Le grand cirque de l’endettement continue d’enchaîner les numéros tous plus impressionnants les uns que les autres… et nous n’en sommes qu’au début du spectacle !
Nous avons récemment organisé une discussion en direct avec nos lecteurs américains. Notre directeur de l’investissement l’avait lancée sur le sujet de ce qu’il arrivera à l’or quand la bulle de la dette éclatera.
Les commentaires des lecteurs ont été impressionnants. Réfléchis. Intelligents. Nous arrivions à peine à suivre le rythme.
Mais chaque commentaire nous pousse à nous interroger encore plus… De quelle façon ce cirque incroyable va-t-il se terminer ? Quel sera le grand final ?
Restructuration, dévaluation, inflation ou défaut de paiement ?
Selon Brian Hirschmann, de Hirschmann Capital :
« Depuis 1800, sur 52 pays dont la dette publique brute était supérieure à 130%, 51 ont fait défaut, que ce soit via la restructuration, la dévaluation, une inflation élevée ou un défaut de paiement pur et simple. »
La dette souveraine américaine a grimpé à 130% du PIB, en 2020. Depuis, elle a légèrement diminué. Mais elle ne devrait pas tarder à regrimper à 130% puis à 140%. Et ensuite ?
Hier, nous nous sommes quittés sur un petit calcul tout simple, et nous avons découvert qu’il était impossible de refinancer l’énorme dette de l’Amérique avec des taux d’intérêt se rapprochant de la normalité.
Juste pour se remémorer les chiffres, nous avions considéré que 3% correspondrait à un taux d’intérêt « réel » (après inflation) normal. Avec un taux d’inflation de 7%, cela signifiait un taux nominal d’environ 10%.
Est-il possible de refinancer la dette américaine – qui s’élève à 86 000 Mds$ – en appliquant un taux de 10% ? Non. Ce n’est pas possible : cela voudrait dire que le service de la dette représenterait un tiers du PIB.
Visions nocturnes
Jerome Powell doit avoir un sommeil agité, la nuit… il est peut-être assailli de furieuses visions où s’agitent des clowns déments et des lions affamés.
Il doit sûrement se sentir responsable de ce qu’est devenu le « capitalisme » américain. Ses taux d’intérêt ultra bas ont enrichi les riches plus que jamais. Mais ils ont également déformé l’économie tout entière, et incité les entreprises, les ménages et le gouvernement lui-même à emprunter bien plus qu’ils ne l’auraient fait autrement.
Au sein d’une économie honnête, les niveaux de dette s’autorégulent. Plus les gens empruntent, plus les taux d’intérêt augmentent : l’argent facile disparait. Mais pas quand la Fed rachète activement des obligations en faisant baisser les taux d’intérêt, et qu’elle imprime de l’argent.
Et à présent, avec une dette aussi élevée, si la Fed tente de revenir à des taux normaux, tout l’édifice s’écroulera.
Même de légères hausses des taux des Fed Funds ajustés de l’inflation, qui les feraient passer de -6% actuellement à -5%, par exemple, frapperait la Bourse comme une troupe de babouins en fuite.
De Charybde en Scylla
Comme nous l’avons vu à de nombreuses reprises, les Etats-Unis sont piégés, pris entre le marteau d’une dette de 86 000 Mds et l’enclume de la hausse des taux d’intérêt.
Scylla personnifie la nécessité de « normaliser » et de gérer les dettes avant qu’elles ne s’aggravent. Mais Charybde personnifie l’establishment de l’élite, qui perdrait 35 000 Mds$ et n’en a aucune envie.
Autrement dit, comme Hardy le disait à Laurel : « Tu nous a encore mis dans un joli pétrin… »
Alors que pourrait-il arriver ? De quoi devez-vous vous méfier ?
M. Hirschmann a énuméré ces possibilités : la restructuration, la dévaluation, l’hyperinflation ou le défaut de paiement pur et simple.
Mais attendez. Peut-être seront-ils inutiles.
Ici, à la Chronique, nous n’excluons rien. Un dieu généreux ou espiègle pourrait être indulgent avec M. Powell. Peut-être que l’inflation des prix à la consommation battra en retraite… sans qu’il soit nécessaire de livrer bataille.
Selon Bloomberg :
« [La secrétaire au Trésor américain Janet] Yellen a déclaré qu’elle surveillerait de près les chiffres de l’inflation d’un mois sur l’autre, car ils révèlent mieux si la pression sur les prix se résorbe.
Suivant cet indicateur, elle pense que l’inflation baissera au deuxième semestre 2022, et qu’elle atteindra ‘des niveaux d’environ 2% à 2,5% d’ici la fin de l’année’ ».
L’économie n’est pas en plein essor… De nouveaux rhumes ou nouvelles grippes peuvent toujours faire paniquer le public, et un sell-off de marché et/ou une récession devraient arriver tôt ou tard.
Alors oui, peut-être que les chiffres de l’inflation vont baisser… et donner plus « d’espace budgétaire » à ceux qui impriment de l’argent.
Mais ensuite, que feront-ils ?
Le plus grand spectacle sur Terre
Ils le rempliront, cet espace… comme on remplit un placard vide : bientôt, il sera bourré de plans de stimulus, de projets ruineux et de renflouements.
Hirschmann poursuit ainsi :
« Si les banques centrales pouvaient toujours maintenir des taux bas, aucun gouvernement ne ferait jamais défaut. Pourtant, rien qu’en 2020, l’Argentine, l’Equateur et le Liban ont fait défaut, malgré tous les efforts de leurs banques centrales.
Les banques centrales des pays riches ont également été souvent submergées (la grande inflation de 1965-1982 aux Etats-Unis, le sauvetage du Royaume-Uni par le FMI en 1976, la crise de 2008-2011 en Islande et le krach lié à l’abandon du peg du franc suisse en 2015).
Pire encore, les dettes des gouvernements atteignent de dangereux niveaux, actuellement, dans d’autres économies majeures comme le Brésil, la Chine, le Japon, le Royaume-Uni et la zone euro. De plus, la Banque du Japon et la Banque centrale européenne, entre autres banques centrales, réalisent des carry trades téméraires semblables à ceux de la Fed.
Par conséquent, une crise de la dette souveraine survenant dans un pays pourrait facilement déclencher une crise de la dette souveraine mondiale capable de faire éclater les bulles en Chine et sur les marchés actions et immobiliers aux Etats-Unis. »
Inflation ? Déflation ? Krach ? Contraction ? Explosion ? Implosion ? Dépression ? Dévaluation ? De nouvelles monnaies ?
Oui, que la fête commence ! Avec des éléphants, des monstres, un numéro de haute voltige !
Tout cela va arriver : le plus grand spectacle sur Terre.
Mais regardez-le de loin, surtout.
Conservez bien une distance de sécurité !