La Chronique Agora

Bulle du crédit : on approche sans doute de la fin…

▪ "La vue n’est pas mal. C’est la maison du maire, juste là en bas".

Nous étions au 16ème étage d’un nouvel immeuble d’habitation à New York, avec vue sur l’East River.

Avec nous se trouvait David Stockman, ancien conseiller au budget sous Ronald Reagan et vétéran de Wall Street — un homme plus proche de l’Ere de la Bulle que quiconque ou presque.

"J’étais là quand ça a débuté", a dit David.

"Après avoir quitté le gouvernement, j’ai rejoint Salomon Brothers à la fin des années 80. Nous commencions tout juste à mettre en place des packages de dette adossée aux créances hypothécaires".

▪ La malédiction de la dette
La finance "bullesque" a pris de nombreuses formes.

Produits dérivés adossés aux dettes hypothécaires. Private equity. Junk bonds. Prêts automobile subprime. Rachats d’actions. Cette dette a été une malédiction pour la plupart des citoyens "ordinaires"… mais une bénédiction pour Manhattan.

Dans le Financial Times du week-end dernier se trouvaient des annonces immobilières pour New York.

Un appartement dans l’Upper East Side se vendait 60 millions de dollars. Un logement de luxe dans le West Side était marqué à 30 millions de dollars… un autre 16 millions.

On ne gagne pas ce genre de sommes en garant des voitures… ni en les fabriquant. Si vous voulez acheter l’un de ces endroits, vous êtes presque obligé de travailler dans la finance.

La plupart des gens n’ont pas la moindre idée de la manière dont le monde financier fonctionne

La plupart des gens n’ont pas la moindre idée de la manière dont le monde financier fonctionne. Ils pensent que les investissements grimpent ou baissent et qu’on gagne de l’argent selon la chance ou l’habileté — comme dans n’importe quel autre jeu. Ils ne savent pas que la partie est truquée.

Les banques centrales ouvrent le crédit aux grandes banques à des taux préférentiels. Les banques gagnent ensuite un spread juteux en accordant des prêts au gouvernement, à l’industrie et aux ménages.

Elles gagnent de l’argent en prêtant… puis en gagnent à nouveau en "découpant" et en vendant la dette aux investisseurs, aux fonds de pension et aux compagnies d’assurance.

Tout va bien jusqu’à ce que le cycle du crédit se retourne — suite à quoi les débiteurs à la marge ne peuvent plus payer, et la dette marginale (subprime ou junk) perd de la valeur.

Les actions et l’immobilier baissent aussi. Tout le monde perd de l’argent. Et tout le monde veut que la Fed "fasse quelque chose".

Que peut-elle faire ?

Rendre le crédit encore moins cher !

▪ Finance de bulle
Stockman était présent lors de la création de l’Ere de la Bulle. En 1981, le président Reagan le nomma pour être son premier directeur du budget. Quatre ans plus tard, il démissionnait, dégoûté.

J’étais inquiet au sujet d’une dette nationale de 900 milliards de dollars. Cette semaine, elle a dépassé les 19 000 milliards

"C’est drôle, n’est-ce pas ? J’étais inquiet au sujet d’une dette nationale de 900 milliards de dollars. Cette semaine, elle a dépassé les 19 000 milliards. Et personne ne s’en soucie".

Le président Nixon a rendu l’Ere de la Bulle possible en quittant l’étalon-or en 1971. Plus d’"ancre dorée" : plus de limite à la quantité de devise et de crédit qu’on pouvait créer.

Mais l’Ere de la Bulle n’a vraiment commencé que 10 ans plus tard, sous le règne de Reagan.

Stockman lutta contre les poches percées du parti républicain — et perdit. Une fois Stockman écarté, Reagan accumula certains des plus gros déficits de l’histoire.

La dette ne tarda pas à être hors de contrôle un peu partout — dans le gouvernement, l’industrie et la consommation privée.

"Nous approchons sans doute de la fin de tout cela", a dit Stockman. "Je m’attends à ce que l’économie mondiale tout entière plonge dans la déflation et la récession".

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile