▪ L’économie américaine engendre près de 13 000 milliards de dollars d’activité chaque année. Et le président de la Réserve fédérale américaine engendre quant à lui 13 000 milliards de haussements de sourcils chaque année.
Il y a 10 jours, à Jackson Hole, dans le Wyoming, Bernanke a fait hausser quelques sourcils supplémentaires en affirmant que la Réserve fédérale gardait — plus ou moins — le contrôle de la situation économique, ici aux Etats Unis.
Comme un homme qui tombe dans les escaliers, se relève et dit "c’est ce que j’avais prévu de faire", Bernanke a insisté sur le fait que la trajectoire tragique de l’économie n’était ni surprenante, ni particulièrement inquiétante. "Les conditions préalables à une reprise de la croissance en 2011 semblent être toujours en place", a déclaré le président de la Fed. Et même si la croissance économique continue à décevoir, le président affirme qu’il a encore beaucoup de gadgets en réserve dans son sac à malice.
▪ "Si des actions supplémentaires se révélaient nécessaires", a-t-il affirmé, "d’autres politiques sont disponibles". La liste "d’actions supplémentaires" potentielles comprend : 1) davantage de rachats de titres, 2) un changement dans la déclaration de principe de la Fed, et 3) une réduction du taux d’intérêt qu’elle paie sur les réserves excessives des banques.
En d’autres termes : 1) imprimer des devises, 2) faire des déclarations réconfortantes et 3) encourager la prise de risque et l’effet de levier.
"Le FOMC fera tout ce qui est en son pouvoir pour assurer la continuité de la reprise économique", a ajouté Bernanke. "Le problème, à ce stade, ce n’est pas d’avoir ou non les outils pour soutenir l’activité économique et empêcher l’inflation. Car nous les avons".
Voici notre question : est-ce que les paroles ou les actions d’un président de la Réserve fédérale — même s’il est intelligent et bien intentionné, comme l’est sans doute Ben Bernanke — ont la moindre chance de contrecarrer les forces naturelles de l’entropie économique ? Ou pour poser la question différemment, un homme peut-il réellement changer le cours d’une économie de 13 000 milliards de dollars ?
Votre chroniqueur est sceptique. Ben Bernanke ne serait-il pas simplement en train de construire des châteaux de sable ?
Pendant un temps, les murs en sable vont réussir à dévier l’écume. Mais à la fin de la journée, l’océan aura repris ses droits et le petit Ben aura pris un coup de soleil.
▪ Vendredi, il y a deux semaines, les investisseurs ont semblé croire que les murs en sable de la Fed pouvaient vraiment repousser les forces de la liquidation de la dette et de la destruction créative. Ils semblaient croire qu’une "déclaration du FOMC" par-ci et une "mesure politique" par-là pouvaient empêcher des entreprises condamnées de sombrer ou des propriétaires endettés d’être ruinés.
Alors l’espace d’une journée, la Bourse est remontée, le prix des obligations a chuté… et les investisseurs ont nourri de beaux espoirs. Mais la vérité, c’est que la Bourse était en aussi piteux état vendredi qu’elle l’était jeudi.
Les actions ne sont pas remontées parce que Ben Bernanke a repris le contrôle. Les actions sont remontées parce que le moment d’un rebond était arrivé. Rien de plus ; rien de moins. De nombreuses mesures d’opinion d’investisseurs ont chuté, atteignant des niveaux extrêmement négatifs. Et comme le sait tout investisseur averti, quand l’opinion touche un extrême, les prix des actions vont généralement dans la direction opposée… du moins pendant un temps.