La Chronique Agora

Au bout de la route

Argentine, inflation, ranch

Après un trajet peu mouvementé, Bill rejoint son ranch argentin, où il continue ses réflexions sur l’inflation et la responsabilité des uns ou des autres.

Nous sommes arrivés dans notre refuge sud-américain hier. Nous avons pris la route de montagne, plus rapide que la route principale, mais fatigante, parsemée de virages sinueux jusqu’au sommet. Une fois arrivés, le climat et la topographie ont complètement changé. Après avoir passé la vallée de Lerma, qui s’apparente à une jungle brumeuse et verdoyante chargée d’humidité, nous sommes arrivés sur un plateau désertique, en plein soleil, où le vent balaie des plaines à perte de vue.

Nous avons alors rejoint la route principale pour prendre un raccourci. Un panneau peint à la main avertissait que la route était réservée aux « camionnettes à quatre roues motrices ». Mais comme cela nous permettait de réduire d’une heure la durée du trajet, nous avons décidé de tenter le coup.

La route n’est pas trop mauvaise. Elle sillonne à travers des terres désolées jusqu’à la vallée de Calchaqui, de l’autre côté des montagnes. En deux ou trois endroits, il était bien nécessaire d’avoir un 4×4 pour ne pas être coincé par des sables profonds.

Cela faisait presque deux ans que nous étions partis, mais le temps passe lentement dans la vallée. Dans ses carnets de voyage du début du XXème siècle, Juan Carlos Davalos raconte comment sa vieille Ford des années 1930 était restée coincée alors qu’il traversait ces mêmes routes accidentées.

Des nouvelles du ranch

Antonio, le gérant de notre ranch, nous a accueillis sur le perron de la grande grange. Quelques minutes plus tard, ce fut comme si nous n’étions jamais partis.

Antonio venait de se rendre à l’autre exploitation dans les montagnes. Les deux exploitations se touchent, mais la seconde se situe 600 mètres plus haut. C’est là que nous élevons le bétail. L’autre se situe dans la vallée, où nous y cultivons le foin qui sert à nourrir le bétail.

« C’est une bien triste nouvelle », nous informe-t-il. « La mort de Carlos. Nous sommes allés présenter nos condoléances à la famille. »

La semaine dernière, Carlos, un jeune ouvrier agricole avec femme et enfants, s’est noyé dans le réservoir. Comment ? Pourquoi ? La police a déclaré qu’il s’agissait d’un accident. Mais le bassin ne faisait que 1,20 m de profondeur.

« Tout le monde veut croire à la thèse de l’accident », a soutenu un voisin perspicace, plus tard le même jour.

« Du coup, quelle est votre théorie ? » lui avons-nous demandé.

Il a incliné la tête, haussé les sourcils et n’a plus rien ajouté.

« Vous ne pourrez pas traverser la rivière comme ça », a prévenu Antonio. Nous avons donc mis nos affaires dans une petite remorque, attachée à notre nouveau tracteur Massey Ferguson.

(« Votre calèche vous attend. »)

(Traversée de la rivière)

(Elizabeth Bonner arrive tout en élégance)

De l’autre côté de la rivière, le paysage est sublime. Une rangée d’alamos (un type de peuplier) borde la route de chaque côté. Des terrains verts, recouverts de trèfles, s’étendent des deux côtés. Et sur la colline se trouve notre maison, qui n’était qu’une ruine lorsque nous l’avons récupérée, entourée de solides colonnes, vestiges du passé colonial de la vallée.

C’est là, coupés du monde extérieur par quatre heures de chemins de terre et par les eaux impétueuses de la rivière Calchaqui, que nous avons rejoint notre bureau argentin et fait le bilan.

Laissez-les se goinfrer

Les riches, qui vivent dans les plus beaux quartiers, remarquent à peine la hausse des prix de l’essence. Les classes populaires et moyennes, qui se sont installées en banlieue en raison des prix plus bas du logement, sont frappées de plein fouet. Et le pire pourrait être à venir. Des analystes de Rabobank anticipent une nouvelle poussée d’inflation et une récession :

« … Les données historiques suggèrent qu’une fois que l’inflation accélère, la croissance économique a tendance à ralentir, quelle que soit la réaction des dirigeants politiques.

Cela s’est produit en 1974/1975, en 1980/1981, en 1992, en 2008 et en 2011. Cela suggère que les ‘atterrissages en douceur’ de l’économie sont difficiles à réaliser. »

Une récession causée par l’inflation semble d’ores et déjà acquise, concluent-ils. Qu’est-ce qui nous attend désormais ?

Ce sera la grande thématique des dix prochaines années : hausse des prix, récession, destruction de la classe moyenne américaine, déclin de l’empire américain et corruption croissante de la vie politique.

Très certainement, les élites continueront à pointer du doigt Vladimir Putin… les entreprises cupides… leurs adversaires républicains ou démocrates…

… Et l’inflation ne fera qu’accélérer. Même après la fin du conflit qui sévit dans les steppes eurasiennes, il y a fort à parier que les États-Unis maintiendront leurs sanctions et poursuivront leur ingérence. N’oubliez pas : c’est « l’inflation ou la mort ». Une « urgence », même fabriquée de toutes pièces, permet aux Etats-Unis de poursuivre sa politique inflationniste.

Toutefois, l’issue est prévisible. Dans quelques mois, la Fed sera obligée de prendre des mesures plus sérieuses. Et lorsque cela arrivera, elle ouvrira la boîte de Pandore.

Ce n’est que mon humble avis…

Affaire à suivre !

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