La Chronique Agora

Pourquoi le dollar basé sur la dette est-il toujours là ?

▪ Nos méditations sur la monnaie et la dette nous mènent enfin quelque part !…

D’abord, nous avons examiné la monnaie. Nous avons vu que les Etats-Unis (et l’Occident plus généralement) fonctionnent sur un type de devise plus adapté au Paléolithique. Un système monétaire adossé au crédit n’a jamais fonctionné dans le monde moderne… et aucun d’entre eux n’a jamais survécu à un cycle de crédit complet. Le crédit enfle jusqu’à ce que la dette soit bien trop lourde. Ensuite, quand les taux d’intérêt grimpent, le coût de la dette augmente… jusqu’à ce que le système tombe en morceaux.

Deuxièmement, nous avons réfléchi au fardeau de l’Américain moyen. En 1950, le travailleur américain lambda pouvait subvenir aux besoins d’une famille. Aujourd’hui, il a du mal à subvenir ne serait-ce qu’à ses propres besoins — parce que ses principales dépenses ont grimpé en flèche. Nous avons vu le coût d’une nouvelle voiture et d’une nouvelle maison cette semaine. Il doit travailler deux fois plus longtemps pour les acquérir. Les soins de santé sont pires encore. Le coût par personne et par an en 1950 était de 100 $ environ. Selon les chiffres du gouvernement, les prix aujourd’hui sont environ 10 fois plus élevés. La santé devrait donc coûter environ 1 000 $. On en est loin : elle est à 9 000 $.

En 1950, l’Américain moyen gagnait environ 60 $ par semaine. Pour une famille de quatre, il devait travailler moins de sept semaines pour couvrir les dépenses de santé. Aujourd’hui, combien gagne-t-il par an ? Nous avons utilisé le chiffre de 30 000 $. Pourtant, une famille de quatre personnes consacre environ 36 000 $ rien qu’aux dépenses de santé !

▪ Comment l’argent louche des autorités a-t-il affecté le patrimoine de la famille américaine moyenne ?
On peut commencer en se demandant ce qui serait arrivé si les Etats-Unis avaient conservé leur système monétaire d’avant 1971. A l’époque, la quantité de crédit était limitée. Les comptes nationaux étaient réglés en or. Quoi que disent les autorités, quand on est au pied du mur, c’est à l’or que l’on fait confiance. En 1971, la France avait accumulé plus de dollars qu’elle n’en voulait. Son économiste en chef, Jacques Rueff, a conseillé aux Français d’amener tout de suite leurs dollars au Trésor US et de demander de l’or en échange. Mais après le 15 août, il était trop tard. La fenêtre de l’or avait été brutalement refermée. La France devait conserver ses dollars et espérer que tout irait bien.

Puisque le dollar américain était désormais la pierre angulaire du système monétaire international, les dollars étaient très demandés. Les Américains en avaient. Ils pouvaient donc jeter l’argent par les fenêtres. Le dollar lui-même est devenu la première exportation américaine… avec la marge la plus haute de tous les produits d’exportations jamais fabriqués.

La loi de Say, cependant, nous dit que « l’achat d’un produit ne peut être fait qu’avec la valeur d’un autre « . Il voulait dire par là qu’il faut produire des choses pour pouvoir en acheter d’autres. C’est normalement vrai… sauf quand on imprime la devise de réserve mondiale. Dans ce cas, on a le privilège exorbitant de ne devoir produire que de la « monnaie ».

En l’occurrence, les usines qui auraient normalement fabriqué les produits nécessaires pour acheter d’autres produits à d’autres gens en d’autres endroits ont décampés directement dans d’autres endroits. Entre 1978 et 2010, le Bureau américain des statistiques de l’emploi nous dit que les Etats-Unis ont perdu 78% de leurs travailleurs dans le secteur de l’habillement, 69% dans le secteur des « métaux primaires », 67% dans le secteur du textile et 26% dans le secteur des « équipements de transport ».

Ou, pour voir les choses autrement, le déficit commercial accumulé depuis 1971 se monte en gros à 8 000 milliards de dollars. C’est à ce point que l’échange « produits contre produits » est déséquilibré. Les étrangers produisent des biens ; les Américains ne produisent que de l’argent. Imaginez que la composante « main-d’oeuvre » des biens se monte à 50%. Cela signifie que les travailleurs américains ont laissé échapper l’équivalent de 4 000 milliards de dollars de revenus. Répartissez cette somme sur l’intégralité de la main-d’oeuvre masculine, et chacun serait 80 000 $ plus riche. Plus important, sans le recul général de leur industrie, les Américains auraient désormais plus d’emplois et des salaires plus élevés.

▪ Pourquoi une telle prépondérance de la devise basée sur le crédit, dans ce cas ?
L’argent basé sur le crédit est de l’argent facile. Et l’argent facile devient facilement plus de dette. La dette appauvrit. Elle ne rend pas les gens plus riches.

Alors pourquoi avons-nous cette devise basée sur le crédit ? Parce que les gouvernements sont, à la base, un moyen pour les initiés (qui contrôlent la fonction policière de l’Etat) de s’emparer du pouvoir et de l’argent des non-initiés. Cicéron a décrit autrefois ces deux groupes comme étant les Optimates d’un côté et les Populares de l’autre. On peut aussi les considérer comme les élites et l’homme de la rue… les classes privilégiées et la plèbe.

La différence essentielle entre les deux, c’est que les élites, les optimates, les initiés… ont le gouvernement dans la poche. Les autres non.

La monnaie basée sur le métal précieux est une limite naturelle à la capacité des élites à dépouiller le reste de la population. Il est relativement plus difficile de bidouiller des pièces d’or et d’argent que de la monnaie papier ou de la monnaie papier appuyée à une autre forme de crédit. Il n’y a qu’une quantité donné d’or et d’argent. Soit on en a, soit on n’en a pas. Et quand les Français se présentent au Trésor dollars en main, vous devez leur donner votre métal, sans quoi vous êtes en défaut de paiement.

Dès le départ, les gouvernements ont pris le contrôle de la devise. Episodiquement, ils l’ont utilisée comme un autre moyen de détourner la richesse des non-initiés vers les initiés. On peut voir les résultats en réexaminant les effets sur le salaire d’un Américain moyen. Nourriture, carburant, automobile, logement, soins de santé — selon nos calculs, le travailleur moyen d’aujourd’hui aurait besoin d’à peu près deux fois autant de revenus pour atteindre le niveau de vie de 1950.

Où est allé tout ce revenu supplémentaire ? Une partie est allée à la Chine et autres concurrents des Etats-Unis. Une autre est allé aux zombies. Et une partie est simplement partie en fumée…

… rejoignant le néant d’où provient la nouvelle monnaie des autorités.

Nous n’en avons pas encore fini avec ce sujet…

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