La Chronique Agora

Yahoo ! Une rafale d’OPA fait claquer la porte de la déprime

** La semaine n’est redevenue positive à Paris que vendredi matin… alors qu’un vent de déprime soufflait encore sur les marchés jeudi dernier. Les investisseurs considéraient alors que la décision de la Fed de procéder à une réduction de 50 points supplémentaires du loyer de l’argent — -125 points en 10 jours — était dictée par le constat d’une dégradation conjoncturelle des plus alarmantes.

Et G. W. Bush déclarait ce vendredi constater de « sérieux signes » d’affaiblissement de l’économie américaine… Il en a conclu « qu’il faut faire quelque chose », ce qui est en complète contradiction avec ses précédentes interventions où il n’était question que de l’extraordinaire capacité de la machine économique US à générer de la valeur ou à encaisser des chocs comme ceux de l’été 2007.

Difficile de déterminer si la totalité des périls qui menacent les marchés sont désormais « pricés » mais le mois de février a bien mieux débuté que le mois de janvier. Après avoir subi une perte de 13,3% — la plus massive depuis les -17,5% de septembre 2002 et les -20% de septembre 2001 — le CAC 40 met fin à une série noire de cinq semaines de baisse consécutive et engrange 2% d’un vendredi sur l’autre.

Contrairement à ce qui s’était produit la veille du week-end précédent, ce sont les acheteurs qui ont repris la main au cours de la dernière demi-heure de cotations. Cette prise en main est la preuve que la confiance semblait revenir. Un début de semaine positif était anticipé même pour ce lundi alors que la thématique des OPA — imminentes sur la Société Générale, Yahoo! ou Rio Tinto — a dominé l’actualité de ce 1er février.

Paris a gagné 2,22% dans un volume de 8,75 milliards d’euros, gonflé par de multiples allers-retours entre 5 010 et 4 930 points. Du point de vue technique, l’ouverture d’un gap au-dessus des 4 863 points constitue un élément favorable… mais seul le franchissement confirmé des 5 000 points au cours des prochaines heures pourrait valider les espoirs — et les nôtres en font partie — de retour dans la zone des 5  250/5 300 points.

Outre-Atlantique, Wall Street n’explosait pas à la hausse comme cela avait été envisagé au moment de la divulgation de l’OPA de Microsoft de 44,6 milliard de dolllars sur Yahoo!. Voilà que se dresse potentiellement devant Google un sérieux rival planétaire… Google — dont les bénéfices publiés la veille avaient déçu — chutait de 9% et Microsoft de 6,5%. Ces chutes ont largement suffi à contrebalancer les 45% de hausse de Yahoo.

** Les craintes de récession ont été mises provisoirement entre parenthèses mais elles ne se sont certainement pas évanouies avec les chiffres US de vendredi. L’économie américaine aurait — le conditionnel est de rigueur — détruit 17 000 emplois au mois de janvier. Mais très paradoxalement, le taux de chômage officiel se contractait de 5 à 4,9% — merci la pyramide des âges et les départs en retraite massifs de fin 2007.

Mais comment se fier aveuglément aux chiffres de l’emploi qui font chaque mois l’objet de révisions que nos esprits cartésiens jugent surréalistes ? Le maigre total de 18 000 créations de postes annoncé au mois de décembre aux USA se retrouve gonflé de 64 000 nouveaux emplois après retraitement des données préliminaires — soit 82 000 postes créés au total. Quoi qu’il en soit, la moyenne sur les deux derniers mois s’établit autour de 30 000 postes alors qu’il en faudrait au moins 100 000 de plus pour absorber la main d’œuvre disponible aux Etats-Unis. Le secteur de la construction a notamment détruit 27 000 emplois et l’industrie 28 000. Cependant, l’éducation et la santé ont généré 47 000 postes et le secteur des loisirs 19 000.

La bonne surprise de vendredi avait trait à l’activité industrielle avec un bond de 2,3 points de l’indice ISM manufacturier à 50,7 points — contre les 47 anticipés.

** Le fait d’actualité de vendredi dernier demeurera sans conteste le lancement d’une OPA de Microsoft sur Yahoo. Microsoft offre 31 $ par titre, un prix très relatif puisque la prise de contrôle se ferait moyennant une formule mixant du cash et une OPE.

Dans son communiqué, Microsoft soulignait que le marché de la publicité sur internet s’accroît à un rythme très rapide — de 40 milliards de dollars en 2007 à près de 80 milliards prévus à horizon 2010 — et il n’est pas question de laisser Google mettre seul la main sur ce gigantesque gâteau. Par ailleurs, les groupes miniers britanniques BHP et Rio Tinto flambaient de 10% à 13% sur l’anticipation d’un raid de Chinalco, un groupe minier chinois, qui vient d’effectuer un ramassage conjoint — avec Alcoa — de 12% du capital de Rio Tinto.

A Paris, la Société Générale (+5,5%) faisait l’objet de rumeurs de rachats de plus en plus précises par ses concurrentes, le Crédit Agricole et BNP Paribas. Le scénario privilégié à l’heure actuelle serait celui d’une offre globale incluant un projet de cession d’activité, lancée par BNP Paribas ou le Crédit Agricole — les deux géants se partageant d’une part le réseau et les activités banque d’affaire d’autre part.

La question cruciale — si l’on en croit les acteurs du marché — n’est plus de savoir si une OPA sera lancée sur la Société Générale… mais quand. Les rumeurs vont bon train concernant une offre survenant avant l’augmentation de capital de 5,5 milliard d’euros annoncée le 24 janvier dernier. Sur l’ensemble de la semaine, avec ses 19% de hausse et ses 75 millions de titres échangés, la Société Générale fut de très loin le principal contributeur à la hausse du CAC 40, loin devant Vinci (+8,4%), Arcelor Mittal (+8,1%) ou Unibail Rodamco (+7,3%). Le grand perdant fut le titre Harmony avec une chute de 7,75%… un paradoxe saisissant puisque l’once d’or a pulvérisé ce 1er  février un record à 935 $ l’once.

Philippe Béchade,
Paris

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile