La Chronique Agora

Chine : la PBOC est la banque centrale la plus activiste au monde

▪ Que le CAC 40 finisse ou non au-dessus des 5 000 points vendredi… cela ne changera rien à un fait : Paris et les places européennes ont, dès vendredi dernier, battu le record historique de hausse lors d’un mois d’octobre, avec un score supérieur à +10%.

La moitié de ces 10% a été engrangée grâce au "verbe magique" de Mario Draghi jeudi dernier, lorsqu’il a renié sa parole et jeté par-dessus les moulins l’engagement de la BCE de ne plus modifier ses taux directeurs — notamment le taux de prise en pension, déjà négatif de 0,2% depuis janvier dernier.

Cette valeur est en train de dessiner notre ville et notre société de demain. En deux mots, elle est en train de changer le monde !

Voici comment…

Pour être tout à fait juste, 1,5% sur les 5% gagnés jeudi et vendredi sont à mettre au crédit de la PBOC, la banque centrale chinoise. Elle a mis moins de 16 heures à surenchérir sur la BCE en prenant des mesures concrètes — alors que la BCE s’est contentée de promettre… ce que personne ne lui demandait la semaine dernière.

Les marchés ont exulté lorsqu’ils ont été avertis d’une sixième réduction de 25 points des taux en 12 mois en Chine, assortie d’une nouvelle baisse du taux de dépôt et d’une réduction de 50 points des réserves obligatoires des banques chinoise.

La POBC a dévoilé ses 63ème, 64ème et 65ème mesures de soutien monétaire pour cette seule année 2015

Oui, il y avait vraiment de quoi faire des sauts périlleux au milieu d’un lâcher de serpentins et de confettis puisque la POBC a dévoilé ses 63ème, 64ème et 65ème mesures de soutien monétaire pour cette seule année 2015.

Vous aurez vite fait le calcul : cela fait une moyenne de sept par mois !

Ce qui signifie qu’avant la dévaluation fin août, la POBC avait déjà annoncé pas moins de 50 mesures d’assouplissement monétaire, qu’il s’agisse de baisses de taux, d’injections monétaires dans le système bancaire chinois (officiel ou shadow banking), de soutien plus ou moins ciblé au profit d’un secteur économique (l’immobilier de façon récurrente), etc.

Et quel impact favorable les 50 premières actions de la POBC — la banque centrale la plus frénétique sur la planète Terre — ont-elles eu sur la croissance chinoise, sur l’inflation ?

Le trafic de conteneurs dans les ports chinois ralentit… La consommation d’énergie — et de charbon en particulier — par l’industrie poursuit sa contraction… Les importations et exportations reculent à un rythme de plus en plus spectaculaire (même si une embellie est attendue avec les chiffres de septembre et les entrées de commandes pour Noël et la livraison des premiers iPhones 6S).

▪ Les Chinois ne consomment plus… du moins pour certains !
L’espoir d’un "coup de pompe" passager dans le secteur manufacturier, et lui seul, est hélas peu probable. La consommation des ménages ne prend pas le relais ; la meilleure preuve, c’est la chute des importations (-20% au mois d’août).

Certes, il y a la variable matières premières, qui est prépondérante… mais la demande intérieure ralentit également. L’inégalité de distribution de pouvoir d’achat plombe la consommation.

Les Chinois gagnent plus de yuans chaque mois (la masse monétaire augmente) mais cet argent permet d’acheter moins de choses pour une large majorité de la population. Et ceux qui ont du pouvoir d’achat vont le dépenser à Tokyo, Kobe, Osaka, Dubaï, Los Angeles, Oxford Street, la Cinquième Avenue, le Printemps et les Galeries Lafayette ou le Bon Marché…

Les centres commerciaux chinois ferment les uns après les autres faute de clients solvables pour des biens de valeur intermédiaire

Les riches Chinois vont faire leur shopping en détaxe hors de leurs frontières. Les centres commerciaux chinois ferment les uns après les autres faute de clients solvables pour des biens de valeur intermédiaire.

Ils continuent en revanche d’acheter des Ferrari. L’introduction en bourse à 10 milliards de dollars de la firme au cheval cabré interpelle certainement beaucoup plus les oligarques chinois que les riches Milanais accablés de taxes sur les produits de luxe depuis 2010, dans le cadre du redressement des comptes publics.

Pour prendre la pleine mesure de ce qu’est devenu l’ultra-richesse en Chine, sachez simplement qu’un couple d’acteurs chinois (Angela Yeung et son compatriote Huang Xiaoming) a dépensé 30 millions de dollars cet été pour son mariage — cadeaux aux invités et alliances compris. Cela en fait la noce privée (par opposition à un mariage royal prélevé sur le budget d’une famille régnante bénéficiant d’une dotation de l’Etat) la plus chère de l’histoire.

Enfin, nous le supposons car le budget des mariages des monarques du Golfe sont tenus secrets… Cependant, ils ne donnent pas lieu à des festivités où les meilleurs DJs du monde sont invités à faire danser des foules abreuvées du meilleur cognac et déshabillées (vu les robes aux décolletés vertigineux arborées lors de ces noces) par les plus grands couturiers, au milieu d’un décor de château réalisé en hologrammes.

Ces fastes hollywoodiens ne sauraient nous faire oublier que le taux de créances douteuses à fait un bond de 30% au cours des six premiers mois de l’année et que l’effondrement des valeurs minières chinoises (surtout dans le secteur des charbonnages) prend l’allure d’un film catastrophe.

Vous commencez à mieux saisir les motifs de l’hyperactivité de la PBOC depuis novembre 2014 : l’économie chinoise, elle, n’est pas à la noce !

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