La Chronique Agora

Dette, inflation, déflation… La collision est inévitable

▪ Aujourd’hui, nous revenons à notre cours accéléré sur l’argent — et notamment la situation macro-économique.

Lors de notre dernier épisode, nous avions construit la quille. Aujourd’hui, nous ajoutons les flancs — nous verrons bien ensuite si ça flotte.

En 1958, la première carte de crédit a été introduite aux Etats-Unis, suivie d’autres innovations comme des prêts sans apport personnel, des titres adossés aux prêts hypothécaires, des dettes subprime énergétiques, du crédit… et ainsi de suite. Tout ça a engendré un système monétaire entièrement nouveau. Le capitalisme sans capital ! Il n’y avait plus besoin d’argent réel. On pouvait vivre… investir… faire des affaires… à crédit. Il n’y avait que 1 000 milliards de dollars environ de crédits en cours aux Etats-Unis à la fin des années 60. En 2010, ce chiffre était passé à 50 000 milliards de dollars. Sur ce montant, il y a approximativement 33 000 milliards d' »excès » — dépassant la quantité nécessaire pour le fonctionnement normal de l’économie.

Depuis l’avènement du système de monnaie fiduciaire gérée en 1968, l’argent n’a plus besoin d’être gagné… ou épargnées

Jamais encore de l’histoire de la monnaie autant de pouvoir d’achat n’est apparu de nulle part. Depuis l’avènement du système de monnaie fiduciaire gérée en 1968, l’argent n’a plus besoin d’être gagné… ou épargné. Il peut désormais être « créé »… à volonté, par le système bancaire. Lorsque la monnaie est garantie par l’or, la masse monétaire est limitée. Il n’y a qu’une quantité donnée d’or. Lorsqu’on abandonne l’étalon-or… plus rien ne vous arrête

Le problème est évident. Plus il y a de crédit, plus il y a de dettes. Plus il y a de dettes, plus la production économique est sollicitée. C’est aussi vrai pour les individus que pour les économies. Ils atteignent un point où ils ne peuvent plus se permettre de dettes supplémentaires. Ils n’ont simplement pas assez de revenus pour ça.

▪ Et le gouvernement s’en est mêlé…
Ce point est arrivé pour les ménages US en 2008. Ils avaient trop de dettes — et notamment trop de dettes hypothécaires. Lorsque les prix de l’immobilier ont chuté, il en est allé de même pour la valeur de leur nantissement… mettant tout le secteur des prêts immobiliers en danger.

C’était une correction. Les excès de la bulle immobilière étaient corrigés de la manière classique. La bulle cédait le pas au krach.

Sauf qu’au lieu de laisser la correction suivre son cours, le gouvernement américain et sa banque centrale, la Fed, sont intervenus. Ils étaient fermement décidés à mettre fin à la contraction de la seule manière possible pour eux : en favorisant plus d’expansion du crédit.

Une partie de la mythomanie des économistes modernes, c’est l’idée que chaque ralentissement reflète un manque de « demande »

Vous pouvez lever les sourcils et vous gratter le menton, cher lecteur. Peut-on vraiment réparer un problème de dette avec plus de dette, vous demandez-vous peut-être ? C’est inutile. Une partie de la mythomanie des économistes modernes, c’est l’idée que chaque ralentissement reflète un manque de « demande » et que ladite demande peut-être stimulée avec plus de crédit. C’est une discussion longue et barbante. Passons.

L’idée de base est la suivante : les autorités sont décidées à maintenir la croissance du crédit envers et contre tout. Elles pensent, à raison, qu’une contraction du crédit serait catastrophique. Pensent-elles aussi qu’elles peuvent la retarder éternellement ? Nous n’en savons rien. Mais nous ne doutons pas qu’elles pensent qu’elles peuvent balayer tout ça sous le tapis assez longtemps pour quelqu’un d’autre s’en charge, un autre jour. Demeurent quand même deux questions en suspens : quand le tas de poussière sera-t-il découvert… et que se passera-t-il ensuite ?

Toute la situation macro peut être résumée ainsi :

Après 60 ans d’expansion du crédit, le monde croule désormais sous les dettes. La réaction naturelle du marché est une contraction du crédit. Mais les autorités résistent. Comme l' »alimentation rectale » d’un obèse, les banquiers centraux aggravent une situation grotesque.

Cela met l’investisseur dans une position très difficile. Il est pris entre le marteau d’une déflation du marché du crédit… et l’enclume de l’inflation du crédit par les banques centrales.

Alors qu’est-ce qui nous attend ? L’inflation ? La déflation ? Une collision catastrophique ? Et comment !

A suivre…

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