Normalement, une monnaie reflète la vigueur de l’économie d’un pays. Vous êtes bien d’accord avec moi ? D’ailleurs, c’est la raison pour laquelle le dollar s’enfonce. Logique.
Mais voilà. Les Chinois veulent faire fi de cette logique implacable
En ce moment, l’économie chinoise carbure à toute vitesse. Son PIB 2009 est attendu en hausse de 8,4% et devrait atteindre 9% l’an prochain. La production industrielle du pays s’envole en octobre de +16,1% (+14% déjà en septembre) et a déjà retrouvé son rythme d’avant-crise ! Les ventes de détail grimpent de +16,2%. Le consommateur chinois se met à consommer ! Une bénédiction pour la Chine jusqu’ici tributaire de ses seules exportations pour générer de la croissance.
Bridé, enchaîné, ligoté
Assis sur une économie tout feu tout flamme, le yuan devrait donc logiquement grimper contre toutes les autres devises, dollar, euro et yen en tête. Mais voilà, il reste volontairement et désespérément arrimé au dollar et se déprécie donc au même rythme que le billet vert. Il est donc fortement sous-évalué contre toutes les monnaies régionales et ne cesse de se déprécier contre l’euro.
Parenthèse : dans toute cette histoire, l’euro et l’Europe sont les GRANDS PERDANTS. Parce qu’ils se prennent la dépréciation du dollar ET du yuan en pleine face…
Et malheureusement pour nous, les conséquences d’un yuan sous-évalué sont énormes.
Impossible de sortir de la crise dans ces conditions
Soyons francs.
Un yuan sous-évalué entraîne une délocalisation des industries occidentales et par voie de conséquence chômage en Occident. Voilà bien longtemps qu’on le dit.
Mais surtout, il nous empêche, nous autres Occidentaux, de sortir de la crise. Surtout en Europe. Comment exporter quand vous avez un désavantage compétitif aussi important à gérer ? Comment limiter les importations chinoises si compétitives et si destructrices parfois pour nos industries locales concurrentes ?
Impossible de rééquilibrer la "planète économie"
Et comment, dans ces conditions, résorber les grands déséquilibres économiques mondiaux si dangereux pour l’avenir économique mondial (déficit commercial américain et gigantesque matelas de réserves en dollars en Chine) ?
Avec des Chinois qui sont assis sur un matelas de 2 300 milliards de dollars et qui financent (à contre coeur !!) le train de vie des Américains ; et des Américains aussi dépendants de la Chine en termes de financement que le drogué de son héroïne.
Le tout sur fond de dollar déclinant qui peut à tout moment finir par faire imploser ce fragile équilibre imposé…
Impossible d’empêcher la formation de superbes bulles en Chine
Les Chinois seront eux aussi victimes de leur monnaie. Parce qu’en arrimant le yuan au dollar, ils limitent fortement leur indépendance en matière de politique monétaire. Et en ayant un yuan sous-évalué, ils créent de nouveaux déséquilibres :
La masse monétaire chinoise s’inscrit déjà en hausse de +29%. Là-bas aussi, on crée de la monnaie ex nihilo.
Et la Chine a déjà attiré 150 milliards de dollars de capitaux, avide de rendements délirants.
Conséquence ? L’indice de Shanghai a gagné 75% depuis le début de l’année, les marchés actions s’envolent, et les prix de immobilier atteignent des records fous. Nous avons là deux beaux spécimens de bulles. La spirale haussière sur les actifs est en place et s’auto-entretient.
Mais ce n’est pas tout…
Face à l’inévitable surchauffe, la Chine DEVRA frapper
Entre un yuan maintenu "ras les pâquerettes", les plans titanesques de relance chinois et la stimulation massive de la consommation intérieure sous toutes ses formes — pour prendre le relais des exportations –, nous courons droit à la surchauffe. C’est inévitable.
Face à l’envolée (déjà bien réelle) du prix des actifs, la Chine devra remonter ses taux pour "lâcher la vapeur". Probablement au premier semestre 2010. La Fed, elle, ne pourra remonter ses taux aussi rapidement. Le différentiel de rendement mènera à la hausse du yuan contre le dollar.
D’un point de vue fondamental et long terme, je m’attends à une baisse du dollar et à une hausse du yuan. La tendance est inévitable. Seul le timing est incertain.
Le risque ? L’inflation
La dépréciation du dollar et la réévaluation du yuan aideront à réduire les excès (excédents, déficits). Mais cette tendance de fond sera aussi source "d’inflation importée" aux Etats-Unis. Inflation par les prix des biens et produits chinois importés.
Encore une source d’inflation !?, me direz-vous. Eh bien oui.
Il y a déjà l’inflation liée à la hausse à venir des prix des matières premières (importées elles aussi).
Et puis il y a l’inflation qui sera "voulue" par nos autorités monétaires et politiques pour faire "partir en fumée", "pas trop douloureusement", nos endettements massifs constitués.
Et maintenant l’inflation importée depuis la Chine, du fait de la hausse des salaires et des prix suite à revalorisation du yuan contre le dollar…
Un argument de plus en faveur des bulls sur l’or
Car rappelez-vous : l’inflation est destructrice de valeur pour les actifs "papier". Une raison de plus de détenir un peu d’or physique dans une optique long terme. Sait-on jamais…
En attendant, l’or cotait ce matin 1 144 $ l’once, contre 1 025 $ il y a une dizaine de jours… Et cotait 690 $ il y a quelques mois.