▪ Les nouvelles économiques ne sont pas bonnes en ce moment, mais les choses sont plus encourageantes dans le commerce mondial. Aux Etats-Unis, un secteur va profiter en priorité de bénéfices exceptionnels sur les exportations, cette année. Et ce secteur, c’est l’agriculture.
En 2009, le commerce mondial a pris une grande claque suite à la crise financière. Les exportations mondiales ont chuté de 12%. Les gouvernements ont essayé de protéger leurs équipes nationales ; s’en est suivi une vague de hausse des tarifs douaniers et de mesures protectionnistes. Il s’est passé la même chose durant la Grande Dépression, lorsque le Smoot-Hawley Tariff Act a augmenté les tarifs douaniers sur plus de 900 produits.
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Résultat, le commerce mondial a plongé de 25% pendant les premières années de la Grande Dépression. Mais ce n’est pas ce qu’il s’est passé cette fois. En fait, les économies émergentes du monde entier exportent et importent déjà plus qu’elles ne le faisaient avant la crise de 2008.
▪ Aux Etats-Unis, le grand gagnant, c’est l’agriculture. Les fermiers américains ont vu leurs exportations atteindre le niveau record de 14 milliards de dollars cette année. La vague de chaleur qui a brûlé les cultures européennes (en particulier les cultures russes) y a contribué. Mais même avant la sécheresse, en seulement quatre mois cette année, les Etats-Unis ont joui d’un excédent commercial de quatre milliards de dollars dans le secteur de l’agriculture. Depuis des années, les Etats-Unis sont les plus gros exportateurs de maïs, de blé et de soja. Et ils sont les principaux exportateurs de beaucoup d’autres produits agricoles.
Aujourd’hui, les agriculteurs américains tirent profit de la demande des marchés émergents, en particulier l’Asie. La Chine a essayé de devenir autonome du point de vue de la nourriture. Mais il y a encore trop d’obstacles, à commencer par une offre en terres arables qui diminue à vue d’oeil et des pénuries d’eau. La ferme chinoise moyenne ne fait pas plus d’1,6 hectare. Ce qui empêche les économies d’échelle que font les grosses exploitations.
Quoi qu’il en soit, les fermiers américains envoient de plus en plus de produits vers l’Extrême-Orient. Il n’est donc pas surprenant que le premier dépôt d’exportations construit par les Américains en 25 ans ne soit pas au bord du golfe du Mexique, mais sur la Colombus River, dans l’Etat de Washington, à une centaine de kilomètres de l’océan Pacifique. Le nouveau terminal céréalier du port de Longview va brasser huit millions de tonnes par an. (Le port de Louisiane est toujours le plus gros centre d’exportation céréalière en Amérique du Nord, même si la Californie a récemment dépassé la Louisiane en matière d’envois de coton américain).
Nous allons avoir besoin de plus de dépôts comme celui du nouveau port de Longview. Les infrastructures américaines ont eu du mal à répondre à l’augmentation des exportations agricoles. Par exemple, aux abords de Seattle, 80 containers pleins de pois secs sont restés pendant trois semaines sur les rails en attendant qu’un navire les embarque.
Ce n’est pas un exemple isolé. Un exportateur de soja du Minnesota pourrait normalement envoyer 40 tonnes de fèves en Malaisie en 15 à 20 jours. Avec les embouteillages récents, il lui aurait fallu 60 jours. On entend plein d’histoires de ce genre, sur des noisettes ou des fèves de soja coincées dans des embouteillages de transport pendant plusieurs semaines.
▪ Les Etats-Unis ne sont pas habitués à une telle activité exportatrice. Comme l’a expliqué le Wall Street Journal, "les structure commerciales des Etats-Unis se sont déséquilibrées, avec une énorme capacité d’importation de produits, mais une capacité d’exportation très atténuée. Des tonnes de céréales ou de carton ondulé qui quittaient les Etats-Unis ont dû faire de la place aux DVD et aux jouets qui entraient sur le territoire".
C’est bien le problème. Depuis trop longtemps, l’économie américaine s’est basée sur les petits plaisirs de ses consommateurs frénétiques. Il existe trop de magasins qui vendent des gadgets inutiles, trop de maisons que les gens ne peuvent pas acheter, et trop de dettes sur l’ensemble de ces choses. Cette part de l’économie a pris des proportions grotesques, encouragée par les facilités de crédit.
Mais sous tout ça, il existe encore ce bon vieux monde où l’on fabrique des choses. Dans mon dernier numéro de Capital & Crisis, j’ai écrit un article sur la puissance surprenante de la manufacture américaine. L’agriculture américaine est également une étoile qui brille bien dans le firmament des Etats-Unis, et c’est un secteur où il faut investir.
Tant que les marchés de l’exportation restent ouverts, les fermiers américains devraient vivre une belle année.
▪ En tant qu’investissement à long terme, la société Lindsay pourrait tirer de bons bénéfices puisque les agriculteurs vont dépenser de l’argent pour les équipements nécessaires à l’irrigation. Le secteur est attirant, étant donné que la machinerie participe grandement aux rendements et rend l’utilisation de l’eau encore plus efficace.
J’aime aussi le secteur agricole non américain, parce que les prix élevés des récoltes et l’augmentation de la demande en nourriture sont de bon augure pour les agriculteurs du monde entier. Au Canada, Viterra est un bon investissement à long terme. Il devrait remonter après que les pluies torrentielles dans l’ouest du Canada ont abîmé la production céréalière. En Chine, Migao fabrique des engrais pour les cultures haut de gamme comme les fruits, les légumes et le tabac. Sa capacité augmente, et si l’on en croit les financiers, il devrait rapporter de bons bénéfices.
Ce ne sont-là qu’une petite partie d’entre eux. Il en existe beaucoup d’autres. Le secteur de la production de nourriture devrait demeurer un secteur intéressant.