La Chronique Agora

Guerre contre le cash : des nouvelles du front

carte bancaire arborant drapeau suédois

La Suède sert de laboratoire dans de nombreux domaines, notamment en matière de société sans cash. Or le vent semble tourner dans le pays…

Entre 2013 et 2017, le montant des espèces en circulation a chuté de 35% en Suède, ce qui a valu à ce pays la réputation de « nation la plus cashless [« sans espèces », ndlr.] au monde ».

La Suède est en avance sur tout. C’est le pays qui à chaque fois va dans le sens des excès maximum : impôts, social-démocratie, immigration, liberté sexuelle, idéologie du genre, etc. Ses erreurs et retours en arrière sont donc intéressants.

Les chiffres de l’Institut royal de technologie de Stockholm montrent que seuls 18% de tous les paiements effectués aujourd’hui en Suède se font en espèces.

Les chiffres de la Fédération suédoise du commerce montrent que les détaillants suédois affirment que 80% de leur commerce provient de paiements par carte.

Ce chiffre sera probablement porté à 90% d’ici à 2020.

L’appétit pour le commerce numérique en Suède est tel que beaucoup prédisaient que le pays pourrait devenir la première société sans numéraire au monde.

Selon le quotidien britannique Daily Mail, une agence gouvernementale suédoise — donc une branche du gouvernement — vient de conseiller à chaque foyer de stocker et d’épargner « des petites coupures » pour faire face aux cas d’urgence comme les interruptions de courant électrique, les problèmes technologiques, le terrorisme, les cyberattaques d’un gouvernement voyou ou la guerre.

Le « sans cash » n’est pas le paradis

La Riksbank, la banque centrale du pays, a appelé la semaine dernière à une enquête sur les risques posés par une future société sans numéraire.

Des responsables ont déclaré au Parlement que les espèces étaient importantes « non seulement en temps de crise et de guerre, mais aussi en temps de paix ».

En décembre, la revue britannique Access to Cash Review avait averti que la Grande-Bretagne risquait également d’être une sorte de « somnambule dans une société sans numéraire », a rapporté le Daily Mail.

Alors que l’âge des taux négatifs s’achève « progressivement », l’enthousiasme suscité par l’inauguration d’un paradis sans argent semble s’estomper.

Les Allemands ont été les premiers défenseurs du cash en Europe ; ils en sont les plus friands. C’est grâce à eux que Mario Draghi n’a pu mettre à exécution son projet scélérat de suppression des grosses coupures en euros.

La Commission européenne a récemment reconnu que l’argent liquide n’est peut-être pas la source de tous les maux.

La décision de la Riksbank de préserver le rôle du cash dans l’économie est un signe qui montre que l’Europe abandonne sa lutte radicale contre les espèces.

Cela semble raisonnable.

Pas de tout ou rien

La modernité n’implique nulle rupture en tout ou rien : elle devrait permettre aux gens de passer aux systèmes de paiement sans numéraire à leur rythme et en fonction de l’utilité que le cash représente pour chacun.

La question n’est pas de s’opposer à la progression des cartes et autres moyens de paiement, elle est de laisser les gens choisir ce qui leur convient sans volonté de les brimer pour des raisons de surveillance ou de prédation de l’Etat.

Que le cash ne représente que 5% ou 10% des trafics de paiement n’a strictement aucune importance en termes de liberté et de choix. Le seul fait qu’il existe et qu’il soit accepté suffit pour justifier sa fonction.

Le cash devrait être la vraie monnaie, celle que l’on garde, conserve, stocke conformément à la loi de Gresham (1) : « la mauvaise monnaie chasse la bonne ».

Ce qui se comprend de la façon suivante : la mauvaise monnaie c’est l’électronique, et elle circule. Pendant ce temps, la bonne monnaie, le cash, est en réserve car on y tient, comme s’agissant de l’or.

Ce qui est conservé, c’est ce qui est bon, ce à quoi on tient, car le service rendu est supérieur.


(1) Loi de Gresham : « la mauvaise monnaie chasse la bonne » est l’expression proverbiale par laquelle est énoncé le théorème d’économie dit loi de Gresham. Celle-ci constate que « lorsque dans un pays circulent deux monnaies dont l’une est considérée par le public comme bonne et l’autre comme mauvaise, la mauvaise monnaie chasse la bonne ».

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile