La Chronique Agora

Le véritable « Homme Oublié »

▪ Franklin Delano Roosevelt a utilisé le terme d' »homme oublié » dans un discours datant de 1932 pour décrire tous ceux qui se trouvent au bas de la pyramide économique et à qui, selon lui, le gouvernement devait porter assistance.

Mais William Graham Sumner (1840-1910), l’auteur du terme « homme oublié », avait une toute autre définition à l’esprit lorsqu’il le créa. Sumner voulait par ce terme dénoncer les soi-disant bonnes intentions de l’Etat et mettre en lumière la vérité, ce qui se passait vraiment. Il résuma cela par un simple schéma : A et B décident ce que C devrait faire pour X.

Il est à remarquer le peu de considération dans laquelle on tient celui qui occupe la position C. Tout le discours politique porte sur ce que A et B devraient décider et sur les besoins et exigences de X, qu’ils soient justes ou pas. Mais qu’en est-il de C ?

Nous arrivons ici à une vérité universelle qui forme la partie centrale du raisonnement de l’excellent ouvrage de Sumner It Is Not Wicked to Be Rich [« Il n’est pas mauvais d’être riche », NDLR] : « l’Etat ne peut donner un centime à un homme sans en prendre un chez un autre homme, et ce dernier doit être un homme qui a produit et économisé. C’est lui l’Homme Oublié ».

Sumner, professeur à Yale, était une sorte d’esprit universel des sciences sociales. It Is Not Wicked to Be Rich a été pour la première fois publié en 1883 sous le titre What Social Classes Owe to Each Other [« Ce que les classes sociales se doivent réciproquement », NDLR]. Il s’agit d’un petit livre aux arguments solides et affûtés qui vont droit au coeur de la nature des relations politiques — de la nature des droits et des devoirs. Sumner défend l’idée d’une société basée sur des contrats et sur des associations forgés par les hommes de leur propre gré. On ne peut soutirer par la force quelque chose à quelqu’un.

Il peut être difficile de croire qu’un ouvrage écrit depuis si longtemps puisse être si pertinent face aux complexités de notre époque. Mais ce livre traite essentiellement de principes intemporels et de la logique éternelle d’une société libre. Dans notre époque de sauvetages économiques et de budgets gouvernementaux titanesques, nous avons besoin de ce livre, aujourd’hui plus que jamais.

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Certes, il existe certainement pléthore d’autres livres présentant des idées similaires. Pourquoi alors rééditer celui-ci ? Tout simplement parce que Sumner est un écrivain extrêmement doué. Sa pensée est claire, son livre est amusant à lire. Il argumente ses idées de façon mémorable. Cela donne une puissante énonciation d’idées libertaires. Ce livre mérite plus d’attention qu’il n’en a.

Pour Sumner, l’objectif des lois et des institutions devrait être de protéger les hommes contre les vices de la nature humaine et contre le pouvoir arbitraire. Elles devraient garantir la liberté. Il n’y a aucun compromis à cela. « Toutes nos institutions doivent être testées sur le niveau à partir duquel elles garantissent la liberté », écrit Sumner.

Pas question d’admettre ne serait-ce qu’un instant que la liberté soit un moyen à des fins sociales, et qu’elle puisse être diminuée pour des considérations majeures. Celui qui avance cela a perdu le rapport entre tous les faits et facteurs d’un Etat libre.

Ce serait une erreur de considérer Sumner comme une sorte de défenseur basique des privilèges ou comme une sorte de darwiniste social insensible. Sumner est éminemment pratique et réaliste. Il souligne à plusieurs reprises que la vie est remplie d’incertitudes. Personne ne peut se garantir contre les épreuves. En outre, les épreuves et les malheurs d’un homme ne génèrent pas un droit moral à prestation aux dépends des efforts d’un autre homme.

Je considère également Sumner comme un vrai gentleman. Il est conscient de l’état critique de l’humanité sur cette planète solitaire et compatit à l’histoire humaine tout en adhérant à un code de conduite honorable qui, malheureusement, semble désuet aujourd’hui. Les seuls devoirs que les hommes se doivent les uns envers les autres, selon Sumner, sont le « respect, la courtoisie et la bonne volonté ». Sur ce point, il écrit :

« Par conséquent, les hommes doivent aux autres hommes, dans les bonheurs et les malheurs de cette vie, assistance et sympathie, du fait de leur participation commune dans la fragilité et la folie humaine. Toutefois, cette observation met l’assistance et la sympathie dans le domaine des relations privées et personnelles, sous le contrôle de la raison et de la conscience ».

Quelle philosophie de vie simple et belle ! Pourtant peu de gens voient comment le pouvoir de l’Etat inspire un ensemble de postulats totalement différents.

L’existence d’un pouvoir de l’Etat élève l’homme contre l’homme. Il élève ceux qui réussissent et créent contre ceux qui volent au travers des élections, des lois et des impôts. Au final, le fardeau de l’Etat retombe sur cet Homme Oublié, le véritable Homme Oublié. C’est celui qui a travaillé, économisé et accompli ce qu’il fallait pour prendre soin de lui et de sa famille. Et pourtant aujourd’hui, on lui dit qu’il doit à nouveau payer pour les autres, ceux qui n’ont pas travaillé et économisé comme lui.

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