La Chronique Agora

Déficits, dettes et catastrophe

Fractures politiques, batailles technologiques, tarifs douaniers et guerres des monnaies…

L’Occident est peut-être en train d’échouer sur le plan politique, voire même technologique, mais lorsqu’il s’agit de gagner de l’argent, personne ne fait mieux, n’est-ce pas ?

Le marché boursier est en plein essor. Le taux de chômage est faible. Quant à « l’inflation ou la mort » et notre hypothèse, selon laquelle un système qui se nourrit de toujours plus de crédit doit continuer à avoir recours à l’inflation, sous peine de s’effondrer… peut-être avons-nous tort ? Peut-être que l’inflation diminuera sans qu’il soit nécessaire de faire éclater la bulle ?

Tout d’abord, voici dernières nouvelles de MarketsInsider :

« Les obligations s’emballent, alors que le gouvernement américain paie désormais plus que le Viêt Nam ou le Maroc pour emprunter de l’argent.     

 … Les Etats-Unis sont la plus grande économie du monde, avec les plus grandes entreprises, et sont un aimant pour les investisseurs mondiaux. Cette puissance économique inégalée signifie que le gouvernement américain peut emprunter de l’argent beaucoup moins cher que d’autres entités souveraines, en particulier les pays émergents, dont la cote de crédit est plus faible. »

 Aujourd’hui, l’emprunteur le plus puissant du monde – le gouvernement américain – paie plus pour ses prêts que certains des emprunteurs les plus faibles du monde. Les Etats-Unis empruntent de l’argent à 4,5% (obligations à 10 ans), alors que le Viêt Nam ne paie que 2,8%. Ce n’est là qu’une des nombreuses contradictions et énigmes qui minent l’ensemble du monde « occidental ». Rien n’est exactement comme ce qu’il prétend être… ou comme ce qu’il était.

Une alliance du passé

Mais la partie cachée de l’histoire, c’est que le gouvernement américain présente une chaîne quasi ininterrompue de déficits depuis l’administration Carter. La dette nationale s’élève aujourd’hui à 33 500 milliards de dollars et elle continue de croître rapidement.

Les déficits commerciaux des Etats-Unis sont, eux aussi, nés dans les années 1970… et ils n’ont pas diminué depuis. Aujourd’hui, les Etats-Unis doivent au reste du monde 18 000 milliards de dollars de déficits cumulés (au rythme actuel d’environ 1 000 milliards de dollars par an).

L’histoire ne s’arrête pas là.

La Chine a investi beaucoup trop d’argent (dont une grande partie a été empruntée) afin de développer la capacité de production pour des personnes qui ne pouvaient pas se le permettre. Et comme elle a fait travailler de plus en plus de paysans, il en restait de moins en moins à absorber dans ses usines. Il est devenu de plus en plus difficile de maintenir les salaires (et les prix) à un niveau bas.

Lorsque les Etats-Unis ont révélé qu’ils n’hésiteraient pas à « sanctionner » des pays étrangers, et à saisir leurs actifs, la « coentreprise la plus prospère du monde » a commencé à s’effondrer.

Le New York Times est sur le coup :

« Les Américains ont traité la Chine comme la mère de tous les magasins d’usine, achetant des quantités stupéfiantes de produits d’usine à bas prix. Les grandes marques ont exploité la Chine comme ultime moyen de réduire les coûts, en fabriquant leurs produits dans un pays où les salaires sont bas et les syndicats interdits.

 Alors que l’industrie chinoise remplissait les foyers américains de produits électroniques et de meubles, les emplois d’usine ont permis à des centaines de millions de Chinois de sortir de la pauvreté. Les dirigeants chinois ont utilisé le produit des exportations pour acheter des milliers de milliards de dollars d’obligations d’Etat américaines, ce qui a permis de maintenir les coûts d’emprunt des Etats-Unis à un niveau peu élevé, et de continuer à dépenser sans compter.

 L’alliance USA – Chine a cédé à la guerre commerciale, les deux parties imposant des droits de douane élevés et des restrictions sur des exportations essentielles, qu’il s’agisse de technologies de pointe ou de minerais utilisés pour fabriquer des véhicules électriques. »

Déficits, dettes et catastrophes

C’était bien… mais c’est fini. Aujourd’hui, les étrangers ne maintiennent plus leurs prix à la baisse pour les consommateurs américains. La Fed a donc dû cesser d’acheter des obligations et augmenter les taux d’intérêt, afin de ramener l’inflation à son objectif de 2%.

Les Chinois n’achètent pas non plus d’obligations. Axios rapporte :

« En Chine, l’économie et la monnaie s’affaiblissent. Elle pourrait même vendre une partie de ses bons du Trésor pour tenter de soutenir sa monnaie qui s’effondre.

En outre, la détérioration des relations entre les Etats-Unis et la Chine, ainsi que les sanctions américaines contre la Russie après son invasion de l’Ukraine, pourraient donner à Pékin une raison de réduire son exposition au système financier américain. »

Les Etats-Unis continuent d’emprunter d’énormes quantités d’argent. Le taux d’intérêt moyen sur les achats de cartes de crédit à la consommation est désormais supérieur à 21%. Bloomberg rapporte que certains acheteurs d’automobiles paient 29% sur leurs prêts automobiles. Les taux hypothécaires ont baissé, mais ils restent deux fois plus élevés qu’il y a trois ans.

Pendant ce temps, le plus grand emprunteur au monde, le gouvernement fédéral américain, accuse un déficit de 7 milliards de dollars chaque jour, du lundi au vendredi. Et il a quelque 7 600 milliards de dollars d’anciens prêts qu’il doit renouveler au cours des 12 prochains mois. Ses deux principaux bailleurs de fonds – la Chine et la Fed – ont tous deux cessé d’acheter.

Les autorités fédérales ne devraient-elles pas réduire leurs dépenses… et cesser d’emprunter autant d’argent ?

Une politique improvisée

Mais au lieu d’aborder le sujet, le Congrès mène une sorte de politique budgétaire « improvisée » qu’il invente au fur et à mesure. Pas de budget. Pas d’équilibre. Pas de plan à long terme. Et aucun espoir de maîtriser les dépenses excessives. Business Insider présente les dernières actualités :

« Le Congrès vient de trouver le moyen le plus stupide d’éviter un arrêt des activités gouvernementales

Selon un plan soutenu par le président de la Chambre des représentants, Mike Johnson, le gouvernement fédéral serait financé jusqu’à la fin de l’année. Par la suite, les échéances d’arrêt partiel des activités du gouvernement varieraient selon les agences. Par exemple, le financement du Pentagone et des anciens combattants s’arrêterait le 19 janvier. Les fonds destinés aux départements de l’Etat, de la justice et de la santé et des services sociaux seraient prolongés jusqu’au 2 février.

‘C’est la chose la plus folle et la plus stupide dont j’aie jamais entendu parler’, a déclaré la sénatrice démocrate Patty Murray. ‘Il faudrait faire face à la menace constante d’arrêt d’une partie du gouvernement, encore et encore’, a déclaré la sénatrice Susan Collins. »

Dans ces conditions, la question n’est pas d’essayer de comprendre pourquoi les coûts d’emprunt américains sont si élevés… mais pourquoi ils ne le sont pas davantage.

Mais il ne s’agit probablement que d’une question de temps avant que le coût réel de l’emprunt n’augmente encore plus.

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