La Chronique Agora

Divergence entre le cours de l'acier et le cours des aciéristes : une opportunité ? (2)

Par Isabelle Mouilleseaux (*)

Le prix du charbon coke explose
Deuxième limite à la production d’acier : le marché mondial du charbon coke (second constituant de l’acier) est lui aussi en déficit. Selon les calculs des experts de la banque Macquarie, la demande devrait progresser de 7,3% en 2008 à 234 millions de tonnes ; l’offre mondiale n’augmenterait, quant à elle, que de 1,1%, à 219 millions de tonnes. Et, comme pour le fer, l’ajustement se fait par les prix.

Début avril, les négociations entre les producteurs de charbon et les sidérurgistes qui fixent le prix des transactions du charbon à coke pour l’année, se sont conclues par une hausse d’environ 200%. Le coréen Posco, quatrième sidérurgiste mondial, a révélé avoir conclu pour un prix de 305 $ la tonne, soit plus de trois fois les 98 $ négociés pour l’année fiscale qui s’est achevée le 31 mars dernier.

La négociation est également difficile pour les aciéristes japonais JFE et Nippon Steel avec BHP Billiton. Le niveau des prix reflète la panique qui s’est emparée des sidérurgistes qui, se trouvant dans l’absolue nécessité de faire tourner leurs haut-fourneaux, sont obligés d’accepter cette hausse.

Pour mémoire, le charbon, qui cotait 25 $ la tonne en 2003, a atteint les 130 $ en février dernier. Soit une multiplication par cinq de son cours en quatre ans !

Pourquoi une telle hausse ?
Il y a d’abord l’envolée des cours du brut (plus de 100% depuis janvier 2007) qui tire toutes les énergies à la hausse… Comme pour l’instant, les énergies propres ou renouvelables (vent, eau, solaire, géothermie…) ne sont pas encore disponibles et que les infrastructures nucléaires sont loin d’être suffisamment développées, il ne reste donc, immédiatement disponibles, que le brut et le charbon.

Et puis n’oublions pas que la Chine affiche des taux de croissance à deux chiffres, année après année. Or la Chine fonctionne au charbon : plus de 80% de son électricité émane du charbon ! Jusqu’à très récemment, étant le plus gros producteur mondial, elle exportait du charbon (la Chine est aussi le plus gros exportateur mondial). Mais en juillet 2007, elle était importatrice nette pour la première fois de son histoire. La Chine a d’ailleurs décidé de mettre en place en début d’année une nouvelle taxe de 25% sur ses exportations de charbon, afin que la demande intérieure soit livrée en priorité et que les prix soient stabilisés. Et comme je vous le disais, le pays est le premier exportateur de charbon ; voilà pourquoi les prix du charbon en Asie ont grimpé de 30% en 2007…

Conséquence : les aciéristes remontent leurs prix
Avec l’envolée du coût des matières, et pour éviter la baisse de leurs marges, les aciéristes relèvent leurs prix, sans problème : + 30 % en trois mois selon Macquarie.

En mars dernier, ArcelorMittal a indiqué qu’il allait augmenter de 12% à 15% les prix de ses aciers plats au carbone en Europe à compter du 1er avril 2008. La société annonce aujourd’hui vouloir augmenter le prix de sa tonne d’acier destinée au marché américain de 250 $ pour faire face à la hausse du prix de l’énergie et du fer.

Thyssen Krupp a lui aussi augmenté ses prix, tout comme les américains Nucor et AK Steel. Même l’indien Tata Steel a augmenté ses prix au 1er mars.

Le coréen Posco a suivi le mouvement global, mettant en avant le coût élevé du nickel dans la production d’acier inoxydable. China Steel et Baoshan Iron & Steel vont faire de même.

Le fait que cette hausse des prix soit acceptée sans sourciller par les clients prouve bien que la demande est forte et incompressible. Une chance pour les sidérurgistes !

Résumons-nous…
Le marché de l’acier est donc structurellement déficitaire. La demande est forte et prête à accepter des relèvements de prix. Ce qui fait de ce secteur d’activité un secteur relativement préservé du risque de ralentissement économique mondial. Un secteur défensif en somme…

Si nous partons de ce constat, les valeurs du secteur de l’acier devraient valoir le coup d’oeil, certaines d’entre elles étant fort peu valorisées. A commencer par Thyssen Krupp, Posco ou Salzgitter.

Meilleures salutations,

Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora

(*) Isabelle Mouilleseaux rédige chaque jour l’Edito Matières Premières (Publications Agora), une lettre internet gratuite consacrée au marché des matières premières. Passionnée depuis toujours par la Bourse et par tous les marchés financiers, Isabelle s’est spécialisée dans les matières premières et veut permettre à l’investisseur particulier de découvrir et de comprendre l’investissement sur ce marché des matières premières.
 
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Source : L’Edito Matières Premières

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