La Chronique Agora

Après Ben Laden, la Chine ?

▪ Nous foncions vers l’aéroport de Pudong. Nous ne savions pas pourquoi nous foncions ; nous avions tout le temps. Mais notre chauffeur semblait vouloir battre le record de vitesse en taxi.

Il filait à 160 km/h, faufilant son véhicule sans heurts dans le trafic.

Nous étions sur l’autoroute la plus moderne que nous ayons jamais vue. Des voies aériennes… des ponts… des routes surélevées… nous avons traversé la rivière sur un pont qui semblait avoir été construit la veille. Puis nous avons roulé dans le brouillard sur une huit-voies.

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Il y a quelques jours, Total a annoncé une OPA sur Sunpower.

Conséquence immédiate : le cours de Sunpower s’est envolé… prenant 50%.

Vous voulez faire pareil ? Ça tombe bien… nous avons déniché pour vous trois opportunités de fusions-acquisitions qui pourraient se révéler tout aussi profitable que l’OPA Total/Sunpower.

Pour vous positionner sans attendre, continuez votre lecture !

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A gauche, nous parvenions tout juste à distinguer une ville fantôme. Elle devait compter des dizaines… non, des centaines… de tours de bureaux et d’appartements. Nous avons dépassé un gigantesque parking… puis, au loin… une autre ville. Nous ne voyions que des formes. Mais c’était une ville aussi grande que Baltimore.

Nous avons continué nos 24 heures du Mans en taxi… dépassant des voitures par la gauche… puis par la droite… puis au milieu… nous glissant dans un étroit espace entre des voitures et des camions.

A nouveau, à notre gauche se trouvait l’une de ces villes spectrales. Cleveland ? San Diego ? En taille, ça aurait pu être l’une ou l’autre. Nous avions quitté le centre de Shanghai une demi-heure auparavant. Mais nous continuions de traverser des villes… des parcs industriels… et des projets immobiliers. On doit trouver une dizaine de villes de la taille de Baltimore entre le centre de Shanghai et l’aéroport.

L’aéroport, bien entendu, est nouveau… comme tout le reste… et colossal.

Peut-il y a voir un doute sur le fait que la Chine est destinée à devenir LA superpuissance économique mondiale ? Elle a la taille… l’énergie… le savoir-faire. Et l’argent.

L’un de nos lecteurs vivant à Shanghai nous en dit plus :

« Je suis venu ici il y a 20 ans. A l’époque, les étrangers avaient bien plus de pouvoir et d’argent… sans parler de technologie. On pouvait imposer ce qu’on voulait ».

« Notre entreprise effectue encore près de la moitié de sa fabrication aux Etats-Unis. Ici, les entreprises locales sont plus avantageuses en termes de prix. Et les contrats sont gigantesques, donc nous pouvons gagner beaucoup d’argent… même avec des produits à bas coût, où la marge est relativement basse. Mais les choses de meilleure qualité proviennent des Etats-Unis. Les Chinois n’ont pas encore tout à fait rattrapé le coche — en partie parce que le marché d’ici ne veut pas trop de qualité ».

« Il y a une rotation si rapide. Les gens ne veulent pas payer des produits qui dureront trop longtemps. Les choses changement trop rapidement ».

« Donc pour l’instant, la qualité de nombreux produits n’est pas encore à la hauteur de celle des Etats-Unis. Mais ce n’est qu’une question de temps. Dans cinq ans, je prendrai ma retraite. Je pense que c’est le temps qui nous reste. Ensuite, ce sera terminé. Ils n’auront plus besoin de nous. Ils ont l’argent. Ils ont les compétences et la technologie. Nous n’aurons rien à offrir ».

En général, plus on fait une chose, meilleur on devient. Les Chinois fabriquent plus de voitures… plus de routes… plus de trains… plus de bâtiments et plus de tout que quiconque. Pas étonnant qu’ils le fassent bien — et peut-être mieux que tout le monde, aussi.

Une nouvelle ligne ferroviaire entre Shanghai et Pékin sera mise en place le mois prochain. Les trains voyageront entre les deux villes à une vitesse allant jusqu’à 30 km/h. Déjà maintenant, un train à lévitation magnétique vous amène de la ville à l’aéroport si rapidement que vous arrivez avant d’avoir pu trouver une place.

