▪ Il faut se méfier des « mains invisibles »… Certaines se glissent dans vos poches dans les lieux les mieux fréquentés pour en dérober le contenu pendant que vous parlez affaires.
Cela constitue le quotidien de beaucoup d’opérateurs confrontés à une « chasse aux stop » permanente — un procédé qui consiste à bâtir des carnets d’ordres fictifs où l’intervenant ignore qu’il est pratiquement le seul à être présent sur le marché.
La victime se croit protégée par des centaines de demandes (ou d’offres) alors que son stop de protection est presque immédiatement accessible. Il sera activé par un « acheté/vendu » à sa limite de déclenchement, les ordinateurs haute fréquence annulant en quelques millisecondes le brouillard quantique d’ordres factices qu’ils génèrent à longueur de séance.
Ce petit jeu pervers est particulièrement payant dans des marchés sans consistance comme ceux que nous observons depuis lundi : peu d’intervenants, des carnets purgés des ordres qui arrivaient à échéance vendredi (fin de semestre) et qui tardent à se reconstituer dans la crainte de l’inconnu avec la conférence de presse de Mario Draghi jeudi et les chiffres de l’emploi américain.
Alors que les marchés étaient le plus souvent unidirectionnels depuis mi-novembre (à la hausse comme à la baisse durant toute une journée ou toute une semaine), les voici devenus instables. On constate plusieurs changements de tendance — souvent inexplicables — au cours d’une même séance.
C’est un véritable Eldorado pour les algorithmes chasseurs de stops : il devient possible de plumer un même day trader dans les deux sens à quelques minutes d’intervalle.
▪ Montagnes russes
La séance de mardi fut assez comparable en Europe à celle de vendredi dernier. L’ouverture s’est faite pratiquement au plus haut et la clôture pratiquement au plus bas… avec un profit en montagnes russes entre les deux.
Le CAC 40 a reperdu l’intégralité de ses gains de la veille, dans un volume médiocre de 2,2 milliards d’euros (facile de manipuler les actions et les indices dans ces conditions), tandis que Francfort lâchait 0,95% et Milan 0,6%.
L’Euro-Stoxx 50 qui perdait 0,74% s’est maintenu in extremis au-dessus des 2 600 points mais ce support risque de ne pas pouvoir être défendu très longtemps… Y a-t-il un réel intérêt à le faire alors que tant d’opérateurs ont placé des stops juste en dessous de ce seuil ?
Nous sommes prêt à parier qu’un brusque contrepied surgira une vingtaine de points plus bas aujourd’hui, dès que la première rafale de ventes sera épuisée !
▪ Revirement à la baisse à Wall Street
Wall Street a longtemps fait mine poursuivre sa lévitation mardi, bien à l’abri des turpitudes économiques du Vieux Continent, avant de lâcher prise.
La parution de commandes à l’industrie américaine (conformes aux anticipations, à +2,1%) avait soutenu initialement la tendance à Wall Street. Les indices progressaient tranquillement de 0,6% vers 17h, alors que Paris s’enfonçait bizarrement dans le rouge.
Un revirement à la baisse s’est enclenché à partir de 18h, une fois les places européennes bien closes. La glissade s’est ensuite accélérée jusque vers 20h30 — les indices américains perdaient alors 0,5% en moyenne.
Quelques rachats sans conviction ont permis de réduire un peu les pertes en toute fin de séance. Le Dow Jones a toutefois lâché 0,3%, tandis que le Nasdaq (-0,04%) et le S&P 500 (-0,06%) ont fini quasiment à l’équilibre — tout comme le VIX, à 16,5.
▪ Pourquoi une telle faiblesse ?
Pour avoir bien étudié le fil des actualités parues en fin de journée aux Etats Unis, il est assez difficile d’identifier un catalyseur pour expliquer le repli de New York.
Les commandes à l’industrie américaine sont ressorties en ligne avec le consensus qui tablait sur une hausse de l’ordre de 2%. Hors aéronautique, un secteur particulièrement volatil, elles ont progressé de seulement 0,6% en mai, ce qui apparaît relativement banal. Les analystes jugent cependant que de tels chiffres plaident plutôt en faveur de l’arrêt progressif des injections de liquidités de la Réserve fédérale dans les mois à venir.
Cette opinion a certainement été confortée par les déclarations de William Dudley (président de l’antenne régionale de la Fed de New York), qui s’est dit optimiste sur la poursuite de l’accélération de l’économie américaine en 2014.
Certains stratèges expliquent également que de nombreux opérateurs ont commencé à s’alléger en prévision d’un « pont » de quatre jours (pour la fête nationale américaine). Le marché sera certes ouvert vendredi mais il y aura pas mal d’absents dans les salles de marché.
Wall Street fermera dès ce mercredi après-midi puis toute la journée de jeudi. Certains investisseurs ne veulent pas courir le risque d’un surcroît de volatilité avec la conférence de presse de Mario Draghi jeudi puis les chiffres de l’emploi américain vendredi (165 000 créations d’emplois attendues, taux de chômage à 7,5% ou inchangé à 7,6%).
▪ L’or noir refait parler de lui
Le fait du jour restera à nos yeux la forte remontée des cours du pétrole (+1,5%) qui flirtait avec les 100 $/baril hier soir. Nous avions attiré votre attention dès lundi sur le véritable raz-de-marée de manifestants opposés à la ligne autocratique adoptée par le président égyptien depuis neuf mois.
Lâché très ouvertement par l’armée lundi puis par plusieurs de ses ministres mardi (le ministre des Affaires étrangères notamment), ainsi que par le porte-parole du gouvernement puis celui de la présidence (un comble !), il semble que son bref règne –controversé — à la tête de l’Egypte touche déjà à sa fin… tout du moins sous sa forme actuelle.
Voilà un nouveau foyer d’incertitude qui ressurgit au Proche-Orient. Rappelons que l’Egypte compte pas moins de 90 millions d’habitants et occupe une position centrale entre la Syrie, Israël, la Lybie et le Soudan. Trois sur quatre de ces pays restent de véritables poudrières dans cette région… où les puits de pétrole ne sont jamais loin.