La Chronique Agora

Aura-t-on un jour une monnaie saine ? (1/2)

L’inflation monétaire est galopante… et tout le monde en est ravi. Les autorités pourront-elles revenir un jour à une monnaie saine ?

Au cours de la dernière décennie, la combinaison d’une inflation rapide du prix des actifs et d’un faible taux d’inflation officiel des prix à la consommation a mis en difficulté le mouvement pour une monnaie saine en tant que force politique aux Etats-Unis ainsi qu’au niveau international.

Au cours de la nouvelle décennie, un équilibre différent entre les « jumeaux terribles » de l’inflation d’origine monétaire — l’inflation des prix des actifs et l’inflation des prix à la consommation — donnera l’opportunité à ce mouvement de regagner du terrain.

Il y aura toutefois un facteur crucial : la capacité des partisans d’une monnaie saine à faire avancer leurs arguments dans le débat d’idées ainsi qu’à former des alliances avec d’autres mouvements ayant la capacité à remporter les élections.

Il est très probable que l’impact déflationniste des facteurs non-monétaires que constituent la mondialisation et la digitalisation, qui ont permis de camoufler l’inflation des prix à la consommation au cours de la dernière décennie, commencent déjà à se dissiper.

L’apogée de la mondialisation

La mondialisation avait sans doute déjà atteint son apogée avant même le début de la guerre commerciale entre Xi et Trump. Les mauvais investissements alimentés par l’inflation monétaire ont certainement contribué à son dynamisme antérieur.

L’un des facteurs principaux fut la diffusion d’hypothèses hautement spéculatives en ce qui concerne les miracles que permettraient d’apporter des chaînes d’approvisionnement mondialisées.

D’autre part, la capacité de la digitalisation à camoufler l’inflation d’origine monétaire des prix des biens et des services sur le marché est largement liée à son impact sur les mécanismes de fixation des salaires. Elle a donné naissance à des sociétés disposant d’un pouvoir monopolistique considérable.

Les obstacles à la diffusion de leur savoir-faire technologique et organisationnel chez leurs concurrents impliquent que les salaires ne sont pas poussés vers le haut par la concurrence entre employeurs à travers le marché du travail – comme ce fut le cas au cours des révolutions industrielles précédentes.

Ces obstacles reflètent le fait que la plupart des investissements prennent maintenant la forme d’actifs intangibles spécifiques à chaque entreprise. Malgré cela, de tels obstacles tendent à voir leur efficacité décroître au fil du temps.

Etant donné que les facteurs déflationnistes s’estompent, la forme de taxation que constitue la politique de répression monétaire (une taxe collectée au profit des Etats au travers de la manipulation des taux d’intérêts par les banques centrales afin de maintenir les taux à des niveaux artificiellement bas et d’atteindre ainsi un taux d’inflation de 2% malgré les facteurs déflationnistes que nous avons décrits) va se métamorphoser pour devenir une taxe par l’inflation avec l’accélération du taux d’inflation des prix à la consommation.

Les Etats ne peuvent pas renoncer à des recettes supplémentaires compte tenu de la fragilité de leur situation budgétaire. Simultanément, l’inflation du prix des actifs va changer de trajectoire, et ils risquent de faire face à des krachs beaucoup plus fréquents.

Les circonstances historiques favorables aux partisans d’une monnaie saine

Si l’on se fie à l’histoire monétaire, la combinaison d’un krach du prix des actifs et d’un taux d’inflation élevé des prix à la consommation a tendance à renforcer le mouvement en faveur d’une monnaie saine dans le débat politique. Le ressentiment répandu dans l’opinion publique envers une augmentation des prix à la consommation ainsi qu’une chute de la valeur réelle du patrimoine des ménages (soit en raison d’une inflation élevée, soit en raison d’un krach) est à l’origine de ce changement.

En revanche, lorsque l’inflation des prix à la consommation reste dissimulée (comme ce fut le cas tout au long de la dernière décennie) et que l’inflation des prix des actifs se répand, le mécontentement des épargnants face à la forme de taxation que représente la politique de répression monétaire est plus que compensé (en terme d’impact électoral) par la satisfaction des segments importants de la population qui bénéficient d’une hausse de la valeur de leur patrimoine et de la bonne performance des fonds de pension dans lesquels ils investissent.

Si l’inflation des prix des actifs prend fin et que l’inflation des prix à la consommation reste dissimulée, alors il est probable que nous assisterons à un nouveau triomphe des politiques monétaires malsaines, comme ce fut le cas dans les années 1930 puis de nouveau dans les années qui ont suivi le krach de 2008.

Les banquiers, les courtiers en crédit et les vendeurs de produits financiers seraient accusés de tous les maux, mais ceux qui font tourner la planche à billets seront épargnés, bien que les leaders politiques pourraient en supporter les conséquences même si la responsabilité de la crise ne leur est pas directement attribuée.

Nous verrons la suite dès demain.


Article traduit avec l’autorisation du Mises Institute. Original en anglais ici.

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