L’intelligence artificielle est un concept… artificiel. C’est l’avantage de vieillir, on reconnaît une mode, quelque chose qui va passer, d’une tendance durable.
De mon temps, comme disent les quasi-fossiles, l’intelligence artificielle existait déjà : ça s’appelait de l’automatisme. Des asservissements pilotaient des machines dédiées à la production. Des détecteurs de différentes natures (son, mouvement, image, lumière) permettaient de réguler des opérations (déplacements, ouvertures ou fermetures de vannes, cadences, etc.).
Aucun ingénieur ne se serait risqué à appeler ça « intelligence artificielle », il aurait été ridicule. C’est comme si vous aviez appelé une machine à écrire « écrivain artificiel ».
Ensuite, vers le milieu des années 1980 – quand les signaux analogiques ont fait place aux signaux numériques – on appelait cela un machin ou un bidule « assisté par ordinateur » ou « asservissement numérique » ou « pilotage numérique ». Mais toujours pas « intelligence artificielle »…
L’intelligence artificielle n’est que de l’emballage marketing sauce XXIème siècle.
Il y a deux ans, j’ai investi à au capital d’une jeune entreprise lors de sa première levée de fonds, Biocellvia. Le principe : de l’analyse d’images, de clichés de patients, pour évaluer le plus objectivement possible l’efficacité de traitements oncologiques.
Biocellvia, dans sa communication, parlait « d’analyse quantitative d’image » appliquée à des pathologies bien précises. Mais tous les journalistes et analystes ont adopté la terminologie ronflante d’« intelligence artificielle ».
Ordinairement, ce sont des anatopathologistes bac +12 qui examinent dans le temps les clichés des tissus des patients sous traitement. Biocellvia développe des systèmes de traitements de l’image pour évaluer et quantifier s’il y a régression des cellules malignes.
Bien sûr, au final, un anatopathologiste confronte toujours les résultats obtenus par le traitement de l’image et son opinion. Mais le procédé permet un gain de temps considérable et améliore l’objectivité.
Tous les jours, notre lutte contre des automatismes parfois déviants nous montrent que nous sommes très loin de l’« intelligence artificielle ».
Combien de fois un distributeur de billets vous a demandé si vous vouliez un ticket pour vous répondre « désolé il n’y a plus de papier » après que vous ayez répondu « oui » ?
Combien de fois avez-vous consulté le site internet d’un marchand pour vérifier que l’objet que vous recherchiez était en stock… pour vous apercevoir après déplacement que finalement, non, ce n’était pas le cas ?
Lorsque vous montrez à un enfant de trois ans un pissenlit puis une jacinthe en disant « fleur », lorsqu’il verra une rose, il dira « fleur ».
Pour qu’un ordinateur puisse dire « fleur », il faudra l’abreuver de millions d’images de presque toutes les fleurs existantes. Et le résultat à la sortie ne sera pas garanti. Il serait inconsidéré de prendre de graves décisions au vu de son verdict (du genre : tue tous ceux qui n’ont pas un fleur à la main)…
Si la Chine est si avancée dans ces techniques de reconnaissance d’image, c’est en raison de ses banques de données, accumulées bien souvent à l’insu de sa population.
Lorsque le marketing ressuscite Malthus
Lorsque quelqu’un vous parle des graves menaces que l’intelligence artificielle fait peser sur l’emploi, offrez-lui un Lexomil ou une bière (voire les deux) et dites-lui que Malthus s’est planté sur tout. Comme Marx, d’ailleurs. Dites-lui aussi que les pays les plus robotisés sont ceux où le chômage est quasi-inexistant.
Mais c’est certain, l’intelligence artificielle déplace des emplois. Les cochers ont disparu, les dentelières aussi, etc. Probablement que le gardien de musée somnolent disparaîtra aussi, même dans les anciens pays de l’est où il en existe encore beaucoup.
La richesse, la vraie, se crée par les gains de productivité. Elle ne se crée pas en bridant celui qui fait ces gains de productivité, en distribuant de l’argent fictif ou en « redistribuant » ce qui a été honnêtement gagné.
Mon collègue américain Jeff Brown de Bonner & Partners vient de publier ce graphique spectaculaire à propos des emplois dans le secteur de l’intelligence artificielle (IA) aux États-Unis.
Il y a trois fois plus de demande que d’offre ; les salaires moyens se situent entre 300 000 $ et 500 000 $ annuels. Avec un peu d’expérience, 1 M$ est très accessible.
Salauds de riches qui tuent l’emploi des pauvres diront quelques indécrottables MM (marxiste-malthusien). Heureusement, le monde avance sans eux.
L’automatisation continue et durera, rien de neuf sous le soleil industriel depuis l’arrivée du métier à tisser. L’automatisation libère des gens qui se consacreront à des tâches plus élevées ou plus agréables. C’est comme ça que notre niveau de vie s’élève.