La Chronique Agora

Sans dette, les Etats-Unis explosent

▪Nous expliquions hier que l’empire américain et la bulle du crédit dépendent l’un de l’autre. En deux mots, après les années 70, il n’y avait plus assez de jus dans l’économie américaine pour payer à la fois les dépenses sociales nationales… et un mastodonte impérial dans le reste du monde.

La solution ? Le crédit. L’emprunt du secteur privé a créé aux Etats-Unis quelque 33 milliards de dollars d’excédent d’activité économique (c’est-à-dire supérieure au niveau traditionnel du ratio dette/PIB). Cela a fourni des ventes… des dépenses… des emplois… des profits pour les entreprises (lourdement concentrés dans le secteur financier)… et des gains d’investissement. Tout cela a donné aux électeurs le sentiment qu’ils progressaient. Ils ont fourni abondance de recettes fiscales au gouvernement.

La dette ne sert plus de "coup de fouet" ; elle est désormais nécessaire uniquement pour faire du surplace

La dette a augmenté. Nous avons examiné les chiffres tant de fois qu’il est inutile de les répéter. Plus important, l’économie américaine — et l’empire — sont devenus de plus en plus dépendants de la dette rien que pour continuer comme si de rien n’était. La dette ne sert plus de "coup de fouet" ; elle est désormais nécessaire uniquement pour faire du surplace. Sans elle, le marché s’effondre… et l’économie entre en récession, voire en dépression. C’est ce qui est arrivé en 2008-2009. Le secteur privé a cessé de s’endetter… et l’enfer s’est déchaîné.

▪ Plantons le décor…
L’administration de Bush Jr. avait laissé son appétit de dépenses prendre le mors aux dents. C’était majoritairement dû au fait qu’il s’agissait du gouvernement le plus ouvertement pro-empire de l’histoire des Etats-Unis. C’était aussi — quoique beaucoup plus discrètement — le gouvernement le plus pro-Etat Providence.

L’équipe Bush n’a jamais vu de pays où elle ne voulait pas interférer… n’a jamais vu de piège dans lequel elle ne voulait pas entrer avec ses gros sabots… et n’a jamais vu de dépenses auxquelles elle veuille opposer un veto. Sous couvert de dépenses de "sécurité", elle s’est enlisée dans les plus gros déficits de l’histoire.

Après les attentats du 11 septembre 2001, les discussions budgétaires sérieuses ont été obscurcies par le chauvinisme impérial. La "sécurité" dépendait d’une économie robuste… laquelle dépendait de l’expansion continue du crédit.

Par la suite — puis à nouveau après la crise de 2008-2009 –, l’expansion du crédit a donné des signes d’essoufflement.

La Fed est alors arrivée à la rescousse ; ses chefs ont été loués à l’instar d’un Scipion ou d’un César. Tant Alan Greenspan que Ben Bernanke ont fait la couverture de TIME, comme s’ils étaient des conquérants et des héros plutôt que des économistes renfrognés aux théories douteuses. En 1999, Greenspan, Rubin et Larry Summers furent baptisés "le comité pour sauver le monde". Bernanke fut assimilé à "un héros" par le magazine Atlantic… et TIME en fit sa personne de l’année en 2009.

Leur véritable contribution ? Ils ont aidé les Américains à s’endetter plus encore… et ont ainsi aidé des secteurs improductifs à conserver leur mainmise sur une bonne partie des ressources du pays.

A présent, les autorités exercent de plus en plus de contrôle sur la manière dont l’argent est dépensé… et investi

▪ Un déficit en baisse — pour l’instant
A présent, les autorités exercent de plus en plus de contrôle sur la manière dont l’argent est dépensé… et investi. Sans surprise, le retour sur investissement chute… et la croissance ralentit. Au fur et à mesure, la production actuelle a plus de mal à tenir le rythme de la dette et des dépenses courantes. Le besoin de crédit augmente.

Et voilà que nous entendons dire que la situation du budget fédéral américain s’améliore ! Les recettes fiscales sont en hausse. Les dépenses sont en baisse. Hélas, c’est un phénomène tout à fait temporaire. Le Bureau du budget au Congrès estime que le déficit fédéral devrait atteindre un plancher cette année et l’année prochaine — à plus de 500 milliards de dollars tout de même –… avant de se remettre à grimper.

Ce sont là de bonnes nouvelles pour l’empire… et pour une économie dépendant du crédit.

La dette ne peut pas croître si personne n’est assez idiot pour emprunter. Le gouvernement américain deviendra l’emprunteur de dernier recours… et continuera à emprunter pour financer l’empire… et ses secteurs zombies…

… jusqu’à ce que tout explose.

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