La Chronique Agora

Vous avez un puits de pétrole ou une mine d'or ?

** A moins que vous ne possédiez un puits de pétrole ou une mine d’or, 2008 n’a pas été très satisfaisante. Sur les 52 principales places mondiales, 49 sont dans le rouge sur l’année. L’Irlande, par exemple, a perdu 15% de sa valeur boursière. Le Vietnam s’est fait écraser.

* Aux Etats-Unis, la chute des actions a coûté aux investisseurs près de 1 000 milliards de dollars cette année. Les pertes dues à l’immobilier représenteraient un tiers de cette somme. Mais ce n’est qu’un début. Depuis 2006, on dit que la valeur des maisons américaines a chuté de 16%. Case/Shiller, l’expert ès tendances immobilières, pense que 15% de perte supplémentaire sont à venir avant que le marché de l’immobilier ne touche le fond en 2010 — soit une nouvelle coupe de 3 000 milliards de dollars pour les ménages américains.

* Souvenez-vous — comment pourriez-vous l’oublier ? — que le "déficit de financement" du gouvernement américain se monte à environ 57 000 milliards de dollars… tandis que la "dette nationale" officielle du gouvernement fédéral augmente à elle seule de 1,5 milliards de dollars par jour. Eh bien, on apprenait hier que la "valeur nette combinée" de tous les ménages US était de 56 000 milliards de dollars. Voyez-vous, techniquement, les Etats-Unis sont déjà ruinés — avec plus de dettes que d’actifs. Mais le côté "actifs" du livre de comptes n’inclut pas la valeur des propriétés gouvernementales US — comme la Maison-Blanche ou le Pentagone — qui pourraient être vendues à un fonds souverain étranger, en cas d’urgence.

* Et une urgence s’approche probablement, alors les autorités américaines feraient bien de faire évaluer leurs propriétés. Mais nous parlons d’immobilier, aujourd’hui, et non de la future banqueroute des Etats-Unis d’Amérique.

** En ce qui concerne le toit au-dessus de leurs têtes, les Américains ne se font probablement pas d’illusions. Quant à l’autre toit — ou le toit additionnel — qu’ils ont acheté pour profiter du plus grand boom des prix de l’immobilier en un siècle, nous sentons une révélation arriver. Un éclair de lucidité guette, comme un tigre dans les buissons… prêt à les déchirer en lambeaux.

* Il nous a atteint de plein fouet ce week-end. Nous vous en faisons part, cher lecteur, en utilisant les termes d’un économiste éclairé, pour que vous ne soyez pas pris au dépourvu : les maisons, ça craint.

* Il y a une chose terrible, lorsqu’on possède une maison : lorsque les prix grimpent, tout va bien. La plus-value compense les frais. Mais lorsque les prix baissent, vous encaissez non seulement la moins-value… mais vous commencez à sentir aussi les frais de "fonctionnement". Vous pouvez avoir une action en portefeuille sans payer de taxes foncières. En plus, elle peut vous rapporter des dividendes — en d’autres termes, on vous paie pour posséder l’action. Idem pour les obligations. Vous encaissez votre coupon… et espérez que le rendement baisse pour pouvoir faire une plus-value sur l’obligation elle-même. Les entreprises, les partenariats, l’immobilier commercial — tous produisent (ou devraient produire) plus de gains que de frais. On peut même appliquer ce principe à un chien… Il faut le nourrir, mais au moins, il vous lèche la main. Et une femme… enfin bref.

* Mais une maison ? Elle peut produire des gains si on l’achète assez bon marché et qu’on trouve de bons locataires. Sinon, des pertes sont au programme… et parfois des pertes majeures.

* Forcément, les propriétaires sont désormais pressés de laisser d’autres personnes qu’eux encaisser les pertes. En Grande-Bretagne, l’un des plus grands prêteurs hypothécaires a été nationalisé. Aux Etats-Unis, les organismes de prêt privés font le dos rond… les prêteurs soutenus par le gouvernement prennent leur place. Ces organismes sont à l’origine de 81% des prêts hypothécaires du dernier trimestre 2007 — plus du double de ce qu’ils représentaient au plus haut du boom de l’immobilier.

* La socialisation du secteur des prêts hypothécaires est une idée qui attire peut-être des voix durant une crise de l’immobilier — durant une année électorale, elle est tout simplement irrésistible. Dans les faits, alors que la Chine augmente ses critères de réserves bancaires pour lutter contre l’inflation… et garnit ses coffres de dollars… les Etats-Unis gonflent leurs propres réserves avec des prêts immobiliers, et encouragent leurs banques à prêter plus librement.

* Et donc, au Pays de la Liberté, les gens se tournent vers le gouvernement non seulement pour leurs médicaments et leur retraite, mais également pour la nourriture (un nombre record d’Américains bénéficie de chèques alimentaires) et pour l’immobilier. Si le gouvernement ne soutenait pas l’industrie des prêts hypothécaires — sans la Fed, Fannie, Freddie et les crédits d’impôts — les Américains devraient payer plein tarif le toit au dessus de leurs têtes.

* Personne ne veut cela… et aucun candidat n’avance qu’ils doivent le faire…

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