Selon des articles parus dans la presse, Paul Tudor, le légendaire gérant de fonds, aurait eu le mois dernier un entretien privé avec Goldman Sachs. Il leur aurait montré le graphique ci-dessous en leur disant d’être « vigilants ».
Bien entendu, nous aurions pu leur dire la même chose. Les actions sont chères.
Ce graphique est privilégié depuis longtemps par les investisseurs value — c’est-à-dire recherchant des actions se négociant au-dessous de leur valeur intrinsèque. Le graphique compare les cours des actions à l’économie qui les soutient.
Logiquement, les entreprises doivent tirer leurs profits de ce qui est produit, s’obtient et se dépense au sein de l’économie. Si l’économie ne progresse pas, les profits – grosso modo – ne doivent pas progresser non plus.
A mesure que les prix des entreprises augmentent par rapport à l’économie elle-même, on ne peut que se dire que quelque chose est détraqué.
La Rivière reste « sans retour »
Prenons notre vieille amie, Amazon (AMZN).
Il y a plus de 10 ans, nous avons surnommé cette action la « Rivière sans retour« . Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, depuis. Bien que 500 Mds$ aient été investis dans Amazon, presque rien n’en est ressorti.
Amazon est une société désormais arrivée à maturité. Ce n’est plus une start-up qui tire des plans sur la comète. A présent, tout s’est concrétisé. Mais qu’y a-t-il dedans ? Où est le fruit de tant d’investissements… de tant de temps… de tant d’accords ?
Dans tous les Etats-Unis, des détaillants font faillite. Certains noms connus de tous, comme Macy’s, Sears et JC Penney, piliers des centres commerciaux les plus vastes et les plus florissants, résilient les baux de leurs boutiques et mettent la clé sous la porte. Certaines grandes entreprises figurant parmi les plus connues et les plus fiables du paysage américain sont en faillite. Amazon a sa part de responsabilité, dans cette destruction financière.
Mais qu’y a-t-il en contrepartie ? Où sont les profits que Bezos a pris à ces grands détaillants ?
Ils ont disparu.
Nous savons quoi penser de ces détaillants avec pignon sur rue qu’Amazon a poussés à la faillite. Ils appartiennent au passé. Ils ont échoué, ils ont été victimes de ce que Josef Schumpeter appelait la « destruction créatrice ».
Les investisseurs chantent les louanges d’Amazon, qu’ils considèrent comme le « substitut créateur ». Mais où sont les profits ? Amazon a détruit les petits revendeurs en cassant les prix. Il semble cependant qu’il l’ait fait en réduisant ses propres marges bénéficiaires.
Maintenant que le modèle est si connu, comment augmenter les prix sans inviter les concurrents à prendre leur part du marché ? Et à quoi bon une telle part de marché si elle ne dégage pas de profits ? Et pourquoi les investisseurs paieraient-ils 432 Mds$ pour une société dont le business model dépend du fait de ne pas gagner de l’argent ?
[NDLR : A la recherche d’entreprises avec un business model sain… des perspectives de croissances brillantes… sur des marchés que les banques centrales ne manipulent pas… et capables de vous donner des rendements trois fois supérieurs à ceux de votre assurance-vie ? Alors… rendez-vous le 8 juin prochain !]
Sans nul doute, cette situation est totalement inédite.