La Chronique Agora

Un petit regard en arrière

▪ Arrêtez-vous un instant, cher lecteur, et regardez derrière vous. Regardez le chemin stupéfiant parcouru depuis l’effondrement de la bulle des dot.com.

Selon certaines estimations, 148 milliards de dollars auraient disparu durant la crise de 2000-2001. On aurait pu en prendre son parti ; laisser les start-up trop faibles faire faillite, redéployer celles qui restaient, serrer les dents et attendre que la crise passe. Car elle est passée… et internet ne s’en porte pas beaucoup plus mal aujourd’hui.

Mais non. Les autorités ont décidé d’intervenir. Elles ont baissé les taux, favorisé l’argent et le crédit facile. Cela a gonflé une autre bulle, celle de l’immobilier américain. Cette dernière a provoqué un effet de richesse, qui a à son tour favorisé de nouvelles bulles un peu partout : art, matières premières, mais aussi et surtout marchés actions.

S’en est suivi une première secousse, à l’été 2007 : la crise des subprime. On a grimpé d’un échelon dans la gravité : désormais, il ne s’agissait plus de pertes limitées aux portefeuilles boursiers, qu’ils soient institutionnels ou individuels. Non… les subprime touchaient au logement, affectaient même les personnes n’ayant pas investi en bourse… mais aussi et surtout… les banques.

Evidemment, on a remis le carrousel en marche : nouvelle intervention des autorités, Fed accommodante "aussi longtemps que nécessaire", taux en baisse jusqu’au zéro effectif ou presque…

… puis les choses ont brutalement pris de la vitesse, avec le krach de 2008-2009. La suite, vous la connaissez. Le système bancaire mondial a vacillé sur ses bases. Des dizaines de banques ont fait faillite. Lehman a coulé. Plus de 50 000 milliards de dollars de richesse ont été littéralement vaporisés de par le monde.

Croyez-vous que les autorités aient retenu la moindre leçon de tout ça ? Pensez-vous qu’elles aient fait preuve d’un peu d’humilité devant leurs échecs répétés à détecter ou empêcher les crises de se produire ?

Pas du tout.

Elles sont passées à l’étape suivante — celle que nous vivons actuellement. Celle qui consiste à créer de l’argent à partir de rien, à s’endetter dans des proportions gargantuesques et à mettre en place des "mesures non-conventionnelles".

Sous lesquelles se cache d’ailleurs, comme l’expliquait le Dr. Eberhardt Unger dans MoneyWeek, "une véritable explosion du crédit dans les bilans des banques centrales".

"Les achats d’obligations souveraines aux taux du marché maintiennent artificiellement les cours et empêchent que les rendements obligataires reviennent à des niveaux plus conformes à un marché fixant librement ses prix", continue-t-il. "L’ensemble de la courbe des taux est déformée. Les prêts ne vont plus de façon optimale vers les investissements productifs et prometteurs ce qui pourrait donc déclencher de nouvelles crises. S’il devient si ‘facile’ de financer de nouvelles dettes publiques, le trésorier va préférer utiliser ce moyen peu coûteux en efforts pour lui, sans trop se soucier de la charge d’intérêt future générée".

"Si la banque centrale achète des obligations émises par des établissements non-bancaires, l’argent nouvellement créé arrive directement sur les comptes de ces entreprises non-bancaires et augmente la masse monétaire en circulation (M1, M3)".

"Pour éviter les risques inflationnistes, les banques centrales doivent maîtriser cette création de monnaie par une politique monétaire restrictive, celle-là même qui peut entraîner une nouvelle récession économique !"

Depuis 10 ans, les autorités se sont lancées dans une véritable "guerre de surenchère" avec les lois naturelles de l’économie. Le problème, c’est qu’elles se trouvent désormais à court de prêteurs de derniers recours. Les renfloueurs, maintenant, ce sont les Etats eux-mêmes. Et l’Etat, cher lecteur, pour reprendre une phrase célèbre, c’est moi. Moi, vous, votre voisin — bref, les contribuables. Et il n’y a plus rien entre eux et la "main invisible"… sinon du papier. Beaucoup de papier.

Un conseil ? Faites-vous une couverture en métal. Jaune, de préférence…

Meilleures salutations,

Françoise Garteiser
La Chronique Agora

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