Depuis 1971, les salaires horaires ne progressent plus, le prix du temps baisse tandis que les prix augmentent. La politique a corrompu l’économie.
Hier, nous avons examiné ce qu’est devenue la république américaine : un vaste marigot de fainéants, de profiteurs, de compères et d’initiés… cherchant tous à piquer le steak dans l’assiette de l’autre.
Les politiciens et les hauts fonctionnaires ne se retirent plus dans leurs hameaux et leurs fermes une fois terminé leur mandat. Ils se lancent plutôt dans une « post-carrière » lucrative comme consultants et lobbyistes… complotant avec leurs autorités pour obtenir des faveurs pour leurs clients.
Mais les initiés ne cherchent-ils pas toujours à exploiter les non-initiés ? Qu’y a-t-il de neuf là-dedans ?
Infiltration toxique dans les eaux souterraines
Généralement, mieux vaut ignorer la politique. Mais il y a des moments où, comme les émanations d’une citerne rouillée dans un garage abandonné, elle s’infiltre dans les eaux souterraines et empoisonne le sol.
Nous sommes d’avis que nous vivons l’un de ces moments. Parce que le Marigot est devenu si profond… si vaste… et si toxique… qu’il met tout le reste en danger.
Nous voyons aujourd’hui comment nous en sommes arrivés là.
Commençons par une nouvelle stupéfiante de la part de notre collègue David Stockman : le travailleur américain moyen n’a pas enregistré la moindre hausse de salaire sur toute la période de 47 ans qui a débuté avec l’introduction de la nouvelle monnaie en 1971.
Il est bien connu que le salaire horaire réel n’est pas plus élevé qu’au milieu des années 1970.
Mais à présent, les chiffres montrent que cette période de croissance zéro remonte à 1971… et — selon les chiffres frauduleusement précis du Bureau américain des statistiques de l’emploi (BLS) — que l’augmentation annuelle des salaires réels se monte à 0,01%.
Ce n’est pas 1%. Ce n’est pas même un dixième de pourcent. C’est un centième de pourcent ! Rien, en d’autres termes.
Même cela surestime la progression. La plupart des gens n’ont qu’un seul actif réel — leur temps. Ils le vendent à l’heure ou à la semaine. Les chiffres montrent que leur temps ne vaut pas plus aujourd’hui qu’il y a près d’un demi-siècle.
Nous nous arrêtons net. Nous retenons notre souffle. Comment est-ce possible ?
Comment huit siècles de progrès, depuis les profondeurs de l’époque médiévale à la fin de l’administration Johnson, ont-ils soudain pris fin… alors même que la situation semblait la plus prometteuse ?
Aujourd’hui, il y a bien plus de diplômés, d’ingénieurs, de brevets, de technologie et de gens partout dans le monde qui suent, bossent et triment pour augmenter la valeur de leur temps.
Comment peuvent-ils tous échouer aussi lamentablement ?
Le prix du temps baisse inexorablement
Pour commencer, il s’agit d’une moyenne — si bien que quelques salaires élevés font remonter le niveau malgré les nombreux salaires bas.
Ensuite, au lieu d’examiner l’argent, qui subit des ajustements frauduleux de la part du BLS, regardons le temps.
En 1971, on pouvait acheter une nouvelle camionnette Ford F-150 pour 2 500 $. A 4 $ de l’heure, il fallait 625 heures pour acheter le véhicule.
Le modèle actuel coûte 30 000 $, et le salaire horaire moyen est de 26 $. Un salarié doit donc travailler 1 154 heures pour s’offrir un F-150 standard. Autrement dit, il doit vendre près de deux fois autant de son temps pour avoir une voiture.
Attendez une minute, disent les autorités. La camionnette actuelle n’est pas la même que celle de 1971. La technologie s’est améliorée. Celle-ci a un GPS, le Bluetooth et des sièges chauffants. Donc vous obtenez deux fois autant.
