▪ C’est ce que l’équipage a dit aux passagers du Costa Concordia juste avant que le navire sombre.
Et c’est ce que l’équipage de l’USS America — le plus grand bateau de croisière au monde — disait à ses passagers il y a quelques jours.
Tutto va bene.
Le problème, c’est que tutto ne va pas aussi bene qu’ils le disent. En fait, le bateau coule.
L’économie américaine est revenue à ses niveaux de production de 2007. Cela ne fait pas que marquer la reprise la plus faible depuis la Deuxième Guerre mondiale ; ça montre aussi qu’il se passe autre chose. La plupart des économistes n’ont pas la moindre idée de ce dont il s’agit. Ils pensent donc que cette « reprise » est inhabituellement lente. Ben Bernanke, par exemple, s’est engagé à maintenir les taux bas (c’est-à-dire à des niveaux réels négatifs) pendant encore trois ans. Il a également fait savoir qu’il avait le doigt sur la gâchette, prêt à actionner un nouvel assouplissement quantitatif en quelques secondes.
La semaine dernière, on a appris que l’économie américaine s’était développée au trimestre précédent. Elle a grimpé au taux annuel de 1,8%, bien au-dessous des 3% attendus par le consensus des économistes.
Cela a remis l’économie US à ses niveaux de 2007, mais à quel prix ? Les autorités ont ajouté 6 000 milliards de nouvelles dettes pour regagner environ 600 milliards de dollars de production annuelle. Waouh.
Tout porte à croire que la croissance sera aussi décevante cette année que la précédente. Bloomberg nous en dit plus :
« La croissance économique américaine pourrait ne pas dépasser les 2% cette année, et une troisième tournée d’assouplissement quantitatif de la part de la Réserve fédérale n’aurait que peu d’effet, a déclaré Martin Feldstein, professeur d’économie à l’université de Harvard ».
« ‘Nous allons avoir du mal à atteindre les 2% cette année’, a-t-il déclaré lors d’un entretien sur Bloomberg Television […]. L’économie est toujours dans une ‘zone dangereuse’, a affirmé Feldstein, même si le risque de récession ‘est moindre aujourd’hui qu’il ne l’a été’. »
« Feldstein, qui s’exprimait avant la publication des chiffres du PIB, a déclaré que la croissance des dépenses des ménages l’an dernier était en grande partie due au fait que les consommateurs puisaient dans leur épargne — ce qu’ils ne pourront pas continuer cette année selon lui ».
« ‘La chose qui a rendu possible l’augmentation des dépenses de consommation, c’est que les gens ont réduit leur taux d’épargne’, a-t-il dit. ‘Il est difficile de croire que cela se reproduira’ au même rythme ».
Bloomberg nous annonce aussi que les dépenses de consommation ralentissent déjà :
« Les dépenses chez les détaillants ont perdu de la vitesse tous les mois au quatrième trimestre, passant d’un gain de 0,7% en octobre à une augmentation de 0,1% le mois dernier ».
« […] Les dépenses étaient plus basses qu’attendues alors que l’inflation entamait moins les porte-monnaie américains. Les prix liés aux dépenses de consommation ont avancé de 0,7% au trimestre dernier, en baisse par rapport aux 2,3% de la période précédente — c’est aussi le gain le plus limité depuis plus d’un an. C’est à comparer à l’objectif de long terme de 2% fixé par la Fed ».
▪ Baisse des dépenses : la fin n’est pas encore en vue
Nous sommes d’avis que les dépenses de consommation s’affaibliront encore à mesure que le marché baissier de l’immobilier américain empirera. Les ventes de maisons de décembre ont été les pires en près d’un demi-siècle.
Selon nous, les prix des maisons US pourraient encore baisser de 20% — peut-être plus. Parce que les gens ont moins d’argent à dépenser pour l’immobilier. Les revenus disponibles réels sont plus bas aujourd’hui qu’ils ne l’étaient il y a un an.
Les Américains qui achètent des maisons ne s’inquiètent pas vraiment du prix. Ce qui les préoccupe, ce sont leurs mensualités. Ils achètent autant d’immobilier que leur revenu mensuel leur permet.
C’était là le véritable moteur de la bulle immobilière de 2005-2007. Les taux d’intérêt baissaient depuis 30 ans, diminuant les paiements immobiliers mensuels — ce qui rendait le remboursement d’un prêt plus aisé. Les prix des maisons grimpaient de manière constante, donnant l’impression que les maisons étaient un bon investissement. Et le secteur des prêts immobiliers prêtait à tout le monde, solvable ou non, au chômage ou non, mort ou non. Ce qui a injecté beaucoup d’air dans le marché immobilier.
A présent, les taux continuent de baisser, pour autant que nous puissions en juger. Mais les revenus diminuent et les prêteurs se montrent bien plus prudents ; le marché s’est dégonflé. Il n’est plus sous pression. Il est sous vide.
Rappelez-vous que le ratio dette des ménages/revenu n’était que de 70% au début des années 80 aux Etats-Unis. Il est désormais à 120%. Pour le faire baisser, les ménages doivent se débarrasser de leur dette — en particulier de leur dette immobilière.
En d’autres termes, ils doivent épargner. Les taux d’épargne ont récemment chuté aux Etats-Unis… passant de 5,7% à 3,5%. Ils regrimperont probablement à mesure que la Grande Correction se poursuit.
Ce qui signifie… que l’immobilier chutera, peut-être de 20% supplémentaires.
Voyons voir… baisse de l’immobilier… baisse des revenus… réduction des dépenses de consommation… croissance négligeable du PIB…
Tutto va bene !