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Le combat truqué de la Fed

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Alors que les pertes s’accumulent et que les coups pleuvent, la Fed va-t-elle se coucher ?

Vendredi dernier, nous avons estimé que la Fed n’irait pas « assez loin » dans sa lutte contre l’inflation. Aujourd’hui, nous vous donnons un indice pour comprendre pourquoi : le combat est truqué.

Pourquoi ?

Parce que l’inflation n’est pas un phénomène naturel. C’est la politique du gouvernement qui en est responsable. Les autorités voulaient plus d’argent. Ni les contribuables ni les marchés du crédit n’étaient prêts à le fournir. La solution était simple – l’inflation. La Fed a « imprimé » les fonds nécessaires. Ils ont été dépensés. Les coûts réels ont été repoussés dans l’avenir. Et cette année, l’avenir a fait son apparition.

Au cours des 12 derniers mois, les intérêts de la dette fédérale ont dépassé 700 Mds$ par an. Comme la Fed augmente les taux d’intérêt, ce chiffre dépassera bientôt le coût de la sécurité sociale et des dépenses du Pentagone – combinés. Et l’inflation a atteint des sommets inégalés depuis 40 ans.

Que faire ? Il n’y a que deux choix. Augmenter l’inflation. Ou planter l’économie et faire défaut.

La pression monte

La Fed se dirige vers le défaut de paiement, et la pression pour changer de cap se fait déjà ressentir dans la presse grand public. Le LA Times rapporte :

« Des signes douloureux montrent que la Fed va trop loin et trop vite avec ses augmentations de taux agressives.    

Le danger actuel… n’est pas tant que les mesures actuelles et prévues ne parviennent pas à juguler l’inflation. C’est qu’elles aillent collectivement trop loin et entraînent l’économie mondiale dans une contraction inutilement dure. »

Et voici ce qu’en dit MarketWatch :

« ‘Les marchés financiers jettent l’éponge’ : les craintes de récession s’intensifient alors que la Fed freine l’économie.

La probabilité d’une forte hausse des taux d’intérêt a fait pencher la balance vers une nouvelle récession d’ici un an, selon les économistes. Pourtant, certains espèrent encore que les États-Unis pourront se débrouiller avec une période de croissance lente au lieu d’un déclin pur et simple.

Dans un geste largement attendu par les marchés financiers, la Réserve fédérale a orchestré une nouvelle hausse gigantesque des taux d’intérêt américains [fin septembre]. Ce qui était inattendu, c’était la prévision agressive de la banque centrale, qui vise des taux encore plus élevés dans l’année à venir.

 Cette prévision surprise a déclenché une baisse importante du marché boursier, les investisseurs s’étant rendu compte que la Fed est déterminée à étouffer l’inflation américaine la plus élevée depuis 40 ans, quel qu’en soit le prix. »

Jeter l’éponge ? Alors que les actions ne font que basculer en territoire de marché baissier ?

Il y aura beaucoup d’éponges à jeter plus tard. En attendant, nous avons encore un long chemin à parcourir. Alors, la Fed va « pivoter » comme les pointes d’une ballerine. Les médias célébreront le grand homme ; un autre « grand Paul » (Volcker), diront-ils. Les marchés s’envoleront à la suite de cette bonne nouvelle.

Mais ce n’est pas pour tout de suite. Pas encore. Cela nécessitera une urgence ; Jay Powell n’en a pas provoqué… encore.

Une période des plus remarquables

Dans cette farce, notre héros – Jerome Powell – doit souffrir… il doit surmonter de grands défis… il doit persévérer contre le mal et des chances écrasantes. Alors seulement, il pourra annoncer sa grande victoire sur l’inflation… et retourner gonfler l’économie.

Au cours de la période la plus remarquable de l’histoire financière américaine, la dette publique de l’Amérique est passée de seulement 23 000 Mds$ en 2020 à près de 31 000 Mds$ aujourd’hui. Ces 8 000 Mds$ de dépenses supplémentaires auraient dû stimuler l’économie. Au lieu de cela, ils ont été dilapidés dans des guerres et des mesures de stimulation… et sont maintenant rappelés – comme un billet taché de vin d’un bordel de luxe – uniquement en tant que dette.

La Fed a fait la fête. Nous l’avons mesuré dans nos précédentes chroniques : 50 000 Mds$ de prix d’actifs au-dessus de la « normale » et 47 000 Mds$ d’excès de dette (au-dessus du niveau traditionnel de 180% du PIB).

Le fait que ces deux chiffres soient presque égaux ne peut pas être une coïncidence. Au cours des quatre dernières décennies, il y a eu peu de création de richesse réelle aux États-Unis. Ce n’est presque que de la dette.

Maintenant, revenir à la normale signifie effacer ces deux chiffres.

La fausse pièce de la Fed

Et c’est là que réside la tension dramatique au cœur de notre histoire. La Fed ne peut pas effacer les tâches de la dette sans effacer aussi le crédit. Les deux sont liés – actif et passif – les deux faces de la fausse pièce de la Fed.

La Fed a inondé l’économie de 8 000 Mds$ de fausse monnaie, et de milliers de milliards de dollars supplémentaires de faux crédits offerts à de faux taux d’intérêt. Tout cet « argent » a créé une fausse richesse… en actions, obligations et biens immobiliers. Mais il a aussi créé un excès de dette de presque le même montant.

Maintenant, les propriétaires de cette richesse – ce n’est pas non plus une coïncidence ! – se trouvent être les mêmes personnes qui décident des politiques menées. Ils sont peut-être désespérés de se débarrasser de la dette, mais pas de la richesse. Fausse ou pas, ils l’apprécient.

Peuvent-ils se débarrasser de la dette et garder la richesse ?

Comment cela va-t-il se passer ?

Ce n’est pas très prometteur. Lorsque la Fed augmente les taux, les prix des actifs baissent. Une maison aurait pu se vendre 400 000 $ à une personne ayant un emprunt immobilier à rembourser avec un taux d’intérêt de 3 %. Maintenant, avec des taux d’intérêt approchant les 7%, combien vaut cette même maison ? 300 000 $ ? 200 000 ?

La valeur de la garantie diminue, tout comme la valeur de l’argent prêté en contrepartie. La dette existante – obligations, billets, dette hypothécaire… même la dette du gouvernement américain – perd de sa valeur. Qui voudra d’une obligation américaine à 10 ans datant de 2020 et portant un coupon de 1%… alors qu’il peut en acheter une nouvelle qui rapporte 4% ? Qui va prêter à Wall Street quand il peut obtenir 3% sur un compte d’épargne protégé par la FDIC ?

Nous ne le savons pas. Mais nous sommes sûrs qu’il y a un siège vide au Congrès qui l’attend quelque part.

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