** Que doit faire un investisseur en ce début d’Ere de la Prudence ?
– Vendez le risque ; achetez la prudence. Vendez le complexe ; achetez le simple. Vendez les bénéficiaires des dépenses discrétionnaires ; achetez les bénéficiaires des dépenses nécessaires.
– Tenant compte de ces principes, j’aimerais vous suggérer quelques "positions couplées" potentielles. Ce ne sont que quelques idées générales — qui pourraient tout aussi bien venir d’un collègue que du chauffeur de taxi.
– En ce qui concerne la vente, je vous recommande fortement d’éviter les financiers, ou du moins de minimiser votre exposition de ce côté-là. Comme le signalait Chris Mayer l’année dernière, "ce sont les premiers oiseaux qui ont le ver, mais c’est la deuxième souris qui a le fromage". C’est un excellent proverbe.
** Cependant, il me semble qu’il vaut mieux n’être ni un oiseau ni une souris. Il faut être un requin tueur. Il faut être un carnivore et un mangeur opportuniste. Il semble que tout ceux qui ont essayé d’être une souris dans le secteur financier se sont fait couper la tête. Au cours des douze derniers mois, combien de fois "l’argent intelligent" est-il entré dans le secteur financier pour tenter d’y acheter quelque chose ?
– Il existe désormais une longue liste de victimes qui se sont infligées elles-mêmes des blessures. La Bank of America a fait partie des premières. Elle a dépensé deux milliards de dollars pour acheter une partie de Countrywide ; Abu Dhabi a dépensé de l’argent en novembre dernier pour acheter chez Citigroup ; Warburg Pincus a dépensé de l’argent pour acheter chez MBIA ; TPG a acheté chez Washington Mutual… et ce en avril dernier.
– Et au même moment, vous avez des gens comme Bill Miller, le manager de Legg Mason Value Trust, autrefois idolâtré, avec derrière lui une liste d’investissements remarquables sur une longue période. Mais il a moyenné à la baisse dans le secteur financier. Il a acheté et acheté et acheté et acheté…jusqu’au bout, jusqu’à ce que ses actifs soient en souffrance. Il n’a augmenté que onze de ses plus grandes positions au cours du premier trimestre. Et huit d’entre elles étaient des valeurs financières. Une telle stratégie a tout du génie dans un marché haussier.
– Mais dans une Ere de la Prudence, je vous dirais que ce n’est pas du génie. Enfin, ce n’est pas encore du génie. Nous avons tous entendu le proverbe qui dit qu’il faut acheter quand il y a du sang dans les rues — mais ce ne doit pas être votre sang ; ce doit être celui de quelqu’un d’autre.
– En avril, le secrétaire au Trésor US Henry Paulson a affirmé à son tour que le plancher était atteint dans le secteur financier. Voici ce qu’il avait à dire : "je pense que nous sommes plus proches de la fin [de la crise du crédit] que du début".
– Mais de récents mauvais résultats dans le secteur financier nous montrent que le plancher n’est peut-être pas encore atteint. Quasiment personne ne peut acheter une maison aujourd’hui. Mais presque tout le monde meurt d’envie d’acheter les parts des entreprises qui ne peuvent pas vendre les maisons que personne ne peut acheter. Et je pense que c’est tout ce que vous devez savoir en ce qui concerne le secteur financier et le secteur immobilier pour comprendre que nous n’avons probablement pas encore atteint le plancher.
– Ces actions financières seront à nouveau à l’achat un jour, il n’y a aucun doute là-dessus. Et peut-être qu’elles le sont déjà. Je ne suis pas suffisamment arrogant pour dire que je le sais. Il s’agit peut-être de la plus grande opportunité d’achat de tous les temps dans le secteur financier. Cela pourrait l’être. Et je le dis sincèrement. Mais je n’y crois pas.
– Tout investisseur tenté de pêcher dans le secteur financier devrait jeter un œil à un graphique comparant l’Index Nikkei à l’indice bancaire japonais Topix. Vous verrez que le Topix est 80% en dessous de son record en 1989. C’était il y a très très longtemps. Qui plus est, l’index a rebondit sept fois de 40% à 60% pendant cette période. Sept fois les investisseurs ont cru que cet index remontait. Et sept fois ils ont été déçus.
– L’une des raisons à ça, c’est que pendant une période où l’on dénoue des positions à effet de levier, comme celle qu’a traversé le Japon, la valeur disparaît. Les fonds propres souffrent. Il peut arriver beaucoup de bonnes choses aux entreprises ; il peut arriver beaucoup de bonnes choses aux particuliers ; le crédit peut revenir. Cela ne veut pas dire que les capitaux vont se remettre. Ils souffrent. Et ils s’en vont.
– Un jour, les financières seront de bonnes opportunités d’achat. Mais je préfère rater les premiers 20% de la hausse. Et je préfère acheter des choses dans lesquelles je peut entrevoir au moins un signe de rebond. Alors pourquoi ne pas investir dans des entreprises qui font tourner le monde, et qui sont performantes, plutôt que dans des entreprises qui entraînent le monde à la baisse ?