La Chronique Agora

A-t-on accroché une nouvelle locomotive au train du marché boursier ?

** Ce marché baissier brutal a-t-il finalement touché à sa fin ? Un nouveau marché haussier l’a-t-il remplacé ?… Seul Warren Buffet le sait. Le reste d’entre nous ne peut faire que des suppositions. Mais avant de nous perdre en conjectures, levons nos petits doigts en l’air pour tenter de savoir dans quelle direction souffle le vent des récentes tendances financières…

La bonne nouvelle est que le marché du crédit est en train de dégeler. La mauvaise est que personne ne s’en préoccupe sur les marchés boursiers. L’indice S&P 500 est en baisse de 39% par rapport au début de l’année, et de 43% par rapport à octobre dernier. On aurait pu penser que le dégel des crédits produirait un peu plus d’enthousiasme sur les marchés. Mais les investisseurs ont d’autres soucis en tête pour l’instant. Les revenus par exemple. De façon générale, ils s’interrogent sur l’ampleur que cette récession globale pourrait prendre. Combien encore de licenciements ? La situation pourrait-elle gravement se détériorer ? A en juger par le prix des actions, c’est probable.

Mais au moins un investisseur prospère commence à tremper ses orteils dans l’eau. Jeremy Grantham, fondateur de la société de gestion d’investissements Grantham, Mayo, Van Otterloo, a été baissier sur les actions au moins depuis 2003. Mais, bien que lentement, il commence à changer d’attitude.

"En dessous de 1 000 points selon l’indice S&P 500", déclare Grantham, "les actions américaines sont des acquisitions très raisonnables pour des gestionnaires courageux et décidés à prendre de l’avance… L’histoire met cependant en garde contre de probables nouvelles baisses".

Au cours du marché baissier, Le S&P 500 a atteint son plus bas niveau en octobre 2002, à 776 points. C’est 11,5% en dessous de son niveau de vendredi en clôture à 877. Et si un tel déclin devait se poursuivre, il se retrouverait à exactement 50% en dessous de sa valeur record de 1 552 points (fixée au 31 octobre de l’année dernière).

C’est un marché baissier d’une ampleur historique. En s’aventurant sur le marché à son niveau actuel, Grantham suppose que ce marché baissier est à peu près similaire à ceux des 137 dernières années.

** Le marché baissier de 2008 s’est déjà classé parmi les plus importants de tous les temps. Les actions sont certainement bon marché en ce moment. Mais pour un grand nombre d’investisseurs, c’est sans intérêt.

Ces investisseurs vendent leurs actions parce qu’ils y sont FORCÉS.

Nous appelons ces vendeurs des "gestionnaires de fonds de couverture". Ils DOIVENT vendre parce que presque tous leurs paris à effet de levier sur les actions, obligations et matières premières explosent… ce qui signifie qu’ils doivent se retirer pour atteindre leurs marges. En même temps, ils reçoivent des dizaines de milliards de dollars de demandes de désengagements de la part de leurs investisseurs. Ce qui signifie qu’ils doivent vendre plus encore pour rassembler l’argent à leur rendre. Ce n’est pas une situation agréable.

Normalement, lorsqu’un vendeur doit vendre, c’est le moment idéal d’acheter. Mais il n’est pas souhaitable de se retrouver en position d’acheteur s’il y a plus de ventes forcées en route. Et c’est maintenant la seule question sur le marché. Combien encore d’effet de levier avant de se rétablir ?

Eh bien, avant que la crise ne frappe, les fonds de couverture contrôlaient 2,4 trillions de dollars de fonds d’investissements. Ils auraient utilisé ce capital pour garantir des trillions de dollars supplémentaires d’emprunts (avec un rendement d’endettement de 10/1, 20/1, et 100/1). Mais maintenant, tous ces actifs achetés par les fonds de couverture avec de l’argent emprunté sont liquidés. Il est donc aisé de comprendre comment il est possible d’atteindre de nouveaux bas records.

** Ma prédiction ? Les marchés boursiers vont considérablement rebondir en novembre. Il y a au moins trois événements qui se profilent à l’horizon, susceptibles de leur donner un coup de fouet. D’abord, si Obama est élu, c’est la fin de l’incertitude sur les élections américaines — et un certain optimisme, largement irrationnel, selon lequel les choses vont maintenant être différentes, meilleures et plus agréables. Ensuite, nous bénéficierons d’un nouveau plan de stimulation de la part du congrès démocrate aux États-Unis, ce qui devrait booster les actions. Et enfin, la grande réunion du G20 à Washington. Quelque chose qui "semble" bon devrait découler de tout ça.

Ces trois facteurs pourraient entrer en synergie pour conduire à une reprise du marché qui ait l’air convainquant d’ici Noël. Ce serait un peu comme la reprise de 1929-1930 qui a précédé un effondrement épique des actions pour les deux années suivantes. Ou je pourrais complètement me tromper et les ventes des fonds de couverture pourraient simplement tout submerger et faire chuter le marché beaucoup plus encore, sans qu’un rebond n’ait lieu.

Les actions sont vraiment bon marché. Il faudrait donc les acheter. Malheureusement, elles pourraient devenir encore moins chères. Il faudrait donc les vendre. Nous nous en remettons donc à la sagesse de Jeremy Grantham, un investisseur qui commence à acheter, tout en s’attendant à voir les prix diminuer encore.

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