La Chronique Agora

Actions : quatre risques en 2014

▪ L’investissement en actions n’est pas forcément toujours le plus rentable sur le long terme. A l’aube de cette nouvelle année, voici les risques que vous devriez considérer sur les marchés… et des suggestions pour les limiter.

On enseigne toujours officiellement aux étudiants en économie et finance que l’investissement en actions est le plus profitable sur le long terme. C’est ce que dit n’importe quel conseiller financier de n’importe quelle agence bancaire à tout client souhaitant diversifier son épargne — en lui faisant comprendre qu’il finira toujours par revoir son cours.

Le célèbre ouvrage Stocks for the Long Run ["Des actions pour le long terme", ndlr.] de Jeremy Siegel, professeur de finance à la Wharton School de l’Université de Pennsylvanie, est considéré comme une bible financière.

Derrière tout cela, l’idée que le sens de l’histoire, c’est des perspectives bénéficiaires futures sur des entreprises qui seront toujours réévaluées en hausse sur le long terme.

Pourtant, l’idée selon laquelle l’investissement en actions doit s’inscrire dans la durée — ce qui en soi est une bonne chose pour financer la création de richesses sur le long terme et non les dépenses improductives d’Etats surendettés — n’est malheureusement plus une recommandation pertinente.

▪ Trois exemples récents
Trois exemples de l’histoire récente des marchés nous montrent que bon nombre d’investisseurs en bourse n’ont jamais revu leurs cours suite à des périodes de forte baisse… et ne les reverront sans doute jamais. Eh oui, il arrive de temps à autre aux marchés de se tromper lourdement et dramatiquement dans l’évaluation des actifs financiers !

Les actionnaires japonais, notamment, attendent encore leur retour sur investissement. A son sommet, le Nikkei était à 39 000 points en 1989. Il est à 15 870 aujourd’hui, soit une baisse de 60% sur une période de 24 ans. Le Nikkei avait vu sa valeur tripler entre 1985 et 1989 avant de buter sur un krach immobilier accroissant les encours de créances douteuses accumulées sur les ménages et les entreprises. S’ensuivit une grave crise bancaire.

__________________________

+25%, +17%, +25%…
Avec trois positions dénouées coup sur coup cette semaine, Mathieu Lebrun a rapporté à ceux qui suivent ses conseils +67% de gains cumulés

… et cela a été beaucoup plus simple que vous le pensez sans doute.

Vous pouvez maîtriser les marchés — et votre portefeuille… en seulement 20 minutes par semaine. Voici comment…

__________________________

En 1994, sept banques spécialisées dans le crédit immobilier, les jusen, menacent leurs maisons mères, qui sont les principales banques du pays. En 1997, trois banques d’affaires font faillite : Sanyo Securities, Yamaichi Securities et la Hokkaido Takushoku Bank. Fin 1998, le gouvernement japonais nationalisera de deux banques d’affaires en faillite, Long Term Credit Bank et Nippon Credit Bank.

Une bulle immobilière s’était constituée sans que la banque centrale n’utilise les mesures non conventionnelles que nous connaissons aujourd’hui — lesquelles mesures permettent de maintenir en l’état les bulles d’actifs financiers.

Ensuite, le comportement des banques allait durablement changer avec une accumulation dans les bilans bancaires d’emprunts d’Etat japonais au détriment de l’investissement en actions et du financement de l’économie réelle.

– Les investisseurs japonais vieillissent sans avoir retrouvé leur mise d’il y a 25 ans.

– Les investisseurs de la bulle internet du début des années 2000 n’ont toujours pas revu les plus hauts historiques sur certaines valeurs : Alcatel (plus haut historique de 97 euros pour un cours de 3,25 euros aujourd’hui) ; Orange ex-France Télécom (plus haut historique de 219 euros pour un cours de 8,75 euros aujourd’hui) ; Vivendi (plus haut historique de 140 euros pour un cours de 18,7 euros aujourd’hui). Les marchés se seront lourdement trompés quant à la valorisation d’entreprises phares de ce que l’on appelait à la fin du siècle dernier la prétendue "nouvelle économie". Certes l’économie a évolué mais pas au point de délivrer pour ces valeurs les perspectives bénéficiaires délirantes attendues.

