La nomination d’un gold bug au poste de gouverneur de la Fed intrigue alors que les déficits publics records s’empilent.
Les marchés actions ont repris leur marche en avant, imperturbables.
Une relative unanimité commence à se faire concernant cette « bulle de tout » : la plus grosse serait les crédits contractés par les entreprises aux Etats-Unis, en Europe et en Asie.
Evidemment, je ne suis pas de cet avis. La plus grosse de cette « bulle de tout » est celle des emprunts d’États souverains, emprunts garantis par les contribuables nés ou à naître. Mais effectivement, elle devrait éclater en dernier, les autorités politiques et monétaires faisant tout pour la préserver.
« Tout » sera : taux zéro ou négatifs, rachats des emprunts par les banques centrales…
Cependant, une gestion à la japonaise de la situation est impossible à l’échelle mondiale. Ce que fait le Japon fonctionne car il existe encore un différentiel de taux d’intérêt dans le monde, ce qui permet aux Japonais d’aspirer des revenus de l’étranger.
Un jour ou l’autre, il faudra donc avouer « trop de dettes, pas assez de profits, faisons défaut ». D’autant plus qu’ici et là, les contribuables sont de moins en moins dupes et que la révolte fiscale devient une menace.
Le problème des emprunts d’État est qu’ils constituent l’épargne de bien des gens. Ce qui se produira sera donc plus grave que la faillite d’une très grosse banque engloutissant l’argent de ses déposants. Ce sera, à l’échelle d’un pays, des centaines de milliers de personnes qui seront touchées.
Evidemment, une telle débauche ne serait pas arrivée avec un carcan monétaire comme l’or. La monnaie aurait été disponible en quantité limitée et le recours au déficit public permanent vite jugulé.
Jim Rickards contre Michel Santi
Mon collègue Jim Rickards – qui fréquente la technocrates et bureaucrates internationaux – croit à un retour de l’or dans le système monétaire international.
Michel Santi, économiste et ancien financier, membre fondateur de l’ONG Finance Watch, n’y croit pas. Cette position mérite de s’y attarder quand on sait que Michel Santi avait, à une époque, poussé les banques centrales des pays émergents à avoir de l’or dans une optique de diversification de leurs réserves monétaires.
Michel Santi consacre une récente chronique de son blog à la nomination par Trump de Stephen Moore au conseil des gouverneurs de la Fed. Cette chronique s’intitule « L’or, les conservateurs et la théorie du complot ».
« Stephen Moore, qui vient d’être nommé par Donald Trump au Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale américaine, est de ceux qui considèrent l’or comme le refuge ultime. Il vient de déclarer que les cours du métal jaune devraient remonter à 2 000 $ l’once et que tout investisseur prudent se devrait d’en conserver des proportions importantes dans son portefeuille. « L’idée qu’un gouvernement fédéral puisse imprimer autant d’argent pour imprimer des emplois est pure fantaisie », a-t-il déclaré. Pourtant, l’Histoire a bien montré que la soi-disant stabilité apportée par l’or est illusoire. Tandis que, en période de croissance et de prospérité économiques, les banques sont promptes à émettre plus d’argent en prêts et autres que ne leur permettent leurs réserves, contribuant ainsi à une hausse des prix. Elles ne sont pas capables, dès lors que l’économie se contracte et qu’une partie de ces financements se retrouve en défaut de paiement, de rendre tous leurs dépôts aux épargnants, contribuant ainsi activement à l’effondrement de la masse monétaire et à la déflation. Une mise au point s’impose donc car la terreur qu’éprouve toujours un grand nombre par rapport aux pressions inflationnistes les pousse à vouloir mener un combat rétrograde. »
La lecture de cette chronique est instructive quant à l’utilisation de certains procédés. Par exemple, des propos sont présentés comme des vérités incontestables – « l’Histoire a bien montré que la soi-disant stabilité apportée par l’or est illusoire » –, leur juxtaposition à des évidences servant à les justifier :
« Tandis que, en période de croissance et de prospérité économiques, les banques sont promptes à émettre plus d’argent en prêts et autres que ne leur permettent leurs réserves, contribuant ainsi à une hausse des prix. Elles ne sont pas capables, dès lors que l’économie se contracte et qu’une partie de ces financements se retrouve en défaut de paiement, de rendre tous leurs dépôts aux épargnants. »
Ce que ne supportent pas les technocrates progressistes avec l’or est le fait qu’il mette une limite physique à leurs ardeurs :
« Comprenons-le une fois pour toutes : la « relique barbare » empêche toute flexibilité macroéconomique, et confisque aux Etats leur autonomie car il va de soi que le papier monnaie (et demain la monnaie numérique) autorise un contrôle de la masse monétaire nettement plus optimal. »
Frédéric Bastiat, au temps de l’étalon-or, balayait ce genre d’idée par l’ironie :
« « Si le peuple souffre, c’est qu’il n’a pas assez d’argent. Il en faut faire », disent les hommes politiques. Et comme il n’est pas aisé de multiplier les métaux précieux, « nous ferons du numéraire fictif », ajoutent-ils, « rien n’est plus aisé, et chaque citoyen en aura plein son portefeuille ! Ils seront tous riches. » »
Mais l’ironie n’est pas perçue par les individus qui prônent la « flexibilité macroéconomique ». Cette flexibilité qui endette les contribuables sur plus d’une génération, confisque par l’inflation les gains de productivité, écrase d’impôts la classe moyenne.
« Bref, l’étalon or est un fantasme, similaire à celui qui consiste à vouloir renouer avec une ex-amie au seul motif de certains bons souvenirs partagés, en dépit d’une vie commune dont on sait qu’elle sera impossible. Que les investisseurs et que les spéculateurs achètent et vendent l’or, c’est leur rôle. Mais est-il sérieux de lier le sort de nos monnaies nationales à l’or : en d’autres termes que notre nouvelle monnaie devienne l’or ? »
L’usage de l’étalon-or, effectivement, ne procure aucun bon souvenir aux grands sorciers monétaires et aux politiciens vendeurs de belles promesses. Il les bride !
Ce qui est intéressant, quand on lit Santi, c’est de se poser la question : pourquoi le FMI a-t-il de l’or, pourquoi les grandes banques centrales continuent-elles à détenir de l’or, pourquoi certaines en ont même acquis depuis 2008 et enfin, une banque centrale peut-elle avoir comme réserves des emprunts d’État à taux d’intérêt négatif ?