La ratification de l’accord commercial CETA entre le Canada et l’Union européenne est bloquée par la Wallonie. Preuve que ces traités internationaux, pourtant ardemment promus par les gouvernements et la bureaucratie, sont en pratique inutiles.
J’ai déjà mis en doute la méthode intergouvernementale en vue d’ouvrir le commerce international. Je disais alors qu’une telle méthode n’avait rien de pragmatique contrairement aux dires de ses partisans. L’actualité vient confirmer ces dires.
L’Union européenne et le Canada négocient depuis 2009 un accord commercial destiné à harmoniser leurs normes respectives (CETA). Les négociations se sont achevées en août 2014. Cela fait donc plus de trois ans que la ratification de cet accord est en attente.
Tout vient d’une discussion juridique en vue de savoir s’il s’agissait d’un accord qui relevait de la compétence exclusive de l’Union européenne ou s’il s’agissait au contraire d’un accord « mixte », c’est-à-dire impliquant des compétences européennes et nationales.
La qualification de cet accord est en effet d’une importance cruciale. Un accord relevant exclusivement de la compétence de l’Union européenne serait plus facile à ratifier. Le Parlement européen et le Conseil de l’Union seraient ainsi les seules instances à devoir être consultées pour permettre à l’accord d’entrer en vigueur.
En revanche, un accord mixte supposerait l’intervention supplémentaire des 28 Parlements nationaux. Un seul véto suffirait alors à faire échouer la ratification. C’est finalement cette qualification qui a été retenue, réduisant ainsi la probabilité que le traité soit un jour mis en oeuvre.
Mais figurez-vous que ce n’est pas tout ! A la complexité des procédures européennes s’ajoutent les procédures nationales parfois tout aussi kafkaïennes. C’est notamment le cas de la Belgique. Le gouvernement fédéral doit obtenir l’approbation des cinq collectivités politiques fédérées du pays pour signer un accord commercial.
Ainsi le Parlement wallon, qui couvre une région habitée par un peu plus de 3,5 millions de personnes, a pu mettre son véto à un accord qui concernait près de 540 millions de citoyens. Indépendamment de l’utilité d’un tel geste, il en dit long sur l’état de la politique commerciale européenne et du multilatéralisme.
Car si les Européens n’arrivent pas à conclure un accord type avec un pays comme le Canada, on se demande comment se dérouleront les négociations avec les Etats-Unis, d’autant plus que l’Amérique est elle aussi empêtrée dans une défiance similaire vis-à-vis du multilatéralisme. En témoignent les difficultés d’Obama à faire passer le partenariat transpacifique avant les élections… sans oublier que les deux candidats à la présidentielle américaine se plaisent à dénigrer cet accord.
Non. Décidément, le multilatéralisme est dans l’impasse. Ce n’est en définitive pas plus mal compte-tenu du fait qu’il s’inscrit dans une logique davantage mercantiliste que libre-échangiste. Il s’agit en effet moins d’ouvrir le commerce que d’internationaliser son administration et sa réglementation, ce qui réduit notre capacité à contrôler nos affaires et à nous affranchir du dirigisme des autorités.
Les exemples réussis de Hong-Kong et de Singapour montrent au contraire que le libre-échange permet de faire l’économie de traités internationaux et que l’unilatéralisme est plus simple et plus rapide à mettre en place afin de favoriser la production globale de richesses.
Que les gouvernements européens se donnent autant de mal pour négocier des accords commerciaux dont on pourrait très bien se passer pour s’ouvrir au monde est donc tout à fait suspect.
Ne serait-il pas temps d’être pragmatique en revenant aux fondamentaux du libre-échange ?
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