La Chronique Agora

Comme un petit goût de dot.com sur le secteur bancaire

** "Pris en tenaille entre un système bancaire et une économie fragiles et la hausse de l’inflation", écrit James Saft, "Bernanke et autres décideurs de la Fed semblent être arrivés à une stratégie consistant à vanter les mérites du dollar pour le faire grimper tout en minimisant l’inflation".

* "Mais les discours ne sont efficaces que si votre public juge que vous avez les moyens et la volonté de les appliquer".

* Si l’on se base sur les séances boursières de ces derniers jours, l’équipe Bernanke aurait aussi bien fait de se taire. L’or et le pétrole agissent comme s’ils prévoyaient des taux d’inflation plus élevés, non plus bas. Et le dollar perd de la valeur quotidiennement — même s’il ne s’est pas encore complètement effondré.

* La dernière partie de cette phrase mérite qu’on s’y attarde. Le dollar a chuté par rapport à d’autres grandes devises. Par rapport à l’euro, par exemple, il vaut à peine la moitié de ce qu’il était à son sommet, atteint peu après le lancement de l’euro. Par rapport à l’or, il ne vaut qu’un tiers de sa valeur d’il y a 10 ans. Et par rapport au pétrole… la perte a été plus grande encore — il a baissé de 80% environ.

* Et pourtant, le dollar ne s’est pas encore effondré…

* Pour vous donner une idée de ce à quoi ressemble un effondrement, nous regardons par la fenêtre. Le marché immobilier britannique semblait défier les faiseurs de tendance californiens. Alors que la valeur des maisons américaines chutait, les prix anglais restaient obstinément élevés.

* "C’est une petite île", expliquaient les analystes. "On a beaucoup d’immigration", continuaient-ils. "Nous aimons être propriétaires de nos propres maison", jugea-t-on. L’une de nos collègues, lors d’un petit sondage dans les bureaux, déclara : "l’immobilier grimpe toujours en Grande-Bretagne".

* Il grimpe jusqu’à ce qu’il baisse. Et maintenant, il baisse, disent les journaux londoniens. Les constructeurs immobiliers s’effondrent. Le plus grand d’entre eux au Royaume-Unis, Taylor Wimpey, a chuté à pic cette semaine après avoir échoué à lever les fonds dont il avait besoin.

* Vous voulez voir un effondrement ? Regardez ce qui s’est passé à Wall Street cette année. Ces six derniers mois, Citigroup a perdu 43% de sa valeur. Merrill Lynch a baissé de 40%. Et Lehman Bros. a chuté de 68%. Selon le Wall Street Journal, les valeurs bancaires commencent à ressembler aux dot.com dans les années 2000. La grande question est de savoir s’il s’agit juste de corrections temporaires — causées par la panique des pertes subprime et du resserrement du crédit… ou s’il s’agit de l’éclatement d’une bulle de style dot.com. Si c’est le cas, les sociétés de la finance ont encore de la marge à la baisse et ne se remettront pas avant des années et des années.

** Mais revenons-en au dollar.

* Dans les coffres des diverses banques centrales du monde entier reposent environ 4 800 milliards de dollars de réserves en devises étrangères — fruits des ventes de pétrole et de gadgets, en majeure partie à des consommateurs américains. Et comme les oranges ou les papayes… ces dollars ont une date d’expiration.

* Nous n’avons pas été invité à voir ces coffres, mais nous ne doutons pas de ce que nous y trouverions : d’immenses piles de billets verts. Les Américains ont été les plus gros dépensiers au monde ces 20 dernières années. Naturellement, c’est leur argent qui représente la majeure partie de ces devises de réserve étrangères. C’est aussi leur argent qui pose désormais le plus gros problème — non seulement pour les gens qui l’ont expédié à l’étranger, mais aussi pour ceux qui l’ont dans leurs coffres.

* Selon nos calculs — très grossiers — le total de ces réserves atteindra les 5 000 milliards de dollars avant la fin de l’année calendaire. Et là, ça fera une vraie somme. Mais c’est bien là le problème : la somme est véritable… mais pas l’argent.

* Ce sont des dollars, rappelez-vous, une devise basée sur la confiance. Ces mêmes dollars ont perdu approximativement 97% de leur valeur sur les cent dernières années… et, selon les statisticiens payés par le gouvernement US… en perdent aujourd’hui 4% par an.

* Si l’on en croit les ronds-de-cuir américains, et si l’on part du principe que tous ces 5 000 milliards de dollars étaient investis dans des bons du Trésor US à 91 jours, qui ont actuellement un rendement de 1,63%, les détenteurs de toute cette oseille perdent environ 120 milliards de dollars par an. Les fruits commencent à sentir un peu fort, en d’autres termes.

* Mais ça pourrait être bien pire. Si l’euro, l’or, le pétrole ou les matières premières grimpent sévèrement, les détenteurs de dollars étrangers commenceront à considérer qu’on les prend pour des pigeons. Quelques-uns pourrait abandonner le dollar et en arroser les marchés mondiaux en grande quantités. Cela pourrait causer une chute soudaine de la valeur du billet vert… poussant d’autres détenteurs à se précipiter vers la sortie. L’effondrement du dollar mettrait à bas tout le système monétaire post-71… et précipiterait le monde dans des ennuis bien plus sérieux.

* De nombreux détenteurs de dollars commencent déjà à avoir des fourmis dans les jambes. Bon nombre cherchent à alléger leur charge. Certains échangent des billets verts contre de la nourriture…
 
* ("Les pays constituant des réserves font grimper les prix de l’alimentaire plus haut encore", titrait le New York Times)

* Quelques-uns ont aidé à recapitaliser les banques. Et Abu Dhabi vient d’échanger 900 millions de dollars contre l’Empire State Building. Il ne reste plus que 4 700 milliards de dollars à caser.

* Par comparaison, le stock mondial d’or extrait ne vaut qu’environ 4 200 milliards de dollars…
[NDLR : Pour tout comprendre des raisons de l’inéluctable effondrement du dollar — et découvrir les moyens d’en profiter, c’est très simple : il suffit de suivre les conseils d’Addison Wiggin.]

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile