La Chronique Agora

Votre propre plan de relance boursière

** Je ne suis pas sûr que la Bourse ait atteint son plancher définitif pour le Grand Marché baissier de 2007-2009. Mais même si des chutes supplémentaires nous attendent, il y a certainement quelques actions qui valent le coup d’être achetées.

– En 1932, les Etats-Unis pataugeaient dans les eaux troubles de la Grande Dépression. La question qui était alors sur toutes les lèvres était la suivante : que faut-il faire ? L’édition du 14 août 1932 du New York Times rapportait la solution offerte par Henry I. Harriman, alors président de la Chambre de Commerce. "H. I. Harriman propose un plan de relance", annonçait le gros titre de la première page : "précipitez vous sur la bière". (Merci à James Grant de nous avoir fait part de ce titre.)

– Bon, c’était pendant la prohibition. Et pourquoi subir les conséquences d’une catastrophe financière dans la sobriété ? Harriman avait également suggéré une baisse de 25% pour "tous les budgets gouvernementaux" et un remaniement de tout le système fiscal. Les temps changent, en fin de compte. Il est difficile d’imaginer une personne haut placée soumettre ce genre de proposition aujourd’hui.

– Quoiqu’il en soit, les investisseurs se trouvent aujourd’hui dans la pire situation boursière depuis les premières années de la Grande Dépression. Contrairement à leurs aïeux, ils ont le droit de boire de la bière. Mais comme leurs aïeux, ils se demandent sûrement ce qu’ils doivent faire. Je n’ai pas de solution politique à offrir, mais j’ai une sorte de plan de relance pour votre portefeuille — quelques idées concernant les secteurs qui pourraient bien s’en tirer dans les années à venir, même si l’économie est en difficulté.

** J’investirais dans ces secteurs économiques pour lesquels il existe de réels problèmes de goulots d’étranglement et de rareté, comme les ports, les routes, les pipelines et l’énergie. En ce moment même, les investisseurs entrent dans une niche d’opportunités de bénéfices grâce à la construction et à la rénovation d’infrastructures mondiales.

– Le président Obama prévoit de dépenser des dizaines de milliards de dollars sur des projets d’infrastructure. Et ce n’est pas le seul. Le Royaume-Uni a récemment annoncé un plan de relance de 30 milliards de dollars — dont une grande partie est réservée à l’infrastructure. L’Argentine a rapidement suivi, avec son propre plan de relance. L’agence de presse AFP appelle ça un "énorme plan de dépenses publiques pour injecter plus de 21 milliards de dollars dans les infrastructures argentines". La Chine a elle aussi son New Deal de 586 milliards de dollars, comme nous allons le voir. Mais où va donc tout cet argent ?

– Une grande partie de ces liquidités est destinée aux projets de travaux publics, comme réparer les infrastructures branlantes ou construire des projets totalement nouveaux. Le plan de relance chinois comprendra également une injection de liquidités pour promouvoir les énergies alternatives et la technologie écologique. Les dépenses d’infrastructure de la Chine ont déjà augmenté de 20% par an depuis 30 ans.

– L’impact sur l’économie chinoise a provoqué des transformations radicales. Par exemple, de nouvelles autoroutes relient aujourd’hui des petites villes rurales isolées à des villes beaucoup plus importantes. Résultat, l’activité économique entre les deux lieux est en pleine expansion. Les étonnantes transformations de développement de la Chine me rappellent les effets des canaux sur le transport de marchandises aux Etats-Unis dans les années 1820-1830. Le canal Erie à lui seul a réduit les coûts de transport de 90%, selon Tomorrow’s Gold ["L’or de demain", NDLR] de Marc Faber. Il reliait les marchés aux grains des Grands Lacs à New York. D’autres canaux quadrillaient l’intérieur du pays, pour relier tous ces endroits à la côte Est, ce qui a fait exploser la croissance du commerce.

– Comment payer tous ces plans de relance est la question qu’aucun pays ne semble se poser pour le moment. Tout le monde est persuadé qu’il faut éviter la contraction économique à tout prix.

– La position budgétaire du gouvernement américain est atroce, avec un déficit qui atteint les 1 000 milliards de dollars, et la dette fédérale qui approche des 10 000 milliards. La Chine est en bien meilleure condition financière. Mais le plan de relance chinois est également un gros pari. Cela représente près de 14% de l’économie chinoise. Comme le déclare le Wall Street Journal : "le gouvernement central va sûrement devoir relancer la vente de ses propres obligations pour financer le plan de relance".

– Ces deux plans d’expansion vont certainement mal finir…d’un point de vue budgétaire et monétaire. Souvent, ces plans de relance de l’infrastructure mènent à des dépenses incongrues et à un surplus d’investissement ; dans les interventions gouvernementales comme dans un restaurant argentin, tout est toujours trop cuit… mais il y a quand même des profits à récolter avant que le steak ne soit complètement carbonisé.

– Les plans de relance de l’infrastructure se répandent comme une épidémie à travers le monde. Bientôt, tous les gouvernements d’économies au ralenti, de Cape Town à Moscou, de Brasilia à Bangkok, pourraient suivre. Tout ça laisse supposer un âge d’or pour les entreprises qui fabriquent de l’asphalte, des pipelines, des éoliennes, etc.
[NDLR : Notre spécialiste français en la matière, Sylvain Mathon, a lui aussi l’oeil sur cette nouvelle tendance économique. Nous vous donnerons tous les détails sur la question dès ce soir : restez à l’écoute !]

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