La Chronique Agora

Chine-Japon : des relations qui en disent long… sur l’état de l’économie

▪ S’il y a bien un organisme qui égale la Fed dans son inefficacité sur le long terme et dans ses actions absurdes, c’est la Banque du Japon. Elle fait la même chose que la Fed sans aucun succès depuis vingt ans !

Les taux d’intérêt au jour le jour sont bas au Japon depuis que le marché boursier a atteint son plus haut. Le coût pour emprunter ne pourrait être plus bas — à moins de donner de l’argent gratuitement. Mais des taux bas et des achats d’actifs n’ont pas suffi à relancer l’économie japonaise ni son marché boursier. Bernanke a pleinement adopté une stratégie d’échec.

Pourquoi poursuivre une politique dont vous savez qu’elle ne marche pas ? Eh bien, pour reprendre ce que dit Bill Clinton, cela dépend de ce qu’on entend par « marcher ». Si « marcher » signifie empêcher un effondrement total des prix des actifs et une contraction de la base monétaire, tout en permettant au gouvernement d’enregistrer de gros déficits, alors peut-être cette stratégie est-elle sensée.

Mais elle n’est pas sensée si vous voulez voir l’économie reprendre réellement un jour. Le Japon a accumulé un ratio dette publique sur PIB de 200% en essayant de remplacer la demande du secteur privé par des dépenses publiques. La seule raison pour laquelle il peut avoir un ratio dette sur PIB si important sans générer de crise monétaire est que sa dette est presque entièrement financée par les épargnants japonais.

Les épargnants japonais ont été si échaudés par l’éclatement des bulles boursière et immobilière qu’ils se sont résolus à perdre une somme fixe d’argent dans l’inflation chaque année plutôt que de tout perdre dans l’éclatement d’une bulle d’actifs. Rien ne semble pouvoir relancer leur vivacité.

A en juger par le précédent japonais, le meilleur pari de Bernanke est de mettre sous sédation le public avec de l’argent gratuit. Il s’agit là réellement d’une sorte de guerre psychologique pour convaincre les gens que tout va bien, même s’ils deviennent plus pauvres dans la réalité. C’est pour cela que Bernanke insiste tant sur la communication. Il reconnaît l’importance de soutenir la confiance dans le système monétaire, même si les preuves de son échec sont partout.

▪ Le problème sino-japonais, lié à la dette ?
Le problème est que, lorsque vous devenez un emprunteur chronique, vous perdez le contrôle sur votre propre avenir. Cela est vrai pour les individus comme pour les nations. En fait, certaines personnes en Chine espèrent exploiter cette réalité et punir le Japon pour avoir acheté les très convoitées îles Senkaku.

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L’Etat-Providence a signé son propre arrêt de mort ! A présent, c’est chacun pour soi

Mais dans cette nouvelle donne, une poignée de Français pourrait être jusqu’à quatre fois plus riche d’ici deux ans.

Comment en faire partie ? Il suffit de suivre le guide

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Jin Baisong, directeur adjoint de la Chinese Academy of International Trade and Economic Cooperation, a écrit un article incitant fortement la Chine à imposer des sanctions au Japon. Selon lui, la Chine peut exercer la clause « d’exception de sécurité » prévue par le règlement de l’OMC. Cette clause permet à la Chine de prendre des mesures pour protéger ses intérêts en matière de sécurité.

Jin estime que le Japon bénéficie plus du commerce chinois que la Chine. Mais sa réflexion porte surtout sur le fait que l’énorme dette publique du Japon est un cheval de Troie auto-construit, stratégiquement parlant. Il explique comment les Chinois peuvent exercer leur influence en utilisant le marché obligataire japonais (souligné par nous) :

« Selon le ministre des Finances japonais et la Banque du Japon, la Chine détenait des obligations d’Etat japonaises court terme et long terme d’une valeur de 18 000 milliards de yens (230 milliards de dollars) fin 2011, soit une hausse de 71% sur un an. La Chine est devenue le plus grand créditeur du Japon en 2010. Au vu de ces faits, le Japon devrait reconsidérer sa santé financière. En d’autres termes, avec la dette nationale du Japon qui est en jeu, la baguette magique qui peut sauver l’économie japonaise semble être entre les mains de la Chine. Et la Chine peut l’utiliser pour trouver des moyens pour imposer des sanctions sur le Japon de la manière la plus efficace ».

Il y a près de 345 milliards de dollars d’échanges commerciaux entre la Chine et le Japon, selon le Wall Street Journal. Au vu de ce qui est en jeu, on penserait qu’aucun des deux partis ne souhaite transformer un conflit territorial mineur en conflit économique majeur. Mais il y a probablement beaucoup plus que de l’économie en jeu ici.

Il y a beaucoup de ressentiment historique entre les deux pays, que même la mondialisation ne peut effacer. La dispute pour les îles Senkaku peut servir les intérêts de certaines parties, dans la succession politique de la Chine, qui voudraient attiser les problèmes de sécurité nationale pour préserver leur pouvoir et leur influence. Ce ne serait pas la première fois que cette tactique est utilisée.

▪ Un atterrissage douloureux menace la Chine
Ce n’est pas comme si la Chine n’avait pas ses propres problèmes. Ainsi, cette citation tirée du rapport « Chine 2030 » de la Banque Mondiale :

« Les réformes qui ont lancé la Chine dans sa trajectoire actuelle de croissance ont été inspirées par Deng Xiaoping. Ce dernier a joué un rôle important en construisant un consensus pour une transformation fondamentale de la stratégie du pays. Après plus de trente ans de croissance rapide, la Chine a atteint un nouveau tournant dans son chemin de développement alors qu’un deuxième bouleversement stratégique et non moins fondamental est attendu ».

Mais les gouvernements locaux prévoient de dépenser 36 000 milliards de yuans au cours des cinq prochaines années en infrastructures et logements publics, selon l’Economic Information Daily. Ce n’est pas là un bouleversement fondamental. C’est même un double retour à la base pour le financement des investissements en immobilisation par la dette. C’est l’ancien modèle.

L’ancien modèle convient parfaitement avec la vision conventionnelle que le boom des ressources naturelles n’est pas encore terminé mais simplement plus ancien. Selon cette vision, exprimée par la Reserve Bank of Australia, le boom des matières premières se divise en trois phases : une hausse du prix des matières premières ; une hausse des investissements pour profiter de ces prix ; et enfin une hausse de la production lorsque les investissements entrent en service et que les prix « se calment ». Voilà une belle théorie.

Le problème est que nous ne vivons pas dans un monde théorique mais dans un monde humain. Et les êtres humains se disputent à propos de choses stupides tout le temps, en particulier lorsque les bulles éclatent et que les banquiers font faillite. S’il faut certes entretenir l’idée de « modération », il ne faut pas pour autant oublier de se préparer au combat.

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