** "Bernanke avertit que des plans de renflouage plus importants seront nécessaires partout dans le monde", titrait le International Herald Tribune hier.
* L’article entre ensuite dans le vif du sujet. L’économie mondiale est gravement malade, déclare le docteur Bernanke, ou quelque chose comme ça. Nous allons devoir passer aux drogues expérimentales pour lui venir en aide.
* "En plus de racheter aux banques leurs actifs en difficulté", a déclaré Bernanke, "une autre option serait de fournir des garanties d’actifs selon lesquelles le gouvernement absorberait une partie des pertes des banques en échange de warrants et d’autres formes de d’indemnisation". [Evidemment, si les banques avait des moyens d’indemniser les investisseurs, elles ne seraient pas dans un tel pétrin]…
* "Bernanke a également exprimé son soutien à l’idée de créer une soi-disant mauvaise banque qui permettrait au gouvernement d’acheter des actifs financiers en échange de liquidités ou de valeur".
* Et c’est là que nous avons ri si fort que nous avons cru nous briser les côtes.
* Créer une "mauvaise banque" ? C’est une plaisanterie ? Le monde est déjà plein de mauvaises banques — des banques qui ont fait exactement ce que Bernanke a l’intention de faire ; elles ont acheté des actifs financiers, notamment des dérivés du marché des prêts hypothécaires, en l’échange de cash. A présent, elles se tournent vers le contribuable, désespérées, quémandant l’aumône pour éviter de couler.
* Et la pire banque de toutes ? Après la Banque centrale du Zimbabwe, c’est la Fed américaine. Que fait-elle ? Elle achète des ordures et les paie en liquide. De la sorte, les erreurs des riches banquiers sont transférées vers les citoyens ordinaires… par la banque nationale — la Fed. Evidemment, les gens ne savent pas ce qui se passe. Et ils ne s’apercevront pas non plus du moment où la Fed finira par se débarrasser de ces actifs toxiques — aux heures les plus sombres de la nuit.
* Revenons-en aux fondamentaux. L’économie mondiale est en train de corriger. Les autorités essaient de l’en empêcher. Elles ont essayé la stimulation monétaire à la Friedman — baissant les taux à zéro. Et elles transpirent comme Sisyphe en tentant de faire fonctionner les stimulants fiscaux de Keynes.
* Les deux options échoueront — pour les raisons que nous expliquons à longueur de Chronique. On ne peut aider un alcoolique en lui donnant de la gnôle gratuite. Et on ne rend pas service à un obèse en lui proposant une deuxième ration de dessert.
* Si les dirigeants américains veulent réussir dans quelque mesure que ce soit, ils doivent comprendre à quel jeu ils jouent… et se tourner vers quelqu’un qui sait faire la différence entre un roi et un deux… quelqu’un qui garde un atout dans sa manche, juste au cas où. Les Etats-Unis ont besoin de meilleurs dirigeants, pas ces plaisantins de Bernanke et Paulson. L’Amérique est en train de gonfler une bulle de la finance publique ; elle a besoin de quelqu’un qui comprenne comment le système de finance publique fonctionne.
* Bref, les Etats-Unis ont besoin de Bernie Madoff. Nous avons entendu dire que Madoff n’a pas été arrêté. Il est chez lui, apparemment, en train de regarder la télévision et d’attendre des nouvelles des gendarmes. Pourquoi ne pas tirer parti de son temps libre ? Pourquoi ne pas lui demander de faire des travaux d’intérêt public ?
** Au sens large, les économies d’aide sociale appliquées dans les nations occidentales développées ne sont rien d’autre que des schémas de Ponzi. Le système des retraites, par exemple, ne peut survivre que tant qu’il y a assez de nouveaux contributeurs pour couvrir les promesses faites aux anciens. Comme dans toute pyramide de Ponzi, les premiers arrivés dans le système sortent largement gagnants. Les tout premiers bénéficiaires ont très peu contribué et beaucoup profité — selon leur durée de vie. Mais à mesure que le temps passe, le schéma tourne au vinaigre. Les personnes d’âge moyen s’en sortiraient mieux, aujourd’hui, avec un système de retraite privé… tandis que les jeunes ont peu de chances de voir une quelconque allocation.
* John Law n’a jamais vu fonctionner les finances publiques américaines. Pas plus que Charles Ponzi. Mais même sans test de paternité, tous deux auraient pu reconnaître leur rejeton.
* Bernie Madoff, lui, est encore en vie. Il est le champion du monde actuel… le tenant du titre dans la ligue de Ponzi. Et pourtant, comparé aux finances publiques américaines, son système n’est rien… que de la petite bière. L’arnaque de Madoff a coûté aux investisseurs environ 50 milliards de dollars seulement. L’escroquerie du dollar américain leur coûtera des milliers de milliards.
* La nature de cette pyramide est plus facilement compréhensible si l’on regarde vers l’avant plutôt que vers l’arrière. Le président Obama a annoncé la semaine dernière que les Américains se trouvaient confrontés à "des déficits de plusieurs milliers de dollars pour les années à venir". L’estimation du déficit 2009 était déjà à 1,18 millier de milliards de dollars. Certains experts prévoient un déficit de plus de 2 000 milliards de dollars. Au moins une prévision est à plus de 3 000 milliards, si non en 2009, du moins l’année suivante.
* Ces gigantesques déficits ne semblent pas perturber le sommeil des citoyens. Sur cinq ans, un déficit annuel de 1 000 milliards de dollars ajouterait environ 50 000 $ à l’endettement général de chaque foyer américain. Mais les Américains ont l’intuition qu’ils ne devront jamais payer cette somme. Instinctivement, ils savent que c’est une pyramide de Ponzi.
* Il y a bien longtemps que les Américains ne peuvent plus se dire : "nous nous les devons à nous-mêmes". Une bonne partie de l’emprunt américain revient aux étrangers. Ces énormes déficits ne pourraient absolument pas être financés par l’épargne interne. Les étrangers doivent cracher au bassinet, sans quoi les Etats-Unis se retrouveraient à court d’argent. Ils le font parce qu’ils espèrent récupérer leur argent — avec des intérêts. Mais comment les Etats-Unis peuvent-ils rembourser l’argent qu’ils empruntent ? Ils n’ont pas de revenus. Ils n’ont pas d’excédent. Ils doivent emprunter plus pour rembourser leurs emprunts passés. John Law adorerait ce plan ; Ponzi en serait fier ; et Bernie Madoff pourrait le faire fonctionner.
* Alors que nous écrivons ces lignes, rien ne nous semble plus remarquable que la crédulité et la naïveté des pigeons du reste de la planète. Les plus vieux amis de Bernie Madoff le suppliaient quasiment d’accepter leurs fonds. Les gens s’inscrivaient à son country club de Palm Beach uniquement dans l’espoir de l’approcher, pour qu’il les sépare de leur argent.
* Aujourd’hui, les investisseurs se bousculent littéralement pour prêter de l’argent au plus grand débiteur de la planète. De tous les chiffres stupéfiants qui paraissent actuellement, aucun n’est plus étonnant que le rendement actuel des bons du Trésor US. A 2% à peine sur les bons à dix ans, les investisseurs prêtent de l’argent aux autorités américaines sans rien demander en retour… sinon qu’on leur rende leur argent.
* Bien entendu, les pyramides de Ponzi ont toujours une fin. Et l’arnaque des finances publiques américaines atteint déjà sa conclusion. A l’heure où nous écrivons ces lignes, les prêteurs ne sont toujours pas plus intelligents. Mais ils sont plus pauvres.