La Chronique Agora

La Fed devient faussaire pour éviter une crise du dollar

▪ Si je vous disais que j’ai 1 600 milliards de dollars en dépôt dans une banque du coin, vous penseriez que je ne fais pas simplement partie des 1% les plus riches, mais des 1% des 1% les plus riches (vous pouvez imaginer la jalousie dévorante des 99% autres qui font partie des 1%…).

Mais si ensuite je mentionnais que — oh, au fait, j’allais oublier — je dois 1 600 milliards de dollars à certaines personnes, vous vous rendriez compte que j’appartiens probablement aux plus basses cohortes des 99%, plutôt qu’au plus haut échelon des 1%. Autrement dit, vous vous rendriez compte que je ne suis pas super-riche mais super-pauvre.

Mais si par la suite je vous disais : « hé ! Ne me plaignez pas. Je peux imprimer autant d’argent que je veux. En fait, les 1 600 milliards que je possède à la banque c’est de l’argent que j’ai moi-même imprimé pour mon propre usage ».

A ce stade, vous ne sauriez plus si je relève des 1% ou des 99% ; tout ce dont vous seriez certain, c’est que je relève de la prison. Et vous auriez raison… jusqu’à ce que vous réalisiez que même si la contrefaçon est un toujours un crime, elle n’est pas toujours illégale.

▪ Lorsque les faussaires portent des costumes à fines rayures, sont diplômés des plus grandes écoles du pays, tiennent les cordons de la bourse du gouvernement et conduisent leurs opérations de contrefaçon au sein d’infrastructures approuvées par l’Etat tel l’Hôtel des Monnaies à Philadelphie, la contrefaçon n’est pas simplement légale, elle est financièrement raffinée… du moins c’est ce qu’on nous dit.

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Trois mesures à mettre en place avant la dégradation de la France
Tous les critères sont en place pour la perte du « Triple A » des obligations françaises… et si cela se produisait, des millions d’épargnants français verraient leur argent partir en fumée.

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Ce processus est appelé quantitative easing (ou QE, ou assouplissement quantitatif)… et il n’est pas nouveau. Aujourd’hui, quasiment tous les investisseurs de la planète ont entendu parler de ce processus et comprennent — plus ou moins — ce dont il s’agit. C’est de la contrefaçon, plus ou moins. La Réserve fédérale imprime des dollars et les utilise pour acheter des titres adossés à des créances hypothécaires et/ou des bons du Trésor US. Au dernier comptage, la Fed possédait pour une valeur de plus de 1 600 milliards de dollars de bons du Trésor US.

Depuis fin 2008, la Réserve fédérale achète des titres de créances hypothécaires et des bons du Trésor avec les dollars qu’elle imprime précisément à cet effet. Même si les chiffres sont flous, la Fed reconnaît avoir acheté au moins 1 200 milliards de dollars de bons dans le cadre de ses programmes de QE annoncés publiquement. Toutefois, de façon quelque peu mystérieuse, le bilan de la Fed a augmenté de 2 200 milliards de dollars au cours des trois années qu’ont duré les opérations de QE.

Alors, c’est 1 200 milliards ou bien 2 200 milliards ? Qu’importe… Que sont mille milliards de dollars supplémentaires ici ou là ?

Malgré cette opération de contrefaçon déclarée et manifeste, la Réserve fédérale arrive encore à garder un semblant de légitimité. De façon encore plus énigmatique, le dollar US arrive encore à garder un semblant de force et de respectabilité.

▪ Ainsi, le dollar n’a pas perdu de valeur par rapport à l’euro au cours des trois dernières années. Mais ce n’est sans doute que parce que le dollar et l’euro perdent tous deux de la valeur à peu près au même rythme. Lorsqu’on le compare à l’or ou à toute autre forme de monnaie non-gouvernementale, le dollar a effectivement perdu de la valeur durant les trois dernières années… beaucoup de valeur.

Néanmoins, il n’y a pas de « crise du dollar » évidente comme il y a une crise de l’euro — très évidente. Mais laissons le temps au temps, cher lecteur.

« Au cours de l’année dernière », rapporte le site CNSNews.com, « alors que la Réserve fédérale a massivement augmenté ses détentions de bons du Trésor US — et que des organismes en Chine ont légèrement diminué les leurs — la Fed a dépassé les Chinois en tant que principal détenteur de la dette américaine »…

Grâce à l’assouplissement quantitatif, la valeur des bons du Trésor US détenus par la Fed a grimpé à 1 660 milliards de dollars, ce qui dépasse de loin les 1 150 milliards de dollars de bons détenus par les Chinois.

« A la fin du mois de septembre 2010 », explique CNSNews, « les Chinois possédaient environ 340 milliards de dollars en bons du Trésor de plus que la Fed. Mais fin septembre 2011, la Fed possédait environ 517 milliards de dollars de plus en bons du Trésor que les Chinois ».

La frénésie d’achats de bons du Trésor de la Fed ne présage pas nécessairement de la fin imminente du dollar mais elle suggère au moins la possibilité d’une fin. La contrefaçon à grande échelle n’améliore guère la valeur d’une monnaie.

Les achats de bons du Trésor US par la Fed peuvent sembler identiques à ceux effectués par la Chine… tout comme une fausse pièce de monnaie peut ressembler à une vraie. En réalité, ces achats ne pourraient être plus différents.

Les Chinois achètent des bons du Trésor avec des dollars qu’ils ont gagnés grâce au commerce. La Fed achète des bons du Trésor avec des dollars qu’elle a créés à partir de papier et d’encre. Sur le long terme, le commerce est une source de capital qui a beaucoup plus de valeur qu’une rotative. En général, le commerce nourrit la création de richesse ; en général, une planche à billets nourrit la destruction de richesse.

Néanmoins, la tentation d’imprimer de l’argent est absolument irrésistible pour un gouvernement en détresse. C’est si facile… et si « indolore ». Ben Bernanke a fait apparaître 1 200 milliards de dollars (au moins) au cours des trois dernières années sans même verser une goutte de sueur. Il est intéressant de comparer ce processus avec l’échec retentissant de la « super-commission » à trouver 1 200 milliards de dollars de réductions des déficits via les processus difficiles, « à l’ancienne », de réduction des dépenses et d’augmentation des impôts.

La contrefaçon est plus facile que l’austérité… tout comme la fraude est plus facile qu’un travail harassant. Mais puisque le président de la Réserve Fédérale et les autres dirigeants de l’économie américaine ont peu d’attrait pour l’austérité et le travail qui construisent la richesse nationale, ils ont adopté des raccourcis faciles vers la « prospérité ».

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