Et alors, vous demandez-vous peut-être. Nous aussi. Et alors ? Si les Chinois prennent la tête en matière de richesse et d’innovation, qu’est-ce que ça peut faire ?

▪ Vous vous souvenez des cinq grandes tendances que nous avons mentionnées hier ? Non ? Eh bien, qu’à cela ne tienne, nous allons les répéter :

  1. La Grande correction — dans bon nombre d’économies développées, mais principalement aux Etats-Unis…
  2. La hausse continue des économies en développement… pas seulement en Asie, mais aussi en Amérique latine et en Afrique.
  3. La pénurie croissante d’énergie, de terres, d’eau et de  matières premières bon marché.
  4. Le déclin (suicide serait peut-être un meilleur terme) de l’Empire américain
  5. La fin proche du système financier mondial basé sur le dollar.

Ce qu’il y a d’intéressant — et de frustrant — avec ces tendances, c’est qu’elles s’entrecroisent toutes de diverses manières, à diverses périodes… causant des collisions aussi imprévisibles que dangereuses.

Vous remarquerez également que la Chine les traverse toutes, comme un bulldozer dans un restaurant. Elle est au centre de l’ascension de l’Asie et des économies en voie de développement. Elle est la principale raison de la disparition des matières premières et ressources naturelles bon marché. La devise chinoise est presque assurée de grimper à mesure que le système financier mondial basé sur le dollar se délite. La Chine est également le successeur probable de l’Empire américain.

Nous avons négligé ce thème pendant des années — depuis que nous avons publié, avec Addison Wiggin, notre oeuvre sur le sujet, L’Empire des dettes. Mais la mort d’Oussama ben Laden a réveillé notre intérêt.

L’une des rares choses au sujet desquelles nous ne nous posons pas de questions, c’est la raison pour laquelle les autorités ont tué Ben Laden. Il aurait été bien trop brouillon et inconfortable de le traduire en justice. Après tout, avant d’être le plus grand ennemi des Etats-Unis, il en a été le plus grand ami.

Oui, cher lecteur, M. Ben Laden a rendu bien des services à l’Empire américain, et plus précisément à l’establishment militaire américain. Il a d’abord mis en place Al-Qaïda, avec l’aide de la CIA, pour harceler le flanc de l’ennemi le plus puissant des Etats-Unis — l’Union soviétique. Ensuite, après la chute de l’URSS, l’industrie militaire était morose. Il n’y avait plus besoin d’investir une part aussi gigantesque du trésor américain dans la « défense » alors qu’il n’y avait plus rien contre quoi se défendre.

Sans menace plausible, la défense aurait été une proie facile pour les faucons budgétaires. Mais c’est à ce moment-là, alors qu’ils en avaient le plus besoin — un peu comme les généraux argentins accourant au secours des sondages d’opinion de Margaret Thatcher –, qu’Oussama ben Laden est arrivé à la rescousse. C’est en tout cas ce qu’il semble. Nous aurions été très curieux d’en savoir plus sur son rôle dans les attentats du 11 septembre 2001. Malheureusement, le procès d’Oussama ben Laden a été coupé court par deux balles tirées à bout portant.

Non que nous critiquions. Si nous étions au pouvoir, nous aurions probablement voulu qu’il disparaisse, nous aussi. La dernière chose que la CIA aurait voulu voir, c’est Oussama bavardant devant le monde entier.

Selon le magazine The Atlantic, Ben Laden a déclenché 3 000 milliards de dollars de dépenses par les Etats-Unis. Quelle partie de cette somme s’est retrouvée dans les poches de l’industrie militaire ? Un pourcent ? Cinq pourcent ? Nous n’en savons rien, mais rien qu’un pourcent représenterait la coquette somme de 30 milliards de dollars — probablement équivalente aux profits annuels de toutes les entreprises automobiles du monde prises ensemble.

Et maintenant ? Oussama fume les algues par la racine. Et les Etats-Unis sont en route pour la faillite. Le Pentagone et ses fournisseurs vont-ils entrer en douceur dans cette bonne nuit — de réductions budgétaire et de profits en baisse ? Ou bien vont-ils se révolter… et trouver un remplaçant à Ben Laden ? La Chine, peut-être ?

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