Ce lundi de la Pentecôte semblait taillé sur mesure pour les investisseurs équipés de bons freins. C’est sans surprise qu’ils ont assisté à la franche glissade des indices boursiers dès les premiers échanges — pour constater un repli supérieur à 1% au bout d’une demi-heure de cotation.
A quoi d’autre pouvaient-ils s’attendre ? Samedi sont parus les chiffres de la production industrielle chinoise, largement plus médiocres qu’attendus : une hausse de seulement 6% au mois d’avril alors que les économistes visaient prudemment une hausse de 6,5%. Parallèlement, les ventes de détail ont encore ralenti à +10,1% en rythme annuel, déjouant un consensus de +10,5% déjà inférieur au rythme de +11% des mois précédents.
Le « miracle de mars » est déjà relégué aux oubliettes.
Il y a plus troublant encore : le mois d’avril se solde par une envolée de 63,5% des ventes de logements neufs en Chine.
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Quand cela paraît surréaliste, c’est qu’il existe certainement une cause bien réelle… et c’est Pékin qui en est à l’origine : la fiscalité a changé au 1er avril avec l’application d’une TVA « nationale » allégée sur les transactions immobilières qui se substitue à un système de taxes locales parfois handicapant.
Le second booster, c’est l’abaissement du montant de 25% à 20% de l’acompte requis pour conclure un premier achat dans les villes où il n’existe pas de restrictions.
Pour un deuxième achat, l’acompte peut également — dans certains cas — être allégé de 40% à 30%.
Cette facilité ne s’applique pas dans les métropoles les plus chères, mais il en reste beaucoup d’autres où la mesure a dopé les ventes. Les Chinois ont différé leurs achats jusqu’au moment de l’entrée en vigueur de la mesure, d’où un « effet ketchup » et une hausse stratosphérique des transactions en avril — un phénomène qui devrait se calmer d’ici la fin du deuxième trimestre.
Le montant global des prêts immobiliers a fait un bond de 14,5% depuis le début de l’année alors que Pékin a ouvert en grand les vannes du crédit |
Le montant global des prêts immobiliers a fait un bond de 14,5% depuis le début de l’année alors que Pékin a ouvert en grand les vannes du crédit. Résultat, il n’a pas fallu deux mois pour que les prix explosent en moyenne de 5% (ce qui, soit dit en passant, annule le gain réalisé sur la TVA).
L’immobilier US, toujours populaire
Les Chinois n’achètent pas qu’en Chine. Cela fait des années que je martèle qu’ils investissent massivement aux Etats-Unis ; les Chinois sont devenus les premiers acheteurs non-résidents dès 2014, devançant les Canadiens fuyant les rigueurs de l’hiver et qui restent les principaux acquéreurs à Miami ou à la Nouvelle Orléans.
Les derniers chiffres de la NAR, l’Association américaine des agents immobiliers, ne font que confirmer la tendance. En effet, les investisseurs chinois représentent désormais plus d’un quart du total des transactions réalisées par des étrangers, dont 75% à 80% sont conclues en cash (soit une proportion inverse des autres acquéreurs).
En termes de capitaux investis, les Chinois écrasent littéralement les Canadiens avec l’acquisition de maisons d’une valeur moyenne de 550 000 $. C’est le double du budget canadien (215 000 $), tandis que les Américains ne déboursent que 205 000 $.
Les Chinois raflent tout ce qu’ils peuvent trouver — présentant du charme et offrant des prestations haut de gamme — à proximité des centres villes ou des universités. Cela qu’il s’agisse de la Californie, de Washington (la capitale mais également l’état, au nord-ouest des Etats-Unis, le plus proche géographiquement de la Chine)… et naturellement de New York, puisque c’est de là qu’ils font gérer leur fortune « expatriée ».
Beaucoup de riches Chinois jouissent d’une double nationalité, ce qui rend la chose légale. Et pour ceux qui souhaitent rester anonymes, il est possible d’acheter de l’immobilier au travers de trusts — qui rendent les dirigeants et actionnaires totalement intraçables — immatriculés dans le Delaware, la Floride ou le Nevada.
Les Chinois — ceux qui appartiennent aux « 1% » — investissent également dans l’immobilier à Londres, Paris, Singapour, Dubaï, etc.
Les Chinois savent-ils quelque chose que nous ignorons ?
Les signes de défiance qu’ils manifestent vis-à-vis de leur mère-patrie lorsqu’il s’agit de préserver leur patrimoine financier devrait alerter nos « experts » sur les risques sous-jacents.
Nous ne manquons pas de le faire régulièrement… mais à chaque fois, nos contradicteurs rétorquent que Pékin détient de quoi éponger toutes les ardoises bancaires et tiendra la baraque « quoi qu’il en coûte », pour paraphraser la BCE. La Chine ne peut se permettre de perdre la face.
Si les rumeurs sont fondées, l’encours de créances douteuses qui plombent les banques chinoises est bien loin des 1,75% |
Nous connaissons par coeur ce principe… mais le problème vient du « quoi qu’il en coûte ». En effet, si les rumeurs sont fondées, l’encours de créances douteuses qui plombent les banques chinoises est bien loin des 1,75% qui suscitent officiellement — depuis lundi — le scepticisme de la PBOC (Popular Bank of China).
Car 1,75% sur un encours estimé à 30 000 milliards de dollars, cela représente 525 milliards de dollars de pertes potentielles. En revanche, si les dettes en déshérence se montent à 5% — ce qui transparaît de nombreuses évaluations provenant de sources chinoises « sérieuses » –, l’ardoise se monterait à 1 500 milliards de dollars. Une telle dette mobiliserait l’équivalent de 50% des réserves chinoises : un sacré paquet de T-Bonds à liquider…
Or si l’on en croit l’évaluation de CLSA (Credit Lyonnais Securities Asia, basé à Hong Kong), le ratio de créances pourries pourrait s’élever de 15% à 19% des encours, soit un montant supérieur à 4 500 milliards de dollars.
Dans ce cas de figure, à côté du « quoi qu’il en coûte » (c’est-à-dire la totalité des réserves en devises chinoises), il va falloir imprimer 1 500 milliards de dollars de plus… et là, c’est Pékin qui a un problème.
Mais comme pour Enron, Bear Stearns, Washington Mutual, Lehman ou AIG, vous pouvez être certain que la thèse officielle jusqu’au jour de la faillite restera que le système bancaire chinois n’a jamais été aussi solide et que l’économie chinoise n’a jamais été aussi prospère.
Peut-être les investisseurs occidentaux font-ils semblant d’y croire, ou peut-être n’ont-ils jamais été aussi naïfs… C’est en tout cas un défaut que ne partagent pas les riches Chinois qui délocalisent massivement leur épargne en Occident et l’investissent dans la pierre, l’or et les pierres précieuses — les très grosses, très pures et très bien taillées, si j’en crois les négociants de saphirs sri-lankais avec lesquels j’ai eu l’occasion de discuter il y a une quinzaine de jours à peine.