La Chronique Agora

« Divergences » à la Fed

banques centrales

▪ Il est abusif d’affirmer que quelle que soit la stratégie privilégiée par la Réserve fédérale, les marchés la jugeraient mauvaise. Cela fait en réalité trois mois que les marchés n’achètent plus ni la croissance, ni les QE, ni les creux indiciels.

Et si la FED "déçoit", c’est paradoxalement sur le sol américain que cette déception s’avère la moins pénalisante pour les actifs financiers.

Le high yield est le secteur qui souffre le plus, mais c’est à l’image de toutes les dettes à haut risque, qu’elles soient domestiques ou émergentes.

Prenez le S&P 500 : il gravitait encore au-dessus des 2 000 points jeudi dernier à mi-séance, soit 6% seulement en-deçà de son record historique printanier. Cela alors que le DAX 30 (Francfort) éprouvait toutes les peines du monde à ramener en-deçà des 20% l’écart par rapport à ses sommets.

Le DAX 30, c’est pourtant l’indice mondial situé le plus près de la planche à billets de la BCE, qui déverse 60 milliards d’euros par mois dans le système financier, et même 76 milliards au dernier pointage en ce mois de septembre.

Que pèsent réellement les divergences des membres de la Fed au sujet de l’économie mondiale ?

Alors que pèsent réellement les divergences des membres de la Fed au sujet de l’économie mondiale ? Et qu’entendons-nous par divergences ?

▪ Atmosphère tendue
Le résultat du vote divulgué jeudi dernier fait apparaître une seule dissidence, celle de Jeffrey Lacker (de la Fed de Richmond).

Il aurait pu être rejoint par James Bullard, le président de la Fed de Saint-Louis — qui ne dispose pas d’un droit de vote cette année : il a évoqué une réunion "très tendue".

Lacker et Bullard critiquent la perméabilité de la Fed aux pressions exercées par les marchés et invoquent la solidité des chiffres de l’emploi publiés mercredi dernier à la veille du communiqué du FOMC par le Bureau du recensement (Census Bureau).

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Il en ressort que l’année 2014 se solde par une progression spectaculaires du nombre d’emplois créés : près de trois millions, le chiffre le plus important depuis 1999.

Les "colombes" de la Fed — Janet Yellen la première — soulignent toutefois que les salaires stagnent… et que les revenus annuels d’un foyer moyen aux Etats-Unis sont demeurés inchangés depuis trois ans, autour de 54 000 $.

Le taux de pauvreté aux Etats-Unis s’établit officiellement à 14,8% de la population — soit 46,7 millions d’Américains. Il faudrait cependant doubler ce chiffre avec les 45 millions d’Américains bannis des statistiques de l’emploi et privés de toute indemnisation en matière de chômage, ayant dépassé tous les délais légaux.

Ils sont pris en charge pour les plus chanceux par leur famille, les autres dépendant de la charité publique.

Pour ceux qui ont trouvé ou retrouvé un travail, les salaires semblent gelés et les emplois sont plus précaires.

La masse d’argent distribuée entre davantage de salariés est restée inchangée l’an dernier.
Le même gâteau a tout simplement été divisé en davantage de parts.

▪ Les inégalités évoluent
Seule évolution qui tend à rassurer un peu, la croissance des inégalités semble avoir atteint un plafond historique. L’écart de salaire entre les plus riches et les plus pauvres s’est très légèrement resserré en 2014.

Les 5% de la population la mieux lotie ne capteraient plus que 21,9% du total des revenus distribués en 2014, contre 22,2% en 2013.

Cela ne reflète pas grand’chose de positif pour la majorité des Américains : les disparités au sein des 95% qui se partagent 79,1% de la richesse résiduelle se creusent vers le bas puisque les 50% les plus pauvres ne se partagent que 5% du reliquat.

Les avoirs des 90% les moins riches ont dégringolé de 37% à 23% sur 35 ans

Ce n’est là qu’une illustration supplémentaire d’un phénomène qui ne cesse de se radicaliser depuis les années 80 (années Reagan/Thatcher). En effet, les avoirs des 90% les moins riches ont dégringolé de 37% à 23% sur 35 ans tandis que ceux des 0,1% (oui, zéro virgule un pour cent, en toutes lettres, et non 1%) ont progressé de 7% à… 24% !

Vous lisez bien : 0,1% de la population américaine possède plus, depuis 2014, que 90% de la totalité des plus pauvres… Quant aux 9,9% restants, ils se partagent environ 55% de la richesse.

Les 10% des plus riches détiennent donc au bas mot 80% du total.

Ce qui est le plus frappant, c’est l’accélération de l’enrichissement des 0,1% les plus riches depuis 2009 (début des quantitative easings) et la vitesse de paupérisation des 90% les plus pauvres.

▪ Qui va acheter ?
Toute l’action de la Fed depuis 2009 se résume à ce constat… Et les ultra-riches réalisent qu’ils n’ont personne à qui céder des actifs financiers dont la valeur a été multipliée par trois en six ans par les QE.

Il n’y a que les 5% les plus riches qui en auraient les moyens… mais ils sont également gavés d’actifs financiers qui leur brûlent les doigts.

Le seul acheteur sur le marché depuis 2009, c’est en réalité la Fed — exactement comme la BoJ au Japon.

Le véritable problème pour les marchés, ce n’est donc pas le niveau des taux d’intérêt mais le dégonflement du bilan de la Fed

Le véritable problème pour les marchés, ce n’est donc pas le niveau des taux d’intérêt mais le dégonflement du bilan de la Fed, c’est-à-dire la nécessité de vendre… face à aucun acheteur puisque la Chine est désormais vendeuse de bons du Trésor US.

Alors bien sûr, la BCE injecte de la liquidité… mais si c’est pour acheter des T-Bonds US afin d’éviter leur effondrement, nulle reprise n’est envisageable en Europe.

Les bons du Trésor US ne sont rien d’autre que des subprime en quête d’un pigeon pour gagner encore un peu de temps avant que la plus gigantesque pyramide de Ponzi ne s’effondre.

En conclusion, le débat sur le niveau des taux américains n’est qu’une gesticulation destinée à détourner les yeux des non-initiés du vrai problème — à savoir, la disparition de la contrepartie sur les actifs obligataires et boursiers.

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