L’attitude de la France sur les gaz de schiste me fait penser aux personnes qui sont restées au creux de leur lit le 21 juillet 1969 à 3h56 du matin… jour où l’homme a mis le pied sur la lune. Vous savez que c’est un moment historique, mais « vous comprenez, demain, j’ai une réunion importante, un déjeuner de prévu, des courses à faire »…
La situation sur les gaz de schiste est similaire. Les principaux pays exploitant ce gaz sont à l’origine d’une révolution énergétique qui est en train de se muer en révolution géopolitique. L’indépendance en gaz à laquelle les Etats-Unis sont promis va réduire leurs importations de gaz des pays du Golfe et d’Afrique.
La France, elle, reste les bras croisés. Ce n’est pas tant son refus d’exploiter ses ressources qui est inquiétant que son refus même de les connaître. Depuis juillet 2011, il est interdit d’utiliser la fracturation hydraulique, seule technique pour l’instant efficace pour évaluer ces ressources. Les arguments environnementaux contre le gaz de schiste sont compréhensibles. Mais il est difficile de justifier l’interdiction d’évaluer les ressources de la France dans une approche scientifique.
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L’Etat — qui sait que si économiquement le gaz de schiste est intéressant, il serait désastreux politiquement — est en train de contourner le problème. C’était tout l’objet de la première audience publique de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) qui s’est tenue le 18 avril dernier.
▪ OPECST cherche technologie désespérément
L’objet de cette réunion était principalement de déterminer quelles sont les alternatives possibles à la fracturation hydraulique. L’Usine Nouvelle est revenue sur les différentes techniques proposées. Voici les principales :
– La stimulation au propane pur
Il s’agit de remplacer l’eau et les produits chimiques injectés dans le puits par un mélange de propane et de proppant (sable et céramique), ce qui permet de réduire l’usage en eau de la fracturation hydraulique.
– La fracturation électrique
La fissure de la roche qui permet de libérer le gaz est effectuée par une décharge électrique. Mais comme l’a reconnu Bruno Courme, directeur de la filiale Total Gas Shale Europe, la technique « ne nous semble pas efficiente ».
A côté, deux techniques de fracturation ont été abordées, la fracturation par explosion et la fracturation par approche thermique. Ces techniques restent au stade expérimental. D’ailleurs, il n’est pas sûr qu’une technique basée sur « l’explosion » ravisse les mouvements écologiques…
L’objet de la réunion avait cependant un intérêt, celui de réinstaller le débat. Pris de court par les mouvements des écologistes dans l’information sur ces gaz, le gouvernement a dû imposer en catastrophe un moratoire sur la fracturation hydraulique, avant même qu’un réel débat scientifique ait lieu. L’opinion est alors devenue radicalement opposée aux gaz de schiste.
Toutefois depuis 2011, les mentalités ont évolué. Selon un sondage IFOP, 80% des personnes interrogées qui ont pris connaissance du débat sur le gaz de schiste sont favorables à l’expérimentation de technologies alternatives. A noter que le sondage a été commandé par la société ecorpStim, une filiale française du groupe américain eCORP, à la pointe de la technologie au propane pur. Un espoir d’avancée est donc visible, mais à long terme.
Pour profiter de l’émergence du marché du gaz de schiste, deux solutions s’offrent donc à vous. Soit vous attendez qu’ecorpStim prenne son essor en France et soit cotée à la bourse de Paris, soit vous regardez ailleurs. La deuxième solution m’apparaît plus sure.
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▪ Une scène européenne divisée
Sans tomber dans l’interdiction totale, la France n’est pas le seul pays à prendre ses précautions avec le gaz de schiste. Seuls l’Angleterre et la Pologne se sont lancées réellement dans l’exploitation du gaz de schiste. Les autres pays réservent encore leur décision.
Si les réserves polonaises se sont révélées bien plus faibles que prévues, les réserves anglaises devraient à l’inverse être revues à la hausse selon le BGS (British Geological Survey). Un récent article du Financial Times révélait même que le gouvernement britannique envisageait de lier les contrats d’exploitation à des offres d’infrastructures au niveau local, dans le plus pur style chinois en Afrique.
Pour être en pole position sur le marché européen des gaz de schiste, l’Angleterre est l’acteur privilégié. Les compagnies Igas Energy ou BG Group font parties des candidats à l’exploitation.
Toutefois ces groupes n’ont pas commencé à produire du gaz, et en sont encore à la phase d’exploration. Pour l’instant, un seul pays représente une réelle opportunité d’investissement dans les shale gas, les Etats-Unis.
▪ Mon conseil : restez protégé aux Etats-Unis
L’industrie des gaz de schiste aux Etats-Unis connaît actuellement un regain de forme. La cause est simple, les prix remontent. Le prix du million de BTU (british thermal units) est remonté au-dessus des 4 $, après être passé brièvement sous les 2 $ en avril 2012. Si ce niveau est largement soutenable pour les industriels qui consomment du gaz, comme les sidérurgistes, les usines chimiques ou les producteurs d’engrais, il l’est surtout davantage pour les producteurs de gaz. Pour preuve, le grand producteur de gaz non-conventionnel Chesapeake Energy est en hausse de 15% sur l’année.
Vous l’avez compris, c’est aujourd’hui le moment de jeter un oeil outre-Atlantique. Avec le retour de la croissance, même faible, et un retour des prix du gaz à des niveaux soutenables, les producteurs de gaz américain connaissent une nouvelle jeunesse.