La Chronique Agora

Confiance, normalité et poulets

** La grande question, aujourd’hui, est une question de confiance. Quelle confiance accordez-vous aux autorités ? Elles ont pour but de faire flamber l’inflation. Elles ont le combustible. Elles ont les allumettes. Elles ont tout arrosé d’essence. Mais pour l’instant, l’économie mondiale attend encore… en frissonnant… espérant une étincelle.

* La semaine dernière, le Congrès américain a versé 350 milliards de dollars supplémentaires de fonds de renflouement. Parallèlement, Barack Obama et les démocrates ont annoncé leur propre programme de relance/renflouement — avec une facture de 825 milliards de dollars.

* Noël est passé… mais le plan d’Obama maintient le moral au plus haut à Washington. Jamais encore dans l’histoire les autorités n’avaient eu tant d’argent à partager… de l’argent qu’elles n’ont même pas encore volé !

* Le programme inclut "d’immenses augmentations des dépenses fédérales pour l’éducation, l’aide aux états en matières de coûts Medicaid, des augmentations temporaires des allocations chômage et un vaste assortiment de projets de travaux publics destinés à créer des emplois", rapporte le International Herald Tribune.

* En Europe, la BCE a baissé ses taux. Le International Herald Tribune en parle également :

* "Alarmée par la rapidité du ralentissement économique, la Banque centrale européenne a baissé jeudi son taux directeur d’un demi-point, à 2%, en laissant entendre que le taux pourrait encore baisser, passant sous ce qui est déjà le niveau le plus bas de son histoire".

* "Les données ont surpris tout le monde par leur négativité", a déclaré un économiste surveillant la BCE.

* Mais tout ce petit bois supplémentaire suffira-t-il à démarrer une flambée ? Où en est votre confiance, cher lecteur ?

* "Les conditions économiques dans le monde sont horribles et iront en empirant en 2009 malgré toutes les mesures fiscales et monétaires actuellement mises en place pour ‘sauver’ le système", écrit notre vieil ami Marc Faber. "En fait, je pense qu’aux Etats-Unis, les plans de relance et divers renflouements mis en place par la Fed et le Trésor rendront les choses bien pires que si on avait laissé le marché libre faire les ajustements nécessaires".

* Les autorités réussiront peut-être à allumer un feu, mais ce ne sera pas forcément le sympathique feu de cheminée pétillant espéré. Le système des investisseurs et propriétaires croulant sous les dettes a pris fin. Tout ce que les dirigeants peuvent faire, c’est gonfler une nouvelle bulle — de dette publique.

* Quel effet cela aura-t-il sur l’économie… ou sur les marchés de l’investissement… personne ne le sait. Jamais encore la devise de réserve mondiale n’avait été constituée uniquement de papier. Et jamais encore ses gardiens n’avaient été si pressés d’y mettre le feu.

** Qu’est-ce qui est normal ?

* En observant la longue histoire du marché boursier, nous notons qu’il n’y a rien d’anormal aux cours actuel. Au contraire, ils sont plus "normaux" que les prix de l’an dernier à la même époque.

* Notre collègue Simone Wapler, rédactrice en chef du magazine MoneyWeek, nous a transmis un graphique retraçant les cours de la bourse française depuis 1900. Avec des prix ajustés à l’inflation, nous voyons quelque chose qui ressemble aux Alpes. Il y a des pics et des vallées. Le schéma est irrégulier… apparemment imprévisible. Mais aucune montagne n’a qu’un seul versant. Chaque fois que les prix ont grimpé… ils ont ensuite baissé.

* Le CAC 40 a grimpé durant le boom des années 20… puis s’est effondré dans les années 30. Curieusement, il a atteint de nouveaux sommets sous l’Occupation, dans les années 40, puis a chuté dans les années 50. Le plus haut suivant s’est produit durant les années De Gaulle, au début des années 60. Puis les prix ont chuté durant les deux décennies qui ont suivi. Tout comme aux Etats-Unis, le marché haussier le plus récent a commencé en 1982 et s’est effondré l’an dernier. Mais même après la récente débâcle boursière, les actions en France sont simplement de retour à leurs niveaux moyens. Les chiffres montrent qu’un investisseur ayant acheté des actions en 1900 aurait pu les détenir durant 108 ans sans gagner un seul centime de plus-value.

* Normalement, on ne gagne pas d’argent avec la hausse des cours. On en gagne grâce aux dividendes.

** Simone était ingénieur en aéronautique, autrefois ; elle a travaillé à l’élaboration de l’Airbus — l’avion qui a été forcé d’amerrir sur l’Hudson la semaine dernière.

* "C’est plus sûr de faire un atterrissage d’urgence sur l’eau", nous a-t-elle expliqué. "Il y a moins de risques d’incendie. Et l’avion met du temps à couler… donc on a le temps de sortir".

* "Quand on atterrit ou qu’on décolle, il y a toujours le risque que des oiseaux entrent dans les moteurs. Quand j’étais chez Airbus, on faisait des tests exhaustifs… durant lesquels on jetait des poulets dans les moteurs des turbines pour voir combien ils pouvaient en supporter. Il fallait que ce soient des poulets élevés en plein air… les autres sont trop mous. Le problème, avec les oiseaux, c’est qu’ils ont tendance à s’agglutiner… mais je ne me souviens pas combien de poulets une turbine d’Airbus pouvait supporter avant de caler".

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