La Chronique Agora

Arrêt du QE3 : plus facile à dire qu’à faire…

▪ Ca y est — c’est fait.

La Fed a annoncé une fin éventuelle au programme d’assouplissement quantitatif. Quand bien même cette fin est parfaitement hypothétique… les marchés n’ont pas aimé. Personne n’a aimé, en fait — marchés actions, marchés obligataires, or, matières premières, l’unanimité était spectaculaire.

Que les investisseurs se rassurent : si vous voulez mon avis, le QE3 n’est pas près de s’éteindre. D’abord parce que l’économie américaine est encore loin d’être sortie du bois. Ensuite parce que, comme l’expliquait Bill Bonner mardi dernier, on n’arrête pas comme ça un mastodonte qui galope à pleine vitesse :

"[…] les politiques des banques centrales [sont] devenues une sorte de machine d’Apocalypse. Appuyez trop longtemps sur le bouton et il est presque impossible d’arrêter. Parce que plus la Fed distribue de crédit et de cash… plus l’économie s’organise pour en profiter. A mesure que le temps passe, de plus en plus de gens veulent voir le programme se poursuivre… et de moins en moins peuvent survivre si ce n’est pas le cas".

"Certains dépendent des taux zéro pour renouveler leurs dettes", continue Bill. "Certains comptent sur des taux bas pour construire, vendre ou acheter des maisons. Certains dépendent de la Fed pour financer les déficits gouvernementaux et faire en sorte que l’argent continue de s’écouler vers les zombies. Personne ou presque ne veut éteindre le robinet".

 ▪ Je ne doute pas que Ben Bernanke soit conscient de la situation. Il y va donc… prudemment, c’est le moins qu’on puisse dire. Voilà déjà plusieurs semaines qu’il prépare "psychologiquement" les marchés à un ralentissement des injections mensuelles (se montant actuellement à 85 milliards de dollars, pour rappel).

Cette semaine, il a rendu tout cela un peu plus concret… mais pas trop. La réduction des doses se ferait en douceur — histoire de ne pas choquer un système complètement accro aux liquidités, pour reprendre la métaphore addictive souvent employée par Philippe Béchade.

C’est d’ailleurs Philippe qui nous montrait à quel point l’arrêt du QE3 pourrait être progressif — cet adjectif étant l’euphémisme de la décennie :

"En imaginant — pure hypothèse — que la Fed se donne sept ou huit mois pour y parvenir, un processus linéaire se solderait par une réduction homéopathique de 10 à 12 milliards de dollars par mois. Si elle forçait l’allure (mettons six mois), cela donnerait du -15 milliards de dollars".

Ceci dit, précise Philippe, "de nombreux membres de la Fed peuvent intervenir pour modifier la perception du discours par les marchés. Janet Yellen ou James Bullard — des aficionados de la planche à billets — ne manqueront pas de souligner qu’en l’état actuel des statistiques de l’emploi ou de l’inflation, rien ne presse ; d’autres hypothèses de travail restent sur la table".

"La Fed laisse totalement ouverte la possibilité d’entamer une décélération ‘au moment opportun’ puis de marquer une pause si les conditions économiques se détériorent. Ben Bernanke n’a-t-il pas toujours affirmé que sa priorité était de soutenir activement la croissance afin que l’emploi se rapproche de l’objectif des 6,5% et le PIB de la moyenne historique des 3% ?"

▪ En attendant, les marchés n’ont pas apprécié — comme je vous le disais en début de Chronique, tout baisse… et l’argent dégagé des marchés d’actifs disparaît littéralement — c’est-à-dire qu’il ne joue pas à "saute-mouton" d’un marché sur l’autre.

Cécile le résumait en quelques mots dans La Quotidienne d’Agora cette semaine :

"Les investisseurs restent cash. Ils gardent leur argent liquide, attendant certainement de voir dans quel sens le vent va tourner avant de miser sur un quelconque marché".

Mais après tout, "pourquoi avoir des actifs financiers si ceux-ci rapportent si peu ?" se demandait Simone Wapler jeudi dans sa Stratégie. "Il me semble que dans un avenir proche, beaucoup d’épargnants se poseront cette question. Nous allons donc assister à un délestage général et une désaffection des actifs financiers".

"Vous devez donc réduire la part actifs financiers de votre patrimoine au profit des biens tangibles", conseille Simone, avant de réitérer sa confiance dans l’or : "il va se réveiller lorsque la fragilité de la reprise américaine deviendra flagrante. Il y aura aussi prochainement des opportunités sur les marchés actions des pays émergents désertés par les capitaux".

"Car la toile de fond n’a pas changé. La richesse change de camp. Les pays développés croulent sous les mauvaises créances et le camouflage par l’impression monétaire ne durera qu’un temps. En Europe, pensez aussi aux 1 000 milliards d’euros des créances bancaires douteuses. Mieux vaut donc placer son argent chez ceux qui sont exempts de mauvaises dettes, ce qui est le cas de certains pays émergents".

Maintenant que vous savez ça, cher lecteur… vous n’avez plus qu’à agir !

Meilleures salutations,

Françoise Garteiser
La Chronique Agora

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