– Les investisseurs en valeurs bancaires en 2004 – 2006. Les marchés se sont également trompés dans leur valorisation du secteur bancaire en 2004-2006 en sous-estimant dramatiquement les risques systémiques (subprime en 2006-2007, souverains périphériques Zone euro en 2009-2011). Ils n’ont également pas anticipé les effets des évolutions réglementaires Bâle 3 avec la mise en place de nouveaux ratios de solvabilité et de liquidité pour les banques.

De la même façon que le Nikkei ne reverra "jamais" son niveau de 1989 et que les valeurs Alcatel, Vivendi et France Télécom ne reverront "jamais" leurs cours de 2000, les grandes valeurs bancaires ne devraient pas, elles non plus, renouer avec leurs cours d’avant-crise, période où le risque systémique n’était pas évalué.

Certains nous rétorqueront qu’en dépit de ces trois exemples, les indices boursiers américains (tout du moins le Dow Jones et le S&P 500) ont largement dépassé leurs niveaux de 2007.

Certes… mais n’oublions pas que les programmes successifs de quantitative easing depuis 2009 auront conduit la Fed à acheter autour de 3 500 milliards de dollars de titres obligataires (Treasuries, mortgage backed securities). Ces 3 500 milliards de dollars sont de l’argent fourni aux vendeurs de ces titres (essentiellement les professionnels de la finance) ; lesquels en ont investi une bonne partie en Bourse. Comme l’écrivait récemment Philippe Béchade, aux Etats-Unis, le principal poste de dépenses des entreprises ces deux dernières années n’est pas l’investissement productif mais le rachat de leurs propres titres en bourse.

S’il est difficile d’imaginer sur certains secteurs et certaines zones géographiques de revoir les cours boursiers sur lesquels l’on avait investi il y a 10, 15 ou 20 ans, cela ne veut pas dire qu’il faille remettre en cause l’investissement boursier, à condition d’anticiper certains risques.

▪ Marchés actions : les quatre risques de 2014
Moins d’acheteurs. Ce n’est pas un scoop mais les évolutions réglementaires (Bâle 3 pour les banques et Solvency 2 pour les assureurs) n’inciteront pas les banques et les assureurs à renforcer leur allocation d’actifs en actions.

Le risque bancaire. Vous entendrez souvent parler en 2014 de l’AQR (pour asset quality review ou revue de qualité des actifs). La BCE va scruter les bilans de 130 banques européennes : provisions passées sur les créances douteuses, obligations d’Etat détenues, sources de refinancement et mobilisation de capitaux, niveau et qualité des fonds propres, produits dérivés en hors bilan, engagements hors bilan souvent mal appréhendés par les régulateurs eux-mêmes, etc…. Autant de sujets qui ne manqueront pas ici ou là d’inquiéter les marchés.

Le risque américain. La moindre inquiétude sur le rythme des rachats de la Fed peut provoquer de violentes turbulences, comme nous l’avons vu à la fin du printemps 2013. Or nous sommes officiellement rentrés aux Etats-Unis — même si cela se fait à un rythme très progressif et très mesuré — dans un cycle de moindre progression de la création monétaire. La Fed a annoncé réduire de cinq milliards de dollars, à 40 milliards, ses achats mensuels de bons du Trésor — et de cinq milliards de dollars, à 35 milliards de dollars, ses achats mensuels de titres hypothécaires.

En 2014 on pourrait, selon les études économiques de Natixis, avoir le calendrier suivant de réduction des achats de la Fed :

  

L’économie américaine pourra-t-elle supporter une remontée des taux à long terme en 2014 suite à la mise en place de l’extinction même progressive du QE3 ?

Le risque japonais. L’agressivité monétaire sans précédent de la Banque du Japon (1 350 milliards de dollars de création monétaire prévue entre début 2013 et fin 2014) ne parviendra jamais à annuler le désastre boursier japonais de ces 23 dernières années. Il est vrai cependant que l’indice Nikkei aura réussi à reprendre en 2013 pas moins de 52%, de 10 400 à 15 870 points. Mais sur quoi la politique monétaire extraordinairement expansive de la Banque du Japon va-t-elle déboucher ? Deux risques menacent — peut-être pas pour 2014 mais plus tard : une nouvelle crise bancaire sur fond de remontée des taux d’intérêt à long terme car les banques japonaises sont massivement exposés aux obligations nippones ; le vieillissement de la population et ses conséquences sur la désépargne en actions.

Nous verrons dès jeudi les stratégies qui vous permettront de contrer ces risques sur les marchés actions…

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile