte à 1730, avec le livre de Richard Cantillon Essai sur la nature du commerce en général — même si Cantillon n’utilise pas exactement ce terme.
Les économistes affirment que l’illusion monétaire n’existe pas. Pour eux, on prend des décisions en se basant sur des « attentes rationnelles ». Cela signifie que lorsque vous percevez l’inflation ou que vous vous y attendez, vous dévaluez la valeur de votre argent et l’investissez ou le dépensez selon sa valeur intrinsèque attendue.
Comme pour une grande partie de l’économie moderne, cette idée fonctionne mieux en théorie que dans le monde réel. Les expériences menées par des comportementalistes montrent que les gens pensent qu’une réduction de 2% de leur salaire avec aucun changement du niveau de prix est « injuste ». Pour autant, ils pensent qu’une augmentation de 2% de leur salaire accompagnée d’une inflation de 4% est « juste ».
En fait, les deux résultats sont identiques du point de vue économique en termes de pouvoir d’achat. Toutefois, le fait que les gens préfèrent une augmentation plutôt qu’une réduction de leur salaire tout en ne tenant pas compte de l’inflation est l’essence même de l’illusion monétaire.
L’importance de l’illusion monétaire va bien au-delà de la théorie et des expériences des sciences sociales |
L’importance de l’illusion monétaire va bien au-delà de la théorie et des expériences des sciences sociales. Les banquiers centraux utilisent l’illusion monétaire pour transférer la richesse des épargnants et investisseurs vers les débiteurs. Ils agissent ainsi lorsqu’il n’y a pas de croissance économique parce qu’il y a trop de dette. Les banquiers centraux tentent d’utiliser l’inflation pour réduire la valeur réelle de la dette et pour donner un peu de marge aux débiteurs dans l’espoir qu’ils pourront dépenser plus et aider ainsi à faire redémarrer l’économie.
Nous verrons la suite mercredi.