La Chronique Agora

Le grand test arrive

Goldilocks, obligations, inflation

Les marchés obligataires s’effondrent, tandis que les marchés actions continuent de monter… C’est le signe que la hausse est désormais bien due à un facteur et un seul, qui sera confronté à des tensions inédites durant ces prochains mois.

Selon Bloomberg, le 23 mars dernier :

« Les marchés obligataires mondiaux ont subi des pertes sans précédent depuis leur pic de l’année dernière, alors que les banques centrales, y compris la Réserve fédérale, cherchent à resserrer leur politique pour lutter contre la flambée de l’inflation.

L’indice Bloomberg Global Aggregate, une référence pour les rendements totaux de la dette des gouvernements et des entreprises, a chuté de 11% par rapport à son sommet de janvier 2021. Il s’agit de la plus forte baisse depuis un pic sur des données remontant à 1990, dépassant une baisse de 10,8 % pendant la crise financière, en 2008.

Cela équivaut à une baisse de la valeur marchande de l’indice d’environ 2 600 Mds$, pire que les 2 000 Mds$ en 2008. »

Nous sommes exactement dans la situation inverse de ce pourquoi les marchés sont valorisés, dans l’inverse de Goldilocks. Les marchés sont censés être valorisés pour la perfection, pour l’idéal !

Et pourtant, on reste dans les plus hauts…

Qu’est-ce que cela signifie ?

La seule cause de la hausse

Cela signifie que le scénario Goldilocks n’a jamais été la cause de la lévitation des marchés. Tout simplement puisqu’une cause, c’est « ce qui, supprimé, cesse de produire effet ».

La seule cause de hausse des Bourses c’est donc la surabondance de monnaie, la dépréciation future implicite des monnaies face à tout, je dis bien face à tout.

Les monnaies sont surévaluées, donc elles doivent baisser en regard de tous les prix ; ce qui se formule à l’inverse en disant que tous les prix doivent monter.

Tous les prix doivent monter jusqu’à ce que l’illusion que les Bourses peuvent continuer à progresser se dissipe. Car il n’y a aucune raison organique pour que les Bourses montent face aux excès de liquidités : c’est simplement une croyance qui est ancrée, mais elle peut s’évanouir, il suffit d’une bonne douche glacée !

En clair, le niveau des Bourses repose à la fois sur l’abondance monétaire et la croyance – erronée – que, face à cette abondance monétaire, il est plus intéressant d’avoir des actifs financiers que du cash.

Ce qui vient de se passer sur l’obligataire va peut-être faire douter du bien-fondé de cette croyance. Le TINA va peut-être vaciller. Attendons, nous verrons…

Une chose est sure : en investissement, je n’aurais pas un centime dans les marchés. En spéculation… pas plus d’une pincée.

Un test compliqué par l’inflation

Le grand test arrive, et il est semé d’embûches extraordinaires.

Tout d’abord, ce sera le premier test où l’inflation des prix à la consommation est une préoccupation sérieuse.

A ce stade d’un cycle de bulle étiré, seule la Fed a la capacité d’opérer comme « acheteur de dernier recours ». Il n’y aura aucun véritable investisseur, tout est trop cher et tout le monde le sait.

En cas de fuite devant le risque et de besoin de désendettement, il n’y aura donc personne en face, pas de contrepartie.

Avec la puissante mécanique inflationniste actuelle sur les prix à la consommation et à la production, les salaires et les marchés mondiaux de l’énergie, de l’alimentation et des matières premières, les taux sont vulnérables. Il n’est pas acquis que l’on puisse en conserver le contrôle.

Ce test s’accompagne d’un contexte géopolitique à haut risque, contrairement à tout ce qui a été expérimenté lors dans le passé.

Il est important de noter que la confluence des conflits mondiaux, des insécurités financières et économiques, des manies et des bulles de marché, et de la flambée de l’inflation et des prix des matières premières n’est pas une coïncidence.

Vous connaissez mon cadre analytique : il n’est de vérité que tout. Tout est lié, ce qui signifie que tous ces symptômes sont des manifestations de la crise endogène du système, laquelle n’a pas été traitée en 2008 et 2009. Ce sont toutes des manifestations de décennies d’inflation croissante du crédit et de désordre monétaire qui en a résulté.

Nous sommes dans une résurgence de la crise systémique qui a menacé de tout engouffrer lors de l’épisode des subprime.

Les arrangements qui ont permis de « kick the can » à cette époque ont, une nouvelle fois, trouvé leurs limites.

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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