La Chronique Agora

Epargne ou crédit : la différence est dans l’avenir

l'épargne au Congo

Le créditisme a remplacé l’épargne par du crédit. A priori, rien ne change, sauf lorsque les choses tournent mal…

Juste avant mon départ pour le Congo, un de mes fils m’a annoncé qu’il avait obtenu un crédit à taux fixe 0,96% sur 15 ans pour un achat immobilier à Paris.

De nos jours, dans les pays développés, plus personne ne raisonne en capacité d’épargne : « je suis capable de mettre X de côté par mois ».

Tout le monde raisonne en terme de capacité d’endettement : « je suis capable d’emprunter Y et de payer X de mensualités ». Evidemment, plus les taux d’intérêt sont bas, plus on peut se charger d’un gros crédit.

Une bonne partie de la hausse continue de l’immobilier durant ces dernières décennies est due à la baisse des taux d’intérêt. Lorsque les taux sont bas, tout ce que vous voulez acheter devient plus cher… Tout ce que vous avez acheté se renchérit sans que vous ayez fait quoi que ce soit.
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Mais parlons plutôt du Congo.

Notre Airbus pour Pointe-Noire n’est plein qu’au quart. Le Congo Brazzaville souffre de la baisse du pétrole et les expatriés ne sont désormais plus légion. Après les grèves SNCF, la météo faisait partie des sujets les plus discutés à bord.

Au Congo, la saison des pluies est cette année exceptionnellement chaude et les averses plus rares qu’habituellement. Au survol d’approche, cependant, rien ne semble avoir changé. La forêt exubérante domine. De temps en temps, quelques rares taches ocre de latérite crèvent le vert sombre émaillé par endroit de petites trouées vert tendre. Les nuages défilent sous les ailes. La pluie orageuse du soir est bien au rendez-vous à l’atterrissage. La sécheresse au Congo attendra que les poules aient des dents.

La pluie est aussi au rendez-vous de ce matin, pour le plus grand bonheur des becs de perroquets.

Dans les pays où le crédit n’est pas développé, on raisonne encore en termes d’épargne.

Résultat : l’immobilier y avance cahin-caha. Les chantiers ne sont pas abandonnés, comme on pourrait le croire. Ils attendent que l’épargne soit constituée par le propriétaire afin qu’il puisse engager la tranche de travaux suivante.

Durant ce laps de temps, tout s’immobilise sans pour autant que ledit propriétaire soit en faillite ou malade. Il faut simplement considérer un chantier en attente comme un stock d’épargne déjà engagé.

Un chantier arrêté de Pointe Noire

Crédit versus épargne, qu’est-ce que cela change ?

A première vue, il n’y a pas vraiment de différence entre l’épargne et le crédit et pourtant…

Dans le premier cas, avec un crédit, si quelque chose se passe mal, c’est le futur qui est assombri. Si l’emprunteur ne peut pas rembourser, le prêteur se trouvera en difficulté, c’est-à-dire une banque qui a obtenu le privilège de prêter de l’argent qui n’existe pas encore. Le problème c’est que cette même banque conserve aussi les dépôts et l’épargne des gens.

Dans le deuxième cas, avec l’épargne, si quelque chose se passe mal, l’avenir n’est pas compromis. C’est l’argent du passé, que l’épargnant avait décidé de ne pas consommer qui se révèlera finalement gâché. Le futur, lui, reste intact.

Avec l’épargne on prend au passé, avec le crédit, on prend au futur.

Le « créditisme » – qui substitue le crédit à l’épargne – repose sur un système bancaire de réserve fractionnaire, le mythe selon lequel votre argent en banque est 100% disponible, et sur une manipulation des taux à la baisse.

C’est simplement une méthode d’asservissement qui détruit notre futur. En multipliant le capital bidon, le créditisme a contribué à renchérir de multiples biens mais a dévalorisé le bien le plus précieux de chacun : le temps de travail, comme le démontre Bill Bonner.

Les banques malades de la peste du créditisme

Lundi 19 mars, la Banque centrale européenne a annoncé différer l’application de ses nouvelles directives concernant les créances douteuses ou prêts non-performants de 2018 à 2021. Les banques italiennes auraient été incapable de provisionner les capitaux demandés et risquaient l’effondrement.

Après 10 ans de quantitative easing et des taux d’intérêt négatifs pour les dettes souveraines, il faut se rendre à l’évidence : le futur ne sera pas radieux. Il n’a aucune chance de s’améliorer tant que les mauvaises créances ne seront pas déclarées irrécouvrables, une bonne fois pour toutes.

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