Certes, nous sommes d’accord, la technologie s’est améliorée. Mais la voiture n’est pas deux fois meilleure qu’à l’époque. Et sa tâche fondamentale n’a pas changé : transporter des choses d’un point A à un point B.
Peu importe, de toute façon. Notre homme a besoin d’une camionnette, et elle coûte désormais 30 000 $.
Ensuite, puisque les autorités ont découragé l’épargne avec des taux d’intérêt artificiellement bas, il y a peu de chances qu’il ait 30 000 $ sous la main.
Il est donc forcé d’emprunter. Son prêt, avec intérêt, entre alors dans l’économie financiarisée pour être découpé en tranches, réinvesti et hypothéqué, jusqu’à ce que les brasseurs d’argent gagnent plus sur le prêt que Ford sur la camionnette.
Et voilà que notre pauvre travailleur est non seulement forcé de vendre deux fois plus de son temps pour acheter une camionnette… mais son temps est désormais un actif « sous-jacent » qui soutient non seulement l’industrie automobile mais aussi l’industrie financière.
C’est bien là le maillon faible de tout ce système insensé : il repose sur un actif limité dont la valeur décline.
L’industrie financière prête au travailleur au taux de 5,5%. Sur un crédit pour un F-150 à 30 000 $, cela donne au prêteur un profit brut de 5 290 $.
Le pauvre homme, quant à lui, doit verser 490 $ par mois — soit 19 heures de travail — pendant six ans. En tout, il travaillera 1 356 heures sur une période de six ans pour obtenir plus ou moins le même véhicule que ce qu’il aurait eu pour 625 heures de son temps en 1971.
On peut faire le même calcul pour l’immobilier. Un Américain moyen pouvait acheter une maison moyenne 24 000 $ en 1971. Aujourd’hui, il paye 371 000 $. Evaluée en termes de temps, la maison coûtait 6 000 heures en 1971 ; elle coûte 14 269 heures aujourd’hui.
Est-ce là un progrès ? Pas selon nous. Le temps, c’est la vie. C’est tout ce que nous avons. Il faut plus de sept ans de travail à la personne moyenne pour acheter une maison moyenne aujourd’hui — soit quatre ans de plus qu’en 1971.
Pourquoi le temps est-il aujourd’hui bradé ?
Que s’est-il passé ?
La réponse simple : une gigantesque quantité de temps a inondé le marché.
Près d’un milliard de personnes en Chine, Inde et Asie du sud-est — prêtes à travailler pour 1 $ à 5 $ par jour — sont entrées dans l’économie mondiale. Naturellement, la concurrence a plombé le coût brut du temps.
Cela a également planté le décor pour Donald J. Trump, qui affirme qu’il faut « construire un mur » et augmenter les taxes douanières pour empêcher que ces gens et leurs produits entrent sur le sol américain.
Attendez. Ce n’est pas aussi simple. On ne s’enrichit pas en excluant des gens qui produisent mieux, plus vite ou moins cher que vous.
On s’enrichit en faisant ce qu’on sait mieux faire que les autres… et en l’échangeant contre ce qu’on ne fait pas.
Par ailleurs, la main-d’oeuvre étrangère bon marché aurait dû entraîner la baisse du coût des biens et des services importés de l’étranger.
Même si son propre salaire stagnait, le travailleur américain moyen aurait dû voir une augmentation de son niveau de vie réel. En tenant compte de l’inflation négative (déflation)… son salaire réel aurait dû grimper.
Cela n’a pas été le cas… parce qu’il se passait autre chose.
Le Marigot s’étendait. L’économie US devenait moins productive et plus « financiarisée »… grouillant de compères, zombies et arnaqueurs gagnant-perdant.
Les initiés et les riches ont navigué dans le Marigot et continué à gagner de l’argent. Mais le salarié moyen de l’économie réelle a coulé.
Nous y reviendrons… lundi.
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