La Chronique Agora

S’expatrier pour la retraite : attention aux chausse-trappes (1/2)

La retraite peut être l’occasion de voyager à l’étranger… Mais pourquoi pas aller y habiter ? Attention toutefois : mieux vaut se poser quelques questions plutôt que de partir sur un coup de tête !

La moitié des Français rêverait de s’installer à l’étranger pour la retraite, selon une enquête réalisée par Babbel en 2019. Un désir qui atteint même 64% des 18-25 ans, alors qu’il n’est que de 31% chez les seniors de 65 ans. Mais une telle décision ne doit pas se prendre à la légère. Petite revue des sujets qui peuvent vite s’avérer problématiques faute d’avoir été anticipés.

Prendre du bon temps et faire des économies

Mais avant cela, dressons un portrait de ces retraités partis couler des jours heureux dans un autre pays. Selon les derniers chiffres de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), ils seraient plus d’un million, répartis essentiellement en Europe (52,4 %) et en Afrique (41,5 %).

Bien évidemment, il y a parmi eux des Français issus de l’immigration retournés « au pays ». Quant à ceux qui n’avaient pas d’attaches particulières à l’étranger, pourquoi sont-ils partis ? Une des raisons souvent évoquées est la recherche du soleil. De fait, les départs se font presqu’exclusivement vers des pays où le climat est doux. Les expatriations vers les pays scandinaves restent rares !

Ceux qui choisissent de s’implanter durablement à l’étranger sont également motivés par l’amélioration de leur pouvoir d’achat. Ils cherchent alors des pays où le coût de la vie est moindre que chez nous et, éventuellement, où l’imposition est plus douce, pour pallier la baisse de leurs revenus à la retraite. Certains pays ont d’ailleurs développé une politique volontariste pour faire venir à eux les retraités européens. C’est le cas du Portugal, de la Grèce et, dans une moindre mesure, du Maroc.

Quelques conseils avant de s’installer définitivement

Avant de quitter la France de manière définitive pour un pays plus clément, tant du point de vue climatique que fiscal, il nous semble qu’il convient de s’arrêter sur quelques sujets sensibles et de se poser les bonnes questions :

Pour ceux qui veulent partir en couple : le projet est-il vraiment partagé par chaque membre du couple ? N’y en a-t-il pas un qui a imposé sa décision à l’autre ?

Partir à contrecœur pour faire plaisir à l’autre peut vite conduire à l’échec de l’expatriation (retour en France, voire divorce).

Suis-je prêt à ne plus voir mes enfants et mes petits-enfants aussi souvent qu’avant ? Les sorties et les repas avec des amis ne vont-ils pas me manquer ?

L’éloignement de la famille et des amis est souvent un frein au départ. Il peut aussi être difficile à vivre une fois que l’on a déménagé, même avec les moyens de communication d’aujourd’hui.

Suis-je disposé à accepter la culture et les coutumes du pays d’accueil sans les juger ? Puis-je apprendre une nouvelle langue pour m’intégrer réellement ?

On peut trouver un pays pittoresque et charmant lorsqu’on y passe des vacances. Une autre chose est d’y vivre 365 jours par an.

Est-ce que, comme un ancien ministre de François Hollande, je suis sujet à la « phobie administrative » ? Ou, au contraire, suis-je comme un poisson dans l’eau dans l’univers bureaucratique ?

S’installer à l’étranger demande, en effet, d’effectuer une multitude de démarches administratives, en France et dans le pays d’accueil, dans des domaines variés allant de la retraite au déménagement, en passant par la santé, la fiscalité ou encore l’immobilier. Ces tâches, souvent rébarbatives, ne sont pas à sous-estimer et encore moins à négliger.

Le mieux est donc, avant de vous installer définitivement, de faire un essai pendant au moins un trimestre, voire toute une année si vous le pouvez. Prenez un logement en location, et vivez comme si vous étiez définitivement installé. Vous aurez ainsi tout le temps pour vous demander si les points positifs de votre nouvelle vie en compensent les points négatifs.

Les sujets qui peuvent fâcher

Mais l’expatriation à l’âge de la retraite mérite aussi que l’on s’arrête sur d’autres sujets qui peuvent s’avérer particulièrement embêtants. Nous en avons identifié quatre : la propriété, les ennuis de santé, le divorce, et enfin le décès et la succession.

1/ La propriété

Les conseils que nous avons donnés pour la Grèce valent pour de nombreux pays. Même en Europe, les surprises peuvent être de taille : absence de droit de rétractation, absence de garantie décennale du constructeur, non-respect du permis de construire, flou dans le périmètre de la propriété, etc.

Les sites www.jachetemonlogement.eu/, des notaires de l’Union européenne, et www.uinl.org, de l’Union internationale du notariat, fourmillent d’informations sur l’achat d’un bien immobilier dans la plupart des pays européens. Quoi qu’il en soit, il est indispensable de s’entourer de professionnels ayant pignon sur rue (avocat, notaire, expert…) et qui seront en lien avec votre notaire français.

Attention également aux frais d’acquisition, qui peuvent faire s’envoler le prix affiché du logement. Mais aussi aux frais de change pour les transactions hors euro, à d’éventuels frais de traduction pour être certain de tout comprendre des documents qui vous sont présentés, aux honoraires des professionnels auxquels vous ferez appel, etc.

Bref, acheter sa résidence principale à l’étranger demande un minimum d’implication pour bien comprendre les pratiques immobilières et la législation du pays que vous avez choisi, afin d’éviter au maximum les désillusions. Cela nécessite aussi d’établir un budget précis pour pouvoir faire face à toutes les dépenses.

Une des moins mauvaises solutions est peut-être de louer son logement (attention à la signature du bail, cependant), ce qui évitera notamment d’avoir à revendre le bien dans de mauvaises conditions à l’occasion d’un départ précipité.

Cela devrait vous donner assez à réfléchir pour aujourd’hui. Mais nous continuerons demain avec les trois autres problèmes qu’il faut avoir en tête avant de vous expatrier